Si aucune rupture n’a été publiquement consommée et si l’unité a été timidement affirmée au sujet du mercato, le fonctionnement du tandem Massara-Stéphan peut interroger, sans tirer de conclusions, notamment sur les choix des joueurs cet été et la définition commune d’un système de jeu. Résultat, une équipe et un coach qui se cherchent toujours, trois mois plus tard…
Quelle tactique et quel schéma ?
Bien malin celui qui aujourd’hui, est capable de dire dans quel schéma ce Stade Rennais version 2024-2025 est le plus performant ou séduisant. Et pour cause, s’il a bien remporté trois matchs (face à Lyon puis face aux deux derniers, Montpellier et Le Havre, tous au Roazhon Park), le onze rennais a trop rarement séduit ou convaincu. En cause notamment, des systèmes tactiques en permanence modifiés, remodelés, tantôt à cinq derrière, tantôt à quatre, une attaque parfois à une tête, parfois à trois, sans ailiers…
Bref, un pêle-mêle où personne n’a pu construire de confiance ou de certitudes, à commencer par le coach lui-même. Celui-ci, lorsqu’il disposait encore de Benjamin Bourigeaud, semblait parti sur un 4-4-2 en losange, puis bifurqua sur un système à trois centraux, qu’il jugeait plus adapté à son effectif « au complet » une fois le mercato achevé.
« On a recruté des ailiers pour jouer en 4-2-3-1 ou 4-3-3 mais ils n’étaient pas disponibles. On s’adapte désormais »
Guère plus convaincant, ce 3-4-3, ou plutôt 5-2-3 tant les latéraux n’y ont guère convaincu offensivement, semble déjà promis aux cartons pour faire place à un 4-2-3-1 où Jota et Gomez auront en charge l’animation par les ailes, avec Albert Gronbeak en soutien d’Arnaud Kalimuendo. L’idée de base, si l’on en croit les mots de Julien Stéphan : « On a recruté des ailiers pour jouer en 4-2-3-1 ou 4-3-3 mais ils n’étaient pas disponibles. On s’adapte désormais. On met un système en adéquation avec ce qu’on avait imaginé en début de saison. »
Deux ailiers de métier seulement, donc, dont un joueur présenté comme un pari sur l’avenir (Andres Gomez) et un autre à relancer après un semestre blanc (Jota). Il y a aussi la découverte du fil conducteur tactique du mercato agité trois mois plus tard au sujet de l’animation offensive… Les questions se posent, et sont désormais légitimes, tant ce Stade Rennais-là semble avancer à vue, soumis aux disponibilités et absences de ses joueurs. De l’adaptation, en permanence, qui montre déjà clairement ses limites…
Des supporters en recherche de « leur » Stade Rennais…
Une bronca vécue un soir de victoire, cela ne peut évidemment pas être anodin et encore moins être passé sous silence. Si le public rennais est souvent salué pour ses tifos, sa ferveur et son relatif calme, que nous appellerons ici intelligence, à savoir ne pas envahir un terrain ou aller menacer ses propres joueurs, il commence aussi à perdre patience et, logiquement, demander quelques comptes.
Les prestations indigestes ou clairement restrictives fournies face au Havre, Monaco ou encore Lens, ne passent pas et les supporters en veulent beaucoup plus, habitués qu’ils ont été aux scénarios fous, au beau jeu et à un certain état d’esprit. Déjà lesté de joueurs dans lesquels s’identifier comme pouvaient l’être Benjamin Bourigeaud et Martin Terrier pour leur charisme et leur vécu rennais, voire Désiré Doué pour sa technique ou Arthur Theate pour sa grinta, le microcosme rennais s’impatiente, commence à attendre de réellement découvrir qui sont ses nouveaux représentants arrivés cet été et quasiment tous inconnus au bataillon, ou presque…
Pour le moment, le patchwork ne convainc ni tactiquement, ni dans les attitudes. Le Roazhon Park s’est exprimé, a-t-il été entendu par le coach et les décideurs rennais ? Une certitude, le désamour est consommé et celui qui était hier l’enfant du club adoré et béni de tous pour avoir rapporté la coupe de France dans la capitale bretonne est aujourd’hui sous le feu des critiques.
« La bascule ne se fait jamais par quelque chose qui devient tout de suite flamboyant »
Julien Stéphan le sait et analysait, après cette fameuse bronca d’octobre consécutive à la victoire face au Havre : « Il y a des attentes. On n’a peut-être pas répondu à toutes les attentes du public s’il a réagi comme ça. Il faudra que ça nous motive davantage pour répondre encore mieux à ces attentes. Je pense aussi que c’est aussi une fin de match un peu difficile qui a donné ça.
Mais dans ce moment-là, il faut quand même bien prendre conscience et ce qui est essentiel pour nous, c’est la victoire. Il faut la souligner, la retenir, elle est vraiment importante. La bascule ne se fait jamais par quelque chose qui devient tout de suite flamboyant. J’espère, j’envisage, et on a travaillé beaucoup pour encore s’améliorer et pouvoir les satisfaire davantage. »
Cet espoir devra vite devenir une réalité car si le public rennais est exigeant, il n’est pas le seul et un club du statut du Stade Rennais, durement acquis en six ans notamment grâce à Julien Stéphan lui-même entre autres, ne peut s’autoriser à rester à ce niveau de performance.
Trop d’irrégularité et de niveaux inégaux dans l’effectif
S’il bénéficie enfin, fin octobre seulement, d’un effectif au complet, Julien Stéphan peut aussi accuser le coup au regard des prestations de ses joueurs. Si Alidu Seidu, Ludovic Blas, Mikhaïl Faye et à un degré moindre, Azor Matusiwa sont plutôt des satisfactions cette saison, trop d’irrégularités voire d’absences plombent le premier quart de championnat des Rennais.
Les médaillés olympiques Arnaud Kalimuendo et Adrien Truffert semblent loin de leur niveau international, la faute peut-être à une absence de coupure cet été. Les recrues sont autant de points d’interrogation que de mystères pour certaines d’entre elles. Plutôt utilisés régulièrement, Hans Hateboer, Albert Gronbeak et Léo Ostigard manquent de régularité.
Jota et Andres Gomez arrivent à peine dans le groupe tandis que les autres « renforts » n’ont été que trop peu vus jusqu’ici, voire pas du tout. Au-delà de ça, plusieurs anciens de la maison déjà présents lors de la fin de saison difficile de l’an passé semblent ne pas s’être encore remis dans le bon sens, à l’image d’Amine Gouiri, toujours aussi frustrant et désormais relégué sur le banc ou d’un Steve Mandanda reconnaissant lui-même être moins décisif même si toujours déterminé.
Un rebond et une réaction sont exigés en novembre
Si Julien Stéphan pour ses choix tactiques, comme Frederic Massara pour ses choix, peuvent être remis en cause et discutés, le tout avec respect et dans une certaine mesure si possible, les joueurs ne sont pas en reste et portent une responsabilité dans la situation actuelle. Un surplus d’âme, de mental mais aussi de dépassement de fonction et de haine de la défaite seraient les bienvenus.
En illustration les résultats catastrophiques à l’extérieur, un nul et quatre défaites, sans possibilité de surcroît de voir des regrets dans ces prestations-là. Un rebond et une réaction sont exigés en novembre, à tous les étages, afin de chasser un peu les doutes et retrouver un peu de sérénité, à défaut de certitudes.