REC Rugby – Jean-Marc Trihan : « On ne peut pas construire sans continuité »

Entretien sans langue de bois avec Jean-Marc Trihan.
Le président du REC Rugby, Jean-Marc Trihan. @Crédit photo : JRS

Infrastructures, école de rugby, ambitions sportives et développement du rugby breton : les sujets ne manquaient pas au moment de retrouver Jean-Marc Trihan président du REC, à quelques jours du retour du derby face à Nantes au Vélodrome, pour un entretien sans langue de bois.

Quatre mois après le dénouement malheureux à Langon en demi-finale des phases d’accession, la déception domine-t-elle la satisfaction de la saison réalisée ?

Sincèrement, on ne peut pas résumer notre saison dernière à cette rencontre perdue et ratée à Langon. Ils ont mis ce jour-là des ingrédients que nous n’avions pas et cela s’est payé cash. La vérité, c’est que nous avons réalisé une très belle saison 2023-24. On ne peut pas juger la saison sur un seul match et celle-ci a offert de nombreuses satisfactions.

On finit dans le Top 4 de Nationale 2, cela doit être apprécié à sa juste valeur. Il y avait quelques lacunes déjà entrevues en cours de saison qui sont ressorties en demi-finale mais c’est ainsi. Après la descente, il fallait retrouver une dynamique, le goût de la victoire, une cohésion et cela a été le cas.

De plus, la réussite d’un club ne se résume pas à son équipe première et vos jeunes ont donné satisfaction…

Exactement. Nos espoirs ont réussi une formidable saison, vraiment, répondant dans l’adversité avec tout le travail de nos éducateurs, des bénévoles autour d’eux pour les accompagner. Notre école de rugby continue également d’évoluer, de performer et nous allons cette saison franchir le cap historique des 250 licenciés, avec sans doute aussi, l’effet coupe du monde et J.O. Ce sera à nous de profiter de cette dynamique pour assurer le présent mais aussi l’avenir du club sur la décennie qui arrive. On l’a vu avec tous les jeunes qui ont intégré l’équipe de Nationale 2, la formation est une place centrale de notre projet de club.

« Faire avancer ce sport, c’est un combat permanent à mener »

Le défi du REC est aussi de continuer d’avancer sur sa structuration, qu’elle soit dans les bureaux comme dans les infrastructures…

Nous travaillons d’arrache-pied sur tout cela, au quotidien, avec l’investissement de tous. La force du club, ce sont aussi toutes ces volontés qui vont dans le même sens. Notre réalité, c’est de continuer à travailler notre structuration, d’étendre toujours le plus possible notre surface financière. Aujourd’hui, dans le contexte économique que l’on sait pour le sport, il est très compliqué de joindre les deux bouts. Tous les clubs à Rennes le vivent…

Selon vous, quelles solutions pourraient être mises en place ?

Le souci dépasse Rennes ou la Bretagne. La crise économique est bien là et les pouvoirs publics dans leur globalité ne mettent pas le sport à sa juste valeur en tête des priorités. Il n’en est pas une au point d’y mettre plus d’argent.

Et sur le plan local ?

Les collectivités nous aident et les infrastructures avancent, mais lentement. Nous devrions pouvoir inaugurer nos bureaux modulaires de Crubillé cet hiver, si tout se passe bien et la collectivité travaille sur la réhabilitation des locaux de Robert-Launay. Mais il est vrai que pour faire avancer le sport, rugby ou autre, c’est un combat permanent à mener.

L’objectif du REC est-il d’atteindre à terme la PRO D2 ?

Nous ne parlons pas de Pro D2 aujourd’hui. Pour le moment, il y a déjà un cap fixé vers la National. Cela suffit déjà amplement et nous avons du travail pour continuer à construire le club sur tous les plans et en faire un club solide de National, capable à terme d’atteindre les phases finales. Le cap à cinq ans, pour le moment, ce serait celui-ci, et c’est déjà un sacré challenge.

« Désormais, grâce à Vannes, la Bretagne apparaît définitivement sur la carte (…) Les retombées ne pourront être que positives pour tous. »

Pour le rugby breton, vous avez forcément dû apprécier la montée puis les débuts du RC Vannes dans l’élite ?

Bien sûr, c’est une excellente nouvelle, avec une vraie résonnance pour le rugby breton. Désormais, grâce à Vannes, la Bretagne apparaît définitivement sur la carte et y est mis en valeur. Les retombées ne pourront être que positives pour tous et le ruissellement naturel, d’autant que notre staff et celui du RCV se connaissent et s’apprécient. L’attractivité en sort renforcée et c’est tant mieux.

Dans cette idée de rayonnement, la réussite de Gaël Dréan à Toulon est-elle une fierté pour le REC ?

Bien sûr, nous sommes très heureux et fiers de voir l’évolution de Gaël, qui est parmi les ailiers ayant le plus joué l’an passé en Top 14, ce n’est pas rien ! Sa progression est impressionnante et nous avons, de plus, gardé d’excellentes relations avec lui. Dès qu’il le peut, il vient nous voir, a gardé le lien avec tout le monde ici. On savait qu’il état pétri de talent et c’est un garçon intelligent, bosseur. Il en récolte les fruits et on va continuer de le suivre attentivement, en lui souhaitant le meilleur.

La Coupe du Monde en France puis les Jeux Olympiques et l’Or pour le 7 ont été des vitrines incroyables. Comment les avez-vous vécus ?

Sur le côté « vitrine », c’est probable, on ressent déjà les premiers frémissements, comme en témoigne la hausse des inscriptions au sein de notre école de rugby. C’est un vrai indicateur et j’espère que cela durera. Pour les compétitions, ce fut évidemment très positif.

A titre personnel, j’ai vécu la demi-finale à Saint-Denis avec une sacrée ambiance mais au-delà de cela, l’engouement populaire a été impressionnant et la France a prouvé qu’elle pouvait organiser avec réussite une compétition internationale, comme ce fut aussi le cas pour les Jeux. Pour ce qui est du Seven, le spectacle proposé fut à la hauteur du talent de cette équipe, superbe et ne peut qu’être positif pour notre sport.

« Nous n’avons pas eu d’écoute… »

Vous allez voir du pays cette saison avec des déplacements jusqu’à… Genève. La Fédération ne semble pas vraiment situer Rennes sur la carte du rugby…

La Fédération, en effet, n’a clairement pas pris en compte notre éloignement mais à ce point… Nous n’avons pas eu d’écoute à nos impératifs logistiques et forcément, nos finances vont s’en ressentir, sans parler des autres aspects impactant directement le sportif. De plus, la Fédé se désengage cette année un peu plus sur les frais de déplacements, revus à la baisse. La bonne nouvelle, c’est que nous allons découvrir de nouveaux adversaires, de nouveaux clubs et cela sera très intéressant à vivre.

Parmi ces adversaires, une vieille connaissance, le Stade Nantais, que vous retrouvez !

Sincèrement, c’est un vrai plaisir de les retrouver et de revivre de nouveau deux derbies dans la saison. Pour l’attractivité de la région, la visibilité, le remplissage de nos stades, leur retour est une très bonne nouvelle.

Vous les avez affrontés fin septembre, pour le quatrième match de la saison. Au-delà de ce match, comment jugez-vous l’entame de votre championnat ?

L’équipe montre plutôt de belles choses même si nous manquons encore d’un peu de continuité. Nantes était un bon test pour révéler nos ambitions qui doivent être validées par nos prestations et résultats sur le terrain.

Vous vous distinguez de beaucoup d’autres présidents en affichant une grande confiance en votre staff et en œuvrant sur le long terme. Est-ce pour vous une évidence ?

Je crois au travail et surtout, à la continuité. On ne peut pas construire sans continuité. Cela ne veut pas dire que tout est linéaire, il y a des hauts et des bas, des réussites et des échecs mais nous avons une confiance réciproque et l’envie d’avancer ensemble, de construire le chemin du club ensemble.

Signature de l'auteur, Julien Bouguerra.