Quatre mois seulement après avoir pris la succession de Jean-Marc Trihan, Eric Du Mottay, nouveau président du club rennais, a eu le plaisir de soulever le bouclier et de fêter comme il se doit son premier titre à la tête du REC Rugby. Entre respect du parcours de ses joueurs et ambitions pour le futur, entretien sans filtre avec un président déterminé à emmener les siens le plus haut possible.
Quelles sont les premières images qui vous reviennent à l’évocation de ce titre de champion de N2 ?
Celles d’une vraie victoire sur le terrain, qui n’est pas galvaudée mais le fruit d’un travail tactique du staff, des joueurs et ce face à une grosse adversité. Je suis d’ailleurs très heureux de voir Niort monter avec nous, ils le méritent vraiment avec une belle équipe, un beau club et un projet solide ! L’émotion me revient aussi au regard de ce que les joueurs viennent de réaliser. Ils se l’étaient promis mais dans le sport, entre vouloir et faire, il y a une marge et beaucoup de travail pour réussir.
Et ils l’ont fait. De plus, le partage a été total avec les dirigeants, les bénévoles, les partenaires. Il y a aussi eu la sortie, avec ce titre, offerte à Alex, notre capitaine. Je repense aussi aux Brésiliennes, ce petit jeu d’échauffement en mode football où le ballon ne doit pas toucher le sol, ou aux parties de cartes. Cette émotion et ce titre font d’ores et déjà partie des très beaux moments de ma vie.
Avez-vous vécu la finale sous haute tension ?
Un peu mais pas si longtemps que cela au final. Beaucoup de stress avant la rencontre, même si le groupe dégageait lui beaucoup de concentration et de sérénité à la fois. Durant la rencontre, j’étais aux côtés de Jean-Marc. J’ai beaucoup stressé au début, surtout avec l’entame des Niortais, même si ce scénario était identifié et choisi. Puis au sortir des deux cartons jaunes, j’ai senti que l’équipe avait pris le match en main et qu’il serait très compliqué pour Niort de nous faire reculer.
Les garçons donnaient vraiment l’impression que rien ne pouvait nous arriver, même si Niort s’est battu jusqu’au bout. La détermination de nos joueurs s’est d’ailleurs parfaitement illustrée sur les ultimes minutes, où ils ne pouvaient plus être rejoints mais ont continué de refuser de lâcher le moindre point. C’est une victoire superbe, même si ce n’était pas le match le plus abouti mais l’essentiel était ailleurs.
« lI y a encore plus d’une dizaine de joueur déjà champions de F1 dans l’effectif actuel, ce qui montre une continuité, une progression »
Ce titre est aussi un accélérateur d’intégration pour le jeune président que vous êtes ?
Facilitateur, surtout car je ne suis pas non plus un nouveau venu au club, où j’étais partenaire puis membre du bureau mais je connaissais évidemment beaucoup moins le groupe, du moins pas autant sur le plan humain. Sur ce titre, j’ai vécu les choses forcément différemment, de beaucoup plus près, parfois très près même (rires) !
Avec ces joueurs-là, c’est du bonheur et c’était à moi de m’intégrer. En ce sens, l’adoubement par Jean-Marc a été important et ils m’ont parfaitement accueilli et intégré à leur victoire, comme un membre de la famille. Ce titre, c’est aussi un accélérateur de responsabilités et de décisions à prendre, avec les défis qui nous attendent.
Ceux-ci se relèveront avec un groupe stable, mâture, sur de sa force. Est-ce aussi votre avis ?
Il y a encore plus d’une dizaine de joueur déjà champions de Fédérale une dans l’effectif actuel, ce qui montre une continuité, une progression également. Des garçons qui pour certains sont devenus papas, se sont appropriés l’identité du club et même l’identité bretonne. C’est une chance de s’appuyer sur ces profils, des garçons qui se connaissent qui s’aiment et qui sont prêts à tout donner les uns pour les autres. L’attachement est une clé précieuse en vue du maintien que nous viserons l’an prochain, avec cette fois-ci, contrairement à notre premier passage en National, une vraie préparation d’avant-saison.
Je dirais même que hors-terrain, nous préparons cette montée depuis un an et que nous comptons être prêt pour le jour J. Nous y allons pour apprendre, sans prétention ni complexe. L’objectif ne sera pas d’être au mieux douzième la veille de la dernière journée mais de se sécuriser le plus vite possible pour vivre une belle aventure et grandir encore un peu plus.
Le gap entre la Nationale 2 et la Nationale est important. Comment voyez-vous cette division ?
Comme un championnat où nous allons déjà avoir une offre de spectacle supérieure, clairement. De très gros projets seront là, tout comme plusieurs pensionnaires arrivant droit de Pro D2. Avec des clubs historiques à venir au Vélodrome, le public va avoir de très belles affiches à vivre, de grands moments.
Nous serons ambitieux dans le jeu mais raisonnables sur le temps qu’il faudra pour se hisser au niveau escompté pour durer à ce niveau. Il ne faut pas se tromper, travailler dur en appui sur ce que ce groupe sait déjà faire et progresser, avec humilité. Je suis convaincu qu’avec le mental et la solidarité qui habite ce groupe, nous aurons notre mot à dire et que l’histoire sera différente d’il y a trois ans.
« Des joueurs qui n’ont eu cesse depuis des années de repousser leurs limites et de relever les défis »
Vous avez évoqué à terme la Pro D2 comme objectif. Est-ce réalisable ?
J’ai bien dit à terme. Il faut avoir des objectifs à court, moyen et long terme. Bien sûr qu’il faut toujours regarder vers le haut mais attention, entre la Pro D2 et la Nationale, ce n’est pas une marche qui existe mais un escalier et il faudra faire beaucoup, sur et en dehors du terrain, pour y prétendre. Nous en sommes encore loin mais personne ne peut interdire l’ambition, portée en premier lieu par des joueurs qui n’ont eu cesse depuis des années de repousser leurs limites et de relever les défis.
Hors terrain justement, quels sont les grands chantiers de l’été puis de la saison à venir ?
Au-delà du recrutement qui va consister à surtout apporter quelques retouches et ajouts au groupe existant, il faut renforcer nos structures, notre rayonnement et notre qualité d’accueil à plusieurs égards. Nous avons de vrais supporters, passionnés, qui ne viennent pas uniquement pour la victoire mais pour un combat, des valeurs défendues sur le terrain et un moment de plaisir, de spectacle et de convivialité.
Nous devons attirer plus de monde et idéalement, doubler notre affluence, qui était autour de 800 personnes par match cette année. Je suis convaincu que le potentiel est là, à nous d’être attractif. C’est l’un des leviers de développement du club côté finances, avoir des recettes billetterie.
Quels sont les autres leviers ?
Nos partenariats privés, bien sûr, fidèles années après années, qui sont une force vive du club et dont le nombre continue de croître. A nous de les choyer, de leur offrir la meilleure expérience match possible et une vraie proximité. Il faut aussi aller à leur rencontre, comprendre leur problématique, leurs activités. Ensuite tous les terrains où nous pouvons aller chercher des recettes doivent être explorer et pour ce, à nous d’être ingénieux et de proposer des choses. L’identité bretonne doit être au cœur du projet, c’est une fierté, un drapeau, des couleurs et bien plus.
Nos joueurs n’ont cessé de l’affirmer, toute l’année, et sont fiers de porter notre région à ce niveau. Le club doit augmenter sa surface financière non pas par plaisir mais pour répondre aux exigences du niveau. Acheter son billet 10/12 €, le tarif que nous aimerions mettre en place, c’est évidemment contribuer au fonctionnement du club, à commencer par les déplacements, l’organisation des matchs et les salaires des joueurs, tout simplement.
Pour autant vous aurez toujours des garçons pluriactifs au sein de votre effectif ?
Cela fait partie de l’ADN du club, c’est important d’avoir cette richesse et cette diversité dans nos rangs. Les pluriactifs apportent un vécu différent à leurs coéquipiers évoluant à temps plein et inversement. Les joueurs pros à 100 % sont d’ailleurs sollicités par le club pour d’autres tâches que le terrain, cela paraît normal dans un club comme le nôtre. Ils peuvent intervenir sur l’école de rugby, participer à des actions en ville et cela nous apparaît indispensable pour respecter notre identité. Ici, il n’y a pas de vedette ou de paillettes même si à mes yeux, tous ces mecs-là sont un peu des stars, chacun dans son registre.
Y’aura-til des changements dans le directoire, le staff et l’encadrement ?
Nous continuons de nous structurer au mieux, en gardant les personnes déjà en place, même si Olivier Schaupp qui avait pris la présidence avec moi, a choisi de se retirer pour raisons personnelles. Côté staff, Carlos Muzzio a l’opportunité de rejoindre la section Paloise et nous lui souhaitons vraiment le meilleur.
Une réflexion est en cours sur la partie communication et marketing, où nous devons faire mieux pour attirer plus de monde et mieux nous faire connaître. Il faut recevoir nos partenaires, le public, les joueurs adverses dans de meilleures conditions également et cela passera par une évolution du Vélodrome. La Mairie travaille déjà avec nous et la structure a bien évolué à Robert Launay mais il reste beaucoup à faire…
C’est à dire ?
Nous devons continuer de travailler ensemble et nous savons que la collectivité est sensible à nos besoins. Nathalie Appéré nous a félicité pour notre titre, Marc Delaunay fait beaucoup pour nous et les finances publiques contribuent à nous aider et nous les remercions pour cela. Mais il faut encore avancer.
La pelouse du vélodrome est un vrai sujet, la rénovation des lieux de convivialité et des vestiaires également. Un jour, il faut aussi évoquer la piste et les tribunes. C’est aussi le rayonnement de la ville qui est en jeu, si nous voulons prétendre à aller plus haut et offrir aux joueurs les meilleures conditions d’entraînements comme de match. Aujourd’hui, les gars se changent dehors ou dans les couloirs pour l’entraînement à Robert Launay, faute de vestiaires et je pense que ce n’est pas acceptable à ce niveau.
Le règlement impose même certaines conditions, que ce soit pour accueillir les matchs ou pour les joueurs. Nous avions déjà une dérogation en N2 … Les volontés sont là et je suis convaincu que nous réussirons à avancer tous ensemble. Nos gars mais aussi tout un club, qui existe aussi grâce à ses formidables bénévoles qui font un travail dans l’ombre mais sans lequel nous ne pourrions pas avancer, pour cela je les remercie, le méritent !
