Passé par le RC Toulon et Carcassonne, puis révélé en Nationale à Cognac, le demi d’ouverture de 27 ans a pris ses marques au cœur du jeu rennais. Avec son accent bien à lui mixant Bourgogne et Sud-Ouest, il apporte expérience et ambition avec les play-offs en ligne de mire.
Il en va ainsi en Ovalie. Le virus s’attrape souvent en famille, même au cœur de la Bourgogne. Un papa, un frangin, ou un grand-père et la transmission, comme valeur fondamentale. Comme tant d’autres, Quentin Lalarme n’y déroge pas : « Je suis venu au rugby grâce à mon grand-père qui joué en groupe A à l’époque (l’ancêtre du Top 14, ndlr).
Il m’y a collé à l’âge de 5 ans, il m’emmenait. Ma mère est aussi très calée car elle a suivi mon grand-père toute sa carrière. Mon grand frère, en revanche, aujourd’hui coach dans le staff à Oyonnax, en top 14, y est venu après moi. » La famille donc, mais pas que. Gamin, Quentin Lalarme a ce petit quelque chose. Un bon pied, de la vitesse.
Il pratique le judo en parallèle, histoire de cultiver le goût du combat et d’apprendre à tomber sans se faire mal puis valide définitivement l’Ovalie au moment où les choses deviennent sérieuses. Direction, au lycée, le pôle de Dijon et l’ABCD 15, club phare du département, pour trois années d’approfondissement et de perfectionnement. Avant un grand saut vertigineux…
À l’écoute des conseils de Jonnhy Wilkinson…
Repéré par Laurent Emmanuelli et Olivier Beaudon, en charge des jeunes du RC Toulon, le numéro 10 rejoint la rade et le Var, une destination bien connue et référence : « Bien connue oui, car depuis petit, nous allions souvent passer nos vacances à la Seyne-sur-Mer ou dans le Lavandou. Alors débarquer à Toulon, dans un club si prestigieux, c’était incroyable et impossible à refuser ! »
Le club, qui sort de trois titres de champion d’Europe et d’un Bouclier, recèle de stars. La plus illustre, Jonnhy Wilkinson. Un de ces champions qui marquent à vie, par quelques mots ou même des entraînements collectifs partagés avec les pros, ou spécifiques, menés par l’ancienne star anglaise : « C’était la classe, incroyable, même, d’échanger avec Ashton, O’Connor…
Il y avait tellement de grands noms, des mecs de classe mondiale. Wilkinson donnait des séances spécifiques sur les skills, j’ai bu toutes ses paroles. Il disait surtout, et je l’ai gardé ensuite, au moment de taper au pied : « Ne te dis pas je vais essayer, dis « je vais le faire ». Pour lui, le conditionnel, dans le sport, n’existe pas. J’ai gardé ça en tête et quand je frappe, je ne gamberge pas avec des si… »
Des blessures aux mauvais moments
Dans le Var, Quentin Lalarme évolue avec les Espoirs et apprend beaucoup, bonifie son rugby. Il joue une demi-finale de championnat de France Espoirs, perdue contre Bordeaux puis intègre l’effectif pro la saison suivante. Pas de feuille de match de Top 14 mais de gros progrès avant la première grosse blessure.
Au pire moment : « Le coach devait faire tourner et j’avais de grandes chances de faire ma première « feuille ». Il y avait beaucoup de blessés, j’étais en pleine ascension et hélas, je me fais les croisés. Ça a été dur, très dur à vivre. » S’ensuit la rééducation, la reconstruction puis le retour en décembre, six mois plus tard.
Une troisième saison s’ajoute au CV, pleine avec de belles perfs mais de nouveau, la frustration de ne pas faire une feuille en Top 14. Pour grandir, le garçon veut jouer et quitte le RCT pour Carcassonne, en Pro D2 : « La prépa se passe très bien, je joue encore un peu avec les Espoirs, ayant la possibilité de le faire malgré l’âge et nous sommes trois sur le poste 10.
Au moment où je dois intégrer les feuilles, comme à Toulon : la tuile. Lors d’un déplacement à Nevers, je repars avec une commotion et une hernie aux cervicales ». Décidemment, cette fameuse feuille chez les pros se refuse mais arrive enfin, trois mois plus tard, à Brive.
Meilleur buteur avec Cognac en Nationale
Pour autant, le joueur, qui n’a signé qu’un an, ne joue que deux matchs et se retrouve sans club à l’issue d’une saison frustrante : « Je pensais vraiment que cela allait se passer différemment et j’avais un peu le bec dans l’eau. Heureusement, le manager de Cognac m’appelle. Ils jouaient la montée pour la Pro D2, dominaient en Fédérale Une et ont rejoint ensuite la Nationale, qui se créait.
J’y ai signé trois ans, avec un beau projet et visant à monter à court terme. Je suis arrivé sur la pointe des pieds mais avec beaucoup d’ambitions. » Le bilan à l’UCS est bon pour le numéro 10 qui enchaîne enfin les matchs et cumule le temps de jeu chez les « grands ». Trois saisons réussies donc, malgré le contexte et les conséquences du COVID sur les compétitions, un rôle essentiel dans l’équipe et un titre de meilleur buteur.
Pourtant, au cours de sa dernière année, le club lui signifie, en raison de ses difficultés financières, que l’aventure s’arrêtera en juin. Nice tient d’abord la corde mais le manager présent à Nice perd son poste. Pour le Bourguignon, une évidence, alors, vient mêler privé et sportif : « J’ai perdu mon grand-père en 2022 et j’ai fait le choix de rentrer à Dijon, pour aider l’équipe qui était en Nationale 2.
Sportivement, la saison fut difficile mais j’avais besoin de cela. C’était important d’être avec la famille sur ce moment-là. » Ce retour à la maison s’opère mais un nouveau départ a déjà pris racine dans un coin de l’esprit du joueur. Au moment de l’arrêt de Sam Lemming, Kevin Courties a déjà contacté le joueur, convaincu.
Le moment n’est pas le bon, Dijon ne lâche pas son garçon mais le rendez-vous est pris : « J’ai beaucoup apprécié nos échanges, le projet de jeu et de vie. Le REC me voulait en joker mais ce n’était pas possible. En revanche, pour la saison suivante, j’ai dit oui de suite. »
« Il y a un super groupe ici, très homogène, avec des gars qui sont là depuis longtemps »
A Rennes, Quentin Lalarme retrouve de vieilles connaissances, croisées tout au long du parcours : Téo Gazin, Pedro Soto, Corentin Schmitt, Benjamin Noble ou encore Jules Missland. La greffe prend et la découverte d’un nouveau cadre ravit le jeune homme de 27 ans : « Il y a un super groupe ici, très homogène, avec des gars qui sont là depuis longtemps, garants de l’identité et de l’esprit du groupe et d’autres qui ont fait des feuilles en Top 14, joué en Pro D2 ou qui ont de grosses ambitions et tout autant de qualités.
L’objectif play-offs est très bien engagé et nous voulons tous aller le plus loin possible, avec bien sûr, le National dans un coin de la tête. On ne joue pas des phases finales pour les perdre. » Et la concurrence dans tout ça ? : « Les choses sont simples, fluides et tout le monde tire dans le même sens, avec une concurrence saine. »
Celle-ci est là, notamment, au moment de prendre le jeu au pied. Faisant partie des trois préposés aux transformations, le Bourguignon explique : « Il n’y a pas de hiérarchie pour botter. C’est surtout une question de ressenti. Nous échangeons avant le match, et on décide. Sachant que celui qui démarre ne sera pas forcément celui qui termine. C’est du feeling, du dialogue entre nous. »
Très habile au pied, le numéro 10 rennais a-t-il une routine ? « Sincèrement, non, beaucoup de concentration, oui, fixer un point entre les perches et m’y tenir pour bien rentrer dans la balle. Ensuite, je frappe, je ne me pose pas de questions et en général, je ne relève la tête qu’une fois que les arbitres ont levé les drapeaux. »
Epanoui à Rennes, en voilà un qui a déjà adopté « la Bretagne avec ses paysages magnifiques, la mer, une vraie chaleur humaine une fois que l’on a montré qu’on ne triche pas et sa météo pas si compliquée que cela (rires) ! » En revanche, quid de cet accent du sud, quand on vient de l’Est de la France ?
« J’avoue que je l’ai pris à Toulon puis Carcassonne, mais qu’il n’est pas de naissance. Après tout, il sonne bien, je l’ai mixé avec mon accent bourguignon et ça donne cela ! » On valide, comme le REC, pas malheureux du tout d’avoir trouvé un véritable maestro au jeu au pied mais surtout, un vrai talent doublé d’un bon mec de plus dans un effectif qui n’en manque décidément pas !