Football – Stade Rennais : Comment le Stade est redevenu redoutable et redouté

Les "Rouge et Noir" ont recollé aux places européennes.
À l'image du Stade Rennais, Martin Terrier est de retour au premier plan. Crédit : JRS

Moribond et malade mi-décembre, le Stade Rennais a totalement changé de visage et remonte la pente en ne laissant rien ou presque sur son passage. Jusqu’où iront donc les irrésistibles Rouge et Noir ? En Ligue des champions ? Recette d’une remontada.

Julien Stéphan, évidemment !

Comment dissocier l’embellie rennaise de la patte du technicien rennais ? Impossible ! Depuis son retour, Julien Stéphan affiche un bilan très positif sur 18 matchs, toutes compétitions confondues, de onze victoires, trois nuls et quatre défaites soit 36 points et une moyenne de deux points par match. En championnat, celle-ci est identique avec 23 points sur 33 en matchs (7 victoires, 2 nuls et 2 défaites).

La preuve chiffrée d’une réelle emprise de celui qui a écrit la plus belle page contemporaine du club pour son retour, quand certains annonçaient déjà un fiasco sur le simple critère du come-back ! Plus stable tactiquement, beaucoup plus sûre d’elle et pragmatique et parfois aussi plus spectaculaire, l’équipe bénéficie d’un Stéphan 2.0 amélioré et peut-être plus distant des événements mais plus proche de son groupe.

A son sujet, Benjamin Bourigeaud déclarait avant Milan : « Les discours et la méthode n’ont pas énormément changé. Je trouve qu’il est venu avec plein de fraîcheur. Il est plus proche de ses joueurs aujourd’hui, même s’il l’était déjà avant mais je retrouve quasiment le même coach que j’ai connu auparavant, avec plus d’expérience ».

Ce que confirme l’intéressé : « Si j’ai plus de recul, c’est sûr. Plus de proximité certainement parce que plus d’assurance et de confiance. Quand on commence, ce n’est pas simple de trouver le bon positionnement entre la nécessité de gagner le respect du vestiaire et avoir une proximité.

Aujourd’hui, je suis beaucoup plus à l’aise dans cette relation, j’ai vécu d’autre chose qui m’ont permis d’avancer. Après, je reste un jeune entraîneur qui a un peu de bouteille et de vécu maintenant. J’ai aussi la volonté de profiter de ce vestiaire, de ces mecs-là qui méritent vraiment de vivre ce qu’ils vivent aujourd’hui. Ils travaillent s’accrochent et méritent, de vivre ce rebond-là. »

Si la première année est historiquement toujours excellente avec le natif de Rennes, reste à durer dans le temps et à enchaîner la saison prochaine avec la même dynamique et symbiose de groupe. Sous contrat jusqu’en juin, Julien Stéphan semble bien parti pour avoir l’occasion de s’installer dans le temps. Si les résultats demeurent les mêmes, on signe de suite !

Sans Matic, ça va plus vite !

Cela reste facile à dire après coup mais le constat est tellement édifiant… S’il ne fallait pas critiquer sa Majesté Matic lors de ses cinq premiers mois rennais, sous peine d’être dévisagé ou envoyé sur l’autel de l’incompétence journalistique, ou tout simplement footballistique, force est de constater que l’équipe revit depuis sa mise à l’écart puis son départ.

Ecarté avant Toulouse, où il n’avait pas été retenu car arrivé en retard au rassemblement, l’international serbe n’était tout simplement pas fait pour le jeu rennais. Depuis son départ, Rennes n’a plus perdu, hormis à Milan et le jeu a radicalement changé. Avec lui, Rennes ne gagna que deux fois en Ligue 1…

Plus de tâtonnements et de ralentissement dans l’axe, des joueurs mis dans l’ombre par Bruno Genesio revenus au premier plan tant sur les feuilles de matchs, comme Enzo Le Fée et Baptiste Sanamaria et un ensemble fluidifié, avec un retour logique au 4-4-2, système le plus adapté à l’effectif en place et non à son altesse.

Matic au Stade Rennais, cela avait de la « gueule » mais l’affaire a hélas viré au flop, c’est ainsi. Et ce n’est pas la très petite sortie de l’homme prêt à tout pour rallier Lyon  qui fera regretter à quiconque son départ. L’arrivée d’Azor Matusiwa au mercato a déjà fait oublier l’ancien de la Roma et son impact dans le jeu colle parfaitement au plan de jeu de Julien Stéphan. De quoi envisager la suite avec sérénité !

Des individualités fortes qui font des différences

Joueur de mois de janvier en Ligue 1, et très performant en février, Martin Terrier est de retour. Avec un triplé inscrit face au Milan AC, Benjamin Bourigeaud est entré dans la légende européenne du club « Rouge et Noir » mais pas que, devenant le premier joueur français à inscrire un triplé avec un club français face au Milan. En voilà deux pour qui l’arrivée de Julien Stéphan et le retour au 4-4-2 a changé beaucoup de choses.

Beaucoup plus à l’aise à deux en attaque, le meilleur attaquant rennais des saisons passées retrouve son efficacité, avec six buts inscrits et une passe décisive sur cette période de reprise mais surtout beaucoup de finesse dans le jeu, des déviations toujours bien senties et une capacité à faire briller les autres peu égalée. Le talent est là, la condition revenue à un niveau très correct et les perspectives réjouissantes.

Sur le côté droit, Benjamin Bourigeaud retrouve son meilleur terrain d’expression amenant ses centres, sa grinta, sa percussion en rentrant axe et son plaisir de jouer. On le sait, les premières parties de saison de l’ex-capitaine (d’ailleurs délesté du poids du brassard) sont parfois poussives pour terminer en boulet de canon et l’exercice en cours semble être de cet acabit.

Désiré Doué, enfin, monte clairement en régime, avec un jeu de plus en plus épuré et au service de ses coéquipiers. S’il reste quelques grigris inutiles et parfois agaçants, le garçon gagne en constance, en volume et devient le titulaire logique sur le côté gauche, avec en plus l’efficacité désormais au rendez-vous, pour passer ou marquer. Une excellente nouvelle pour la fin de saison rennaise.

Steve Mandanda décisif, la défense en progrès

Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage… Depuis des mois, la même litanie : la défense n’est pas au niveau, les centraux sont trop jeunes, Steve Mandanda trop vieux, les latéraux ne savent pas défendre… Si tout cela a pu être vrai par séquences, en faire une généralité fausse la vérité.

Le Stade Rennais présente ainsi la septième défense du championnat, ce qui est loin d’être scandaleux et Steve Mandanda est, après le match de Paris, le septième gardien du championnat au nombre d’arrêt (73 et 3,17 par match).

Des stats honorables avec des progrès pour la jeune défense qui si elle a accumulé les erreurs individuelles en défense avant la trêve, semble gagner en performance et en sérénité, surtout depuis qu’elle est revenue à un système à quatre.

L’apport offensif de Guéla Doué compense un peu ses approximations en défense, avec l’alternative de plus en plus intéressante d’Alidu Seidu sur le poste. De l’autre côté, Adrien Truffert réalise une séance pleine tandis que Warmed Omari retrouve un très bon niveau dans l’axe.

Arthur Theate, enfin, semble déterminé à terminer la saison en force, avant peut-être de s’en aller, mais si possible en laissant le Stade Rennais européen, comme le démontre sa récente débauche d’énergie impressionnante contre Clermont ou Milan. Les voyants sont passés au vert grâce à une confiance revenue, même si tout n’est pas encore parfait.

Des adversaires qui stagnent

L’enfer, c’est les autres, mais pas toujours ! Depuis janvier, si le Stade Rennais a pu remonter la pente au classement et revenir taper aux portes des accessits européens, il le doit aussi à la faiblesse et à la médiocrité de beaucoup de ses dits prétendants pour ces mêmes places.

La constance semble être une vague utopie cette saison pour beaucoup d’ambitieux affirmés et le surplace une maladie fortement contagieuse. L’OM est ainsi en pleine crise de confiance et de résultat et vient de rappeler Jean-Louis Gasset pour sauver ses meubles bien abîmés.

Nice, après moults hold-up, rentre doucement mais sûrement dans le rang tandis que Monaco alterne avec constance brio et horreur. Lille, qui pourrait profiter de tout cela, est capable de perdre à Toulouse et n’avance guère plus que Lens, qui peine à trouver son second souffle. Ajoutez à cela Lyon beaucoup trop loin pour redevenir crédible et c’est une vraie possibilité de se recaler rapidement dans le top 5 (ou mieux !) qui s’ouvre aux Rennais dans les trois mois à venir.

Seul un petit club au bout de la Bretagne affiche résultat et continuité, s’offrant la seconde place, à la surprise générale, le Stade Brestois. Tiendra-t-il jusqu’au bout ? C’est un autre débat mais le Stade Rennais peut d’ores et déjà ambitionner de retrouver son rang tant il n’aura pas été le seul cette saison à passer par tous les états !

Signature de l'auteur, Julien Bouguerra