Football – Stade Rennais : Warmed Omari : « Je ne pense qu’à remettre l’équipe où elle doit être au classement »

Warmed Omari donne ses consignes
Warmed Omari lors du match de coupe de France contre Marseille. Crédit : JRS

Tranquille et souriant, Warmed Omari n’a rien esquivé. Suspendu pour le déplacement à Lyon, le défenseur de 23 ans, rare dans les médias, s’est confié au JRS sur la première partie de saison, sa gestion émotionnelle, l’amitié mais aussi les ambitions d’un groupe revanchard. Des mots précis et une tête bien construite pour un vrai bon moment de partage.

Comment as-tu vécu la première partie de saison ?

Ça a été très difficile. Nous avions des ambitions, un effectif qui paraissait fort en début de saison, avec une bonne préparation et des amicaux intéressants. Tout était là, on a bien commencé puis les résultats n’ont plus suivi et cela nous a mis un coup derrière la tête.

Plus les matchs s’enchaînaient, plus le manque de confiance était là, même si personne n’a jamais lâché. Le fait que ça ne paye pas ne nous a pas aidé et individuellement, personne n’est parvenu à ressortir du lot.

Depuis cet été, beaucoup de monde pointe la jeunesse de la défense et l’absence de recrutement dans ce secteur. Comment vit-on cela à 23 ans ?

Quand on a l’habitude de recevoir des critiques, ça va. J’en ai déjà reçu pas mal donc je sais désormais me protéger. Je ne regarde pas trop tout ce qui se dit mais pour certains de mes coéquipiers, ça a pu être différent. La défense, c’est facile de l’attaquer. C’est vrai que l’on a fait des erreurs, dont des très évitables qui ont mis l’équipe en difficulté mais c’est aussi cela que le club assume par ses choix.

Celui de faire progresser ses jeunes joueurs en est un, et oui, nous sommes parfois perfectibles. Que le club n’ait pas recruté sur ces derniers mercatos montre aussi la confiance portée en nous et ça, c’est important pour rebondir après une erreur.

Y a-t-il une fierté à être autant de jeunes formés au centre, qui plus est défenseurs, à jouer en Ligue 1 voire Ligue Europa. Avec Adrien Truffert, Jeanuël Belocian, Lorenz Assignon et vous alignés en même temps, c’est très rare sur la scène européenne…

C’est vrai. Lorenz, Adrien et moi, on s’est côtoyés en réserve notamment. Jeanu est plus jeune. C’est une fierté pour le club mais pour nous, être alignés, c’est incroyable !

Il y a tout le temps des moments où l’on se souvient de nos matchs en R1 en U15, où l’on jouait parfois sur des terrains difficiles, à la campagne et se retrouver là au meilleur niveau, je le répète, c’est incroyable. On kiffe forcément cela, avec nos petites « private jokes » !

« Lors de ma première année, je voulais répondre mais si tu réponds à une personne, tu dois répondre à tout le monde. Alors à quoi bon… »

Cette complicité vient-elle compenser les mots durs qui t’arrivent forcément directement ou via ton entourage ?

On a toujours des coéquipiers plus proches, avec qui on se sent bien et avec qui on peut parler dans les moments difficiles. Par exemple, face à Lorient, où je fais mes deux erreurs, j’ai eu directement le soutien d’Adri, de Jeanu et de Lorenz.

Ça m’a aidé, ça m’a apporté beaucoup de choses et je leur rendrai dès qu’ils en auront besoin. Ce genre de moment, ça renforce les liens, au-delà d’un match ou même d’un contrat.

Tu es discret sur les réseaux sociaux. Est-ce un choix et comment juges-tu l’évolution de l’importance de ceux-ci dans une carrière ?

J’ai Instagram où je publie essentiellement des photos de ma vie en dehors du foot, du Lifestyle, je montre ma vie de tous les jours. Il y aura toujours des gens pour critiquer, y compris les plus grands alors ce n’est pas à nous, jeunes n’ayant encore rien prouvé, de débattre ou rentrer dans les échanges négatifs.

Lors de ma première année, je voulais répondre mais si tu réponds à une personne, tu dois répondre à tout le monde. Alors à quoi bon… Il faut surtout briffer la famille, et protéger les proches autour de nous.

Les dirigeants ou les coachs t’ont-ils parlé dans tes passages plus compliqués ?

Le coach (ndlr : Genesio) me parlait souvent, je savais que j’avais son soutien. A Lorient, il me sort, je suis mal et je me dis que je ne vais plus rejouer un moment mais il m’aligne dans la rencontre suivante contre le Maccabi. La confiance ne se joue pas sur un match.

Florian Maurice, Genesio, comme le président Cloarec, sont venus me voir et m’ont dit que j’avais leur soutien, qu’il fallait grandir et que cela passe par là, m’encourageant à passer à autre chose, et à avancer.

« Je ne veux pas m’approcher des choses néfastes qui sont potentiellement nombreuses dans le foot. J’essaie d’en rester loin. »

As-tu un entourage vers qui tu peux te tourner, sur qui tu t’appuies quand le doute pointe à l’horizon ?

Ma femme déjà (rires) ! Elle comprend de mieux en mieux le foot et du coup, ça commence à devenir compliqué. Quand je fais un mauvais match, j’ai le droit à quelques critiques ! Je m’appuie aussi sur mon beau-frère, ma famille. C’est une chance de les avoir tous.

Au début, ils me parlaient surtout du positif mais aujourd’hui, ils sont objectifs, plus critiques pour me dire ce qui est bon ou mauvais et pour m’aider à avancer.

La paternité est-elle aussi une précieuse alliée pour mûrir plus vite dans le foot ?

Ça aide à relativiser, c’est sûr. Il y a une autre vie à côté du foot. Quand je rentre après un match difficile, je regarde ma fille et je peux passer à autre chose très rapidement. C’est quelque chose de fort, qui permet aussi de garder les pieds sur terre.

Tu apparais comme un garçon simple à la ville. Quel est ton « LifeStyle » ?

Oui, je veux garder ces valeurs. Je ne veux pas m’approcher des choses néfastes qui sont potentiellement nombreuses dans le foot. J’essaie d’en rester loin. Tant que j’ai ma famille, mes amis, mes copains, je reste tranquille, chez moi.

Si je dois jouer à la Play toute la journée ou jouer avec ma fille, pas de soucis. J’ai une vie tout à fait normale et je n’ai pas besoin de sortir ou de m’afficher.

Ce style impassible, quoi qu’il arrive sur le terrain, rentre dans ta maîtrise des émotions ?

C’est vrai, c’est une bonne description de moi, je donne cette impression-là mais ça ne veut pas dire que je ne suis pas impliqué ou que je n’en ai rien à faire de rater quelque chose, au contraire. J’ai simplement appris à me canaliser, à ne rien montrer. Quand tu montres tes émotions à l’adversaire, quelque part, tu lui donnes des informations et tu indiques des faiblesses.

Ça permet aussi de rester très concentré. Je sais quand on peut exulter mais j’essaie de montrer le moins possible. Et puis, si je me lâche, je vais voir l’arbitre et je vais prendre des cartons jaunes. Je suis un impulsif qui s’est canalisé (rires) !

Julien Stéphan t’avait amené vers un psychologue à l’époque pour t’aider à gérer tes émotions. Y a-t-il eu une suite à cela et comment appréhendes-tu l’aspect mental de ton sport ?

Je réfléchis à avoir un préparateur mental, plus qu’un psy je pense. Aujourd’hui, je vois plus ce type de préparation afin de progresser sur cet aspect du jeu. La tête, c’est très important. Le corps peut tenir mais quand ça ne va pas en haut, c’est tout le reste qui ne va plus. Le club, de plus, l’a mis en place, à la carte, et c’est très intéressant.

« Le coach m’a demandé de progresser dans le leadership, de parler plus »

Le joueur de foot est désormais médiatiquement sollicité pour donner son avis, toujours très scruté. Est-ce normal à ton goût et t’autorises-tu à parler, notamment d’autre chose que de foot ?

Nous sommes des footballeurs, ok, mais aussi des citoyens. C’est possible de le faire, à l’image de Jules Koundé qui prend souvent des positions fortes et défend ses valeurs. Il y aura toujours du monde pour être contre mais tant que l’on a les bons mots et que l’on sait poser les choses, on peut parler sans qu’il y ait de problèmes.

Après, ce n’est pas parce que l’on est une personne publique que l’on est obligé de mettre ses avis ou opinions accessibles à tous.

Revenons au terrain. Ce péno contre l’OM, c’est l’un des meilleurs moments de ta carrière ?

Oui, franchement, c’est une émotion énorme. J’étais très concentré, déterminé. Pau Lopez a juste bougé le ballon. Après, je finis par exulter, oui, c’est sorti tout seul. J’avais aussi connu une pareille émotion sur notre second but face au Shahktar l’an passé.

Dans le jeu, notamment sur le jeu aérien, où situes-tu tes progrès ?

Je pense que j’avance défensivement, que c’est de mieux en mieux mais je dois encore progresser offensivement, mieux me situer dans la surface adverse, être plus agressif.

Un point qui t’est parfois reproché ?

Oui, j’essaie de progresser aussi là-dessus, d’être plus proche de mon adversaire, plus mordant. Je travaille pour cela.

Un mot sur Julien Stéphan, qui revient au club et que tu connaissais déjà ?

En arrivant, il m’a dit clairement ce qu’il attend de moi. Je n’étais pas forcément à l’aise dans la défense à trois qui avait été mise en place, où je manquais de repères. Maintenant que nous sommes revenus à quatre, je me sens mieux.

Je continue de bosser à l’entraînement, le coach m’a donné les aspects sur lesquels je dois progresser, notamment le leadership. Je dois plus parler sur le terrain, diriger mes lignes avant. Je le mets en place et je me trouve beaucoup plus à l’aise sur le terrain et plus concentré.

Bruno Genesio a aussi forcément compté pour toi…

Bien sûr. Je le remercie, il a été très important pour moi, m’a beaucoup aidé à mes débuts. Il ne m’a jamais lâché, toujours cherché à m’emmener avec lui, me faire grandir. Je n’oublierai pas ce qu’il a fait pour moi.

En conclusion, on vous imagine, toi et tes coéquipiers, ultra-déterminés à effacer cette phase aller avec des objectifs élevés. Jusqu’à l’Europe ?

C’est une phrase bateau mais on prend vraiment match après match, sincèrement, comme une finale. Nous n’avions peut-être pas cette faim-là en début de saison. Avec tout ce qui s’est passé, on est obligés d’inverser la tendance, de repartir avec de nouvelles ambitions. Ne parlons pas d’Europe ou de top 6 mais prenons des points, au maximum et nous verrons en avril où cela nous mène.

Et personnellement, vois-tu ton avenir ici avec une réflexion en cours ?

Franchement, je ne réfléchis pour le moment pas du tout à cela. Je suis quelqu’un qui voit à court terme. Cet été, c’est loin. Je ne pense qu’à faire cinq prochains mois au top avec le club et à remettre l’équipe où elle doit être au classement. Si déjà on fait cela, je serai très satisfait. Le reste, on verra plus tard.

Signature de l'auteur, Julien Bouguerra