Sur le terrain, son calme et son efficacité en font un cadre incontestable, moins de huit mois après son arrivée en Bretagne. A 33 ans, Gustavo Delgado s’est imposé le plus logiquement du monde en Bretagne, où son charisme laisse peu de doute sur l’homme et son importance, sur comme en dehors du terrain.
Narbonne, Montpellier, Almeria, Guadalajara, Beauvais, Rennes… Deux intrus se sont glissés parmi ces destinations ensoleillées mais peu gêné par les considérations météo, Gustavo Delgado s’en amuse : « Le temps ? Cette semaine c’est dur, il pleut beaucoup ! Mais ici, la région est très belle ! ». De là à imaginer que le diaporama beauvaisien a laissé de marbre le réceptionneur-attaquant du Rennes Volley 35 ? Lui n’en dira rien, trop respectueux et intelligent pour tomber dans le panneau. Et puis pourquoi avoir envie de piéger l’international espagnol ?
Du football au volley, en passant par le hand !
Aujourd’hui membre incontournable d’un six qui tire un peu la langue avec l’accumulation de matchs disputés depuis septembre, l’ancien montpelliérain s’est parfaitement fondu dans son nouvel environnement, adopté par le public comme par le club. Du vestiaire aux employés du club, l’unanimité est là autour d’un joueur qui, pourtant, failli ne jamais venir au volley ! Car petit, Gustavo évolue déjà en salle mais sur les terrains de hand de Mostoles, au sud-ouest de Madrid. Plutôt « à l’aise, je me débrouillais bien », Gus’ a ensuite l’envie et le talent pour sortir dehors et passer à onze sur le terrain. Direction le foot pour ce fan invétéré du Real Madrid. Milieu défensif, il passe même une détection d’une journée à la Ciudad Deportiva du célèbre club Merengue, sans suite : « Tu sais, ils reçoivent énormément de gamins mais très peu sont retenus. Mais pendant une journée, on a l’équipement, le maillot, tout ça. C’est un souvenir énorme, même si on ne repart pas avec ! ». S’il est plutôt bon, son avenir ne semble pas passer par le carré vert et ses aînés vont lui indiquer sa vocation. Tous deux joueurs de volley, le grand frère et la grande sœur vont entraîner le « petit » dans leur sillage. A 14 ans, Gustavo accepte, « à reculons », d’aller prendre part à un entrainement : « La saison de foot s’était mal terminée et je me suis dit allez, j’essaie. Je connaissais bien l’ambiance des gymnases, j’allais régulièrement voir jouer la famille. Pour autant, jamais je n’aurais imaginé lâcher le foot pour le volley… et puis voilà. ». Visiblement prédisposé aux sports-co se jouant avec un ballon, le numéro 7 rennais prend très rapidement ses marques et grimpe de catégories en catégories. A Mostales, d’abord, puis très rapidement du côté de Leganes et de son centre de formation très réputé. A l’époque, le volley se porte bien en Espagne et dispose d’une vraie présence sur la scène européenne. Rapidement repéré, Gus’ file à Guadalajara, sorte de pole nationale où il est également convié en équipe nationale. La progression est linéaire et logiquement, Almeria, le cador andalou du volley espagnol, se penche sur son cas et fait appel à lui en 2009 : « L’Espagne sortait de son titre de champion d’Europe (2007) et le championnat attirait beaucoup de monde. J’ai intégré l’équipe mais la première saison, j’ai peu joué, il y avait du gros monde devant moi. Ensuite, je me suis régalé pendant 5 saisons ! Nous avons vécu des moments fantastiques, dont le final Four européen disputé en Grèce ! Le volley espagnol, en revanche, ne peut pas en dire autant… ». Et pour cause ! La crise de l’immobilier fait rage en Espagne et le modèle économique du volley, porté par les municipalités et les entreprises du bâtiment, bat sérieusement de l’aile. Seuls quelques clubs gardent un niveau décent et le titre européen n’est plus qu’un lointain souvenir. En 2013, Gustavo Delgado choisit ainsi un premier départ à l’étranger. Il doit rejoindre Poitiers mais, devant la rétrogradation du club, voit son contrat annulé et rebondit à Narbonne, près de son Espagne natale. Là-bas, il vit deux saisons contrastées : « La première fut merveilleuse sur tous les plans. Nous accédons aux demi-finales de la coupe de France et à celle du championnat, en échouant d’un rien aux portes de la finale. Nous avions une superbe équipe, des copains, une ambiance unique. Lors de la seconde saison, ce fut plus compliqué, nous n’avions pas confirmé. J’ai loupé les trois derniers matchs de la saison pour cause de blessure et je n’ai pas pu aider les amis à se maintenir… Ce fut très difficile à digérer. ». L’aspect humain, c’est la base et le point d’équilibre pour le madrilène, qui quitte le club, en fin de contrat, pour rejoindre Montpellier, séduit par son profil. Mais là, nouveau hic, avec cette fois-ci, une terrible rupture des ligaments croisés du genou. Saison terminée avant d’avoir débuté et retour en Espagne : « Ce fut difficile mais j’ai appris. Il a fallu travailler dur, retravailler les acquis et retrouver la confiance, le jeu. Après une petite pige à Teruel, près de Madrid, j’ai retrouvé un contrat en France, à Beauvais. Là-bas, j’ai eu la chance d’évoluer en Ligue A et de pouvoir regagner les bonnes sensations et la confiance tout au long de l’année. Je me suis remis dans le coup et pour ça, je ne peux que les remercier. Ensuite Montpellier ne m’avait pas oublié et j’y suis allé, pour de bon ! ».
« Le métier est ainsi, il faut s’y faire… »
Le succès est au rendez-vous dans l’Hérault. Là-bas, il accumule le temps de jeu au sein d’une très belle équipe, qui atteint deux ans de suite les quarts de finale des play-offs et s’offre une demi-finale en 2016 de coupe de France. Surtout, le couple Delgado crée des liens forts malgré la difficulté de son travail pour réussir cela : « Là-bas, nous avons noué de vraies amitiés, vécu beaucoup de bons moments. Notre métier de volleyeur veut cela, que nous bougions quasiment tous les ans ou tous les deux ans. C’est ainsi, il faut s’y faire et l’accepter. Ma compagne, Helga, que j’ai connue quand j’avais 16 ans, m’a toujours encouragé et suivi sauf à Almeria. A l’époque, elle faisait ses études près de Madrid. Désormais, nous avons notre pied à terre, à Almeria, justement. Finalement, l’année se divise en huit mois en France, pour la saison sportive, puis quatre mois là-bas. C’est un rythme que nous avons adopté et qui nous va bien. Elle a elle aussi ses projets de son côté, ses activités, et c’est un cadeau de la vie et du volley à nos yeux qu’elle puisse avoir le temps de s’occuper de notre enfant. ». Et du prochain puisque le couple attend une seconde petite fille pour avril. Une petite Bretonne, donc, puisqu’après Montpellier, l’international espagnol n’a pas hésité longtemps pour rejoindre le RV35 : « J’ai un peu triché, je l’avoue, je savais qui allait venir et quel projet était en route. Et quand on m’a donné les noms, je n’ai pas hésité » concède-t-il, amusé.
L’avenir ? Début février, il est trop tôt pour se positionner, même si le numéro 7 a sa petite idée : « Moi, j’aimerais rester ici, on se sent bien avec ma petite famille et nous avons été très bien accueillis. De plus, l’équipe joue bien, nous avons de bons moments à venir. ». En sélection, stop ou encore ? « Je suis à la disposition du sélectionneur, j’y suis revenu il y a peu de temps avec beaucoup de plaisir. Parfois, dans ma carrière, ce n’était pas aussi agréable. Les stages sont long, on ne coupe pas vraiment de notre saison en club, ce n’est pas toujours simple. Mais j’y vais aujourd’hui avec plaisir. Surtout quand nous affrontons le Portugal de Miguel… ». Qui est le plus fort, d’ailleurs, entre les deux nations où évoluent les deux compères rennais ? « Je ne peux pas te dire qui est la meilleure équipe. Je te dirais simplement qu’en décembre dernier, nous les avons battus à deux reprises en deux matches ! ».
Julien Bouguerra