Après vingt ans sous pavillon Olivier Mantès, le navire SGRMH change de capitaine et démarre un nouveau voyage avec Romain Corre à la barre. Avec un projet de jeu différent mais tout autant d’exigence, le nouveau technicien nous livre les clés d’une saison à venir passionnante.
Jamais deux sans trois ! Après deux expériences en pays rennais, au pôle de Cesson comme joueur puis en entraîneur au CPB, te voici au SGRMH. Heureux d’être de retour ?
Sincèrement, oui, j’ai toujours eu de bonnes sensations à Rennes, où je ne suis vraiment pas dépaysé. J’y connais beaucoup du monde et cela facilite clairement la mise en route. De plus, j’arrive dans un club qui travaille très bien, avec des personnes investies et très compétentes, sportivement, commercialement et administrativement.
Structurellement, on se rapproche de ce qui se fait au plus haut niveau, avec cette ambition de progresser d’année en année, de se développer avec des aspects déjà dignes de ce niveau-là. Alors forcément, quand on vous propose de travailler dans un cadre comme celui-ci, il n’y a pas vraiment d’hésitation et tout est réuni pour réussir tous ensemble, staff, dirigeants, salariés, bénévoles, joueuses, supporters et partenaires.
« Aucune fille ne devra déroger aux règles pour rester dans le game »
Ressens-tu une pression au moment de succéder à Olivier Mantès, présent vingt ans de suite au club ?
Une pression, non, car tout s’est fait assez naturellement. En cela, je tiens à remercier Olivier, qui a tout fait pour que la transition se passe le mieux possible. C’est lui qui m’a contacté alors qu’il envisageait d’arrêter. Il m’a donné beaucoup d’informations pour évaluer les actions à établir, me présenter et détailler au mieux le club, son fonctionnement. Il a été très ouvert dans nos discussions, constructif et m’a beaucoup aiguillé, avec le désir que la suite se passe au mieux.
Il faut le féliciter pour tout ce qu’il a fait au club, qu’il a amené de la N3 à la D2. Chapeau, c’est un grand parcours mais désormais, je ne me pose pas la question d’un héritage ou d’une pression. J’ai simplement la mission d’amener les filles à la meilleure performance possible et au meilleur classement, et d’accompagner la progression du club année après année. Je ne me pose pas d’autres questions que celle de construire et tenter de façonner ce groupe, en respectant le club et son ADN.

Comment as-tu composé ce nouveau groupe à distance ?
A partir du moment où nous nous sommes entendus avec Jean-Luc Bosse, le président, nous avons travaillé de concert avec l’ensemble des composantes du club pour concevoir un effectif le plus complémentaire possible. J’ai revisionné l’intégralité des matchs des filles sur les deux dernières saisons, afin de me faire l’idée la plus précise possible des capacités de chacune. Ensuite, il a fallu faire des choix, pas toujours évidents.
J’ai fonctionné par associations, au fur et à mesure, sur un poste, puis sur deux postes qui doivent fonctionner ensemble et c’est pour cela que les décisions ont pris plus de temps pour certaines filles que pour d’autres. Le fait de ne pas les connaître m’a fait me concentrer sur les critères handball avant tout, même si l’on m’a bien sûr rapporté également toute la partie humaine. Aujourd’hui, l’intégralité de l’effectif à disposition est un effectif que j’ai choisi.
Sur quels critères ?
Il y a bien sûr un projet de jeu, avec ses fondamentaux. L’idée est de les ajouter aux acquis d’ici, avec notamment une forte culture défensive, éprouvée l’an passé, qui doit être dans la base de ce que nous allons proposer. Il faut s’appuyer sur ce qui fonctionne puis construire ensuite avec les spécificités et appétences de chacune, en étant à l’écoute.
Les complémentarités seront importantes mais après, il y a des principes de jeu auxquels aucune fille ne devra déroger pour être « dans le game », comme un repli défensif en sprintant, par exemple. Je veux aussi que nous montions rapidement les ballons, il faut du combat, de la vitesse. Cela contribue évidemment au spectacle sans pour autant affaiblir la performance, mais demande un gros investissement.
Es-tu partisan du management participatif ?
On sera, avec le staff, toujours à l’écoute et en concertation avec les joueuses. On construit ensemble. Sur l’esprit, je ne suis pas un coach qui néglige la défense, loin de là, mais j’aime aussi que l’on propose un maximum d’intensité et de rythme, ce qui sous-entend aussi de subir plus d’attaques.
Après, s’il faut casser le rythme pour garder un résultat à un moment donné, nous n’hésiterons pas à le faire mais la clé sera d’être protagoniste des matchs, de leur tempo, avec un maximum de polyvalence entre les filles pour pouvoir surprendre et varier. A chacune d’apporter son application du projet puis sa plus-value par son profil propre.

Comptes-tu t’appuyer sur les filles déjà présentes l’an passé pour bâtir le socle de ton équipe ?
Les filles déjà présentes permettent forcément de transmettre les valeurs, l’ADN du club mais elles seront à la lutte comme les autres pour gagner leur place. Il y a beaucoup de changement, c’est vrai, mais à y regarder de plus près, il reste quand même sur chaque « sept » sur le terrain, une moitié de filles ou presque déjà là auparavant, auxquelles on peut ajouter Claire Scheid, qui revient et connaît parfaitement le club.
On dit ton groupe très jeune. Cela induit-il d’office qu’il faudra être patient avec ton équipe ?
En termes d’âge, je ne suis pas trop d’accord, je trouve notre groupe plutôt équilibré. Claire, Eden et Sarah ont entre 26 et 28 ans, elles seront forcément des leaders mais Lalie et Milica également, qui ont 25 ans. Il y a ensuite un groupe de 5 à 6 filles entre 20 et 23 ans puis nos jeunes de moins de 20 ans qui vont apporter et jouer un vrai rôle dans le groupe. Cela amène une saine émulation.
Comment juges-tu ce groupe à l’issue de la préparation ?
Nous l’avons démarrée assez tôt afin de permettre au groupe de se découvrir, d’apprendre à vivre ensemble. Il faut créer les associations sur le terrain, et nous y travaillons, avec un maximum de diversité et de polyvalence mais aussi construire une assise, avec le respect de fondamentaux de jeu. J’ai la sensation que les filles vivent bien ensemble et sont investies, avec autour d’elles, un staff et un club qui bosse vraiment bien. Nous avons hâte de démarrer !

« Je suis convaincu que tous les ingrédients sont réunis pour réussir »
Un mot justement, sur la division, secouée de toutes parts par les problèmes financiers et les ambitions portées par le club cette saison ?
Pour ce qui est du volet financier, je me garderai bien de commenter ce qui se passe dans les autres clubs. Je constate qu’il est de plus en plus difficile pour beaucoup d’exister au haut niveau, financièrement notamment, et qu’une division 2 à dix équipes pour le moment ne peut pas être une bonne nouvelle… En revanche, avec le staff, nous nous focalisons sur le sportif et nous avons démarré l’analyse de l’ensemble de nos adversaires. J’en connais pas mal mais pas tous et la D2F est un niveau que je vais découvrir.
L’avoir étudié en vidéo ne vaut pas de le vivre… Alors difficile, forcément, entre le contexte global et la découverte de notre groupe, de nous situer. Ce que je sais, c’est que nous aurons des arguments à faire valoir et que mon ambition sera de jouer, avec pour conséquence, je l’espère, de gagner. Et les victoires nous amèneront à ce que nous méritons… Sur le papier, le maintien est évidemment l’objectif mais nous devons être ambitieux dans le jeu et le spectacle proposé à nos supporters et partenaires, qui voudront, au-delà des points ou un classement, du partage et de l’émotion.
Un mot sur le public et l’environnement de la Ricoquais que tu vas découvrir comme coach du SGRMH ?
Il y a des supporters fidèles, bruyants, qui viennent en nombre pour faire de la Ricoq’ une des plus belles ambiances du championnat. J’ai hâte de vivre ces matchs-là sur le banc, d’en profiter, de partager. Les partenaires aussi, seront au cœur du projet, sont là, fidèles et primordiaux.
Je dis souvent que c’est à nous de récompenser tout le monde par des victoires oui, mais aussi et surtout un investissement total, un combat de tous les instants et beaucoup d’intensité. Le résultat renforce le lien mais c’est tous ensemble que nous allons tâcher de vivre une belle saison, où il faudra se faire moins peur que l’an passé pour continuer la progression du club sur le court et sur le moyen terme. Je suis convaincu que tous les ingrédients sont réunis.
