JRS 71 – SRFC : Le mois des bonnes résolutions

Un classement très décevant, pourtant en trompe l’œil, des problématiques à la pelle, un mercato à réussir et une série à enchaîner au plus vite. Difficile d’imaginer que les fêtes aient pu être reposantes pour les dirigeants et le staff du stade rennais aujourd’hui au travail devant un chantier colossal, aux enjeux majeurs.

Sans doute savait-il le dérapage trop entamé pour être contrôlé, préférant laisser la place pour éviter de porter la responsabilité d’un inévitable accident aux conséquences catastrophiques. Reste à savoir si l’enjeu était son crédit personnel, au zénith après un titre de meilleur entraîneur de Ligue 1 obtenu à Rennes, ou la survie d’un projet, construit avec Florian Maurice et Olivier Cloarec, restés en place. Peut-être un peu des deux, toujours est-il que Bruno Genesio a quitté un navire à la dérive sur sa petite barque, laissant derrière lui un sacré chantier. Julien Stéphan, parti lui aussi de son propre chef en 2021, faute de ressort et de solution à l’époque, doit désormais aussi composer avec un groupe mentalement touché, techniquement et tactiquement perdu alors que plutôt bien équipé.

Laver les têtes, remettre tout le monde dans le projet collectif, si tant est que celui-ci ne soit pas aussi à repenser, puis colmater les avaries que la dernière victoire face à Clermont n’a certainement pas fait oublier, le Capitaine Stéphan a du boulot, pour son retour aux affaires, pour redresser la barre ! Pour ce faire, il ne pourra œuvrer seul et Florian Maurice n’aura pas le droit à l’erreur, ni même aux paris d’avenir. L’urgence, c’est maintenant, pour un club aujourd’hui englué à la dixième place, plus proche de la zone rouge que du quai d’embarquement pour une septième année européenne. Comme annoncé par les dirigeants eux-mêmes, en quête de « deux à cinq joueurs » lors de ce mercato d’hiver, l’équipe bretonne doit être totalement rééquilibrée et repenser, entre expérience et jeunesse, percussion et gestion du tempo.

La taxe « SRFC » risque d’être élevée du côté des clubs vendeurs

Disposant d’un vrai trésor de guerre avec les ventes réalisées l’été dernier, notamment celle de Jérémy Doku, le Stade Rennais va devoir pourtant être malin et habile, mais aussi ferme. Dans un marché aussi particulier et difficile que celui de janvier, pas de pitié pour ceux qui sont dans le besoin. La taxe « SRFC » risque d’être élevée du côté de clubs vendeurs qui savent les « Rouge et Noir » obligés d’investir et pourraient ainsi adapter leurs tarifs en conséquence, surtout s’ils ne sont pas dans l’obligation impérieuse de vendre dès cet hiver. Au directeur sportif rennais de briller, de faire taire des critiques sur lesquelles il ne souhaite pas s’arrêter, comme l’avait démontré son entretien avec Xavier Grimault sur RMC Sport, avec le refus d’évoquer un quelconque mea-culpa. Être dixième à mi-saison avec seulement quatre victoires en 17 matchs de Ligue 1 se jouet-il seulement à quelques détails, à une erreur d’arbitrage ou un poteau ? Non. Cette analyse n’est pas recevable et les manques de résultats traduisent inévitablement le manque de bons choix et de bonne construction dès l’été.

L’analyse des joueurs est elle aussi très pernicieuse. A force de répéter que « le groupe est pétri de qualités », « qu’une simple série suffira à tout relancer » et que ça va tourner ou ça se joue à des détails ou que le doute n’existe pas, celui-ci s’invite clairement à la table d’une lucidité semblant défaillante. Si les qualités intrinsèques des garçons composant l’effectif n’est pas remise en cause, ils sont bien trop nombreux à sous-performer, à être loin, très loin du niveau escompté ou d’avoir fait tout ce que l’on pouvait attendre d’eux. La défense manque de maturité et d’expérience. Dire qu’elle a terminé troisième l’an passé et qu’elle n’est pas devenue mauvaise du jour au lendemain, c’est aussi réduire à néant l’influence d’Hamari Traoré et Birger Meling, aujourd’hui partis et hier capitaux dans ce fameux équilibre tant prisé à présent. Ne parler pourtant que de ce secteur de jeu est une grave erreur car le bât blesse sur bien d’autres domaines également. Le milieu de terrain n’a plus ni Flavien Tait, ni Lovro Majer. L’énergie et la capacité à enclencher les transitions de l’un et la créativité et la technique du second manquent cruellement. Ni Enzo Le Fée, ni Nemanja Matic n’ont pour le moment comblé le vide laissé, encore moins Fabian Rieder, dont les premières titularisations enchaînées sont toujours attendues. Ces trois-là ne manquent pas de qualités, à l’évidence, mais sont-elles adaptées au système alors voulu par Bruno Genesio ? Non.

Nemanja Matic, joueur de temporisation et d’orientation, possède une vision du jeu au-dessus de la moyenne, a besoin de mouvement et de relais autour de lui pour donner sa pleine mesure. Par intermittence, l’association avec Enzo Le Fée a été séduisante mais finalement trop peu en cinq mois de compétition. Pour l’ancien Lorientais, il existe un poids de transfert à digérer, une adaptation à un jeu différent de celui demandé à Lorient sur la transition rapide à assimiler. Ou un système tout court à réinventer, où Benjamin Bourigeaud, le nouveau capitaine, a été baladé du centre à droite, en pensant par la gauche, en ne retrouvant jamais son meilleur niveau, ni sa meilleure partition.

Dans ce tableau un peu trop sombre à notre goût, l’attaque ne va pas mieux. Orphelin du détonateur Jérémy Doku parti fin août à Manchester City mais aussi de l’efficacité de Martin Terrier, bien qu’en progrès au fil des semaines, depuis janvier 2023 et sa lourde blessure du genou, le secteur offensif rennais est en berne. Malgré les qualités évidentes sur le papier des Terrier, Kalimuendo, Gouiri, Blas ou encore des espoirs Ibrahim Salah, Bertug Yildirim et Désiré Doué, les chiffres ne mentent pas. Il y a un train de retard en termes d’efficacité, que ce soit sur les buts inscrits comme sur les passes décisives. Le problème, insoluble pour Bruno Genesio, reste entier pour Julien Stéphan qui va devoir trouver la bonne articulation et les bonnes associations pour redonner d’abord de l’efficacité, ensuite du panache et du sourire à une attaque en berne. 3-5-2, 3-4-3 ou tout ce que vous voudrez, il faut retrouver l’envie de faire mal, de trouver les solutions collectivement et avancer.

Après le Roudourou, Nice et Lyon pour se relancer

Pour ce faire, du renfort, sans doute, peut-être des départs mais surtout, des résultats. D’abord à Guingamp, en 32èmes de finale de coupe de France, où la victoire est la seule option. Dans la saison qu’il vit, le Stade Rennais n’a aucunement le droit à l’impasse sur une compétition pouvant amener un peu de baume au cœur à ses supporters. Surtout au Roudourou… Viendra ensuite le retour de la Ligue 1, avec l’ennuyeux et presque invaincu Nice à la maison, pas loin d’un an presque jour pour jour après la terrible blessure de Martin Terrier, point de départ d’une année compliquée, puis un déplacement à Lyon, pour un match qui vaudra très cher. Un Groupama Stadium où Julien Stéphan sait triompher, comme pour sa première sur le banc rennais ou en demi-finale de coupe de France. Jamais deux sans trois.

Place ensuite à un potentiel seizième de finale, le 21 janvier, pour continuer espérons-le de gagner en confiance, si l’éventuel tirage au sort épargne les « Rouge et Noir ». Ceux-ci ne l’ont guère été depuis le début de saison, entre les erreurs individuelles à répétition, le brouillard puis le départ du coach et ensuite, la brume persistante sur les réelles capacités du club à sortir de l’ornière dans laquelle il est englué. Janvier est le mois des résolutions parait-il mais place à l’action, au jeu, plus qu’aux mots aujourd’hui insuffisants face aux maux ressentis depuis août. Sur et en dehors du terrain, la saison se joue dès maintenant, sans joker et avec l’objectif de renouer avec l’ambition. Un sacré programme pour commencer à répondre aux questions aujourd’hui sans réponse dans une année 2024 que l’on espère moins agitée et plus souriante que celle venant de s’achever.