Dans la dynamique d’un très bon début de saison, le manager général d’Arkea Samsic, classée 2ème fin mars et en bonne position pour son objectif d’intégrer le circuit World Tour, affiche ambition, enthousiasme et sérénité, tout en demandant patience et raison, pour viser toujours plus haut.
La saison a démarré tambour battant pour votre équipe avec plusieurs grosses performances, notamment de Nairo Quintana. Quelles sont les ambitions pour la suite ?
Intégrer par nos résultats sportifs l’UCI WorldTour reste le fil un conducteur qui nous guide, notamment sur les stratégies. Mais la priorité demeure de gagner des courses, quelles qu’elles soient. Ce sont elles qui rapportent les points mais qui, surtout, insufflent la dynamique et nourrissent l’esprit de compétition. Nairo est en forme, performe déjà, tout comme Warren et Nacer, mais ils ne sont pas les seuls. C’est toute notre équipe qui démarre très bien la saison.
Il n’y a pas de courses de second plan lorsque l’on nourrit les ambitions qui sont les vôtres ?
Non. En tous cas, ce n’est pas notre vision. Chaque course remportée ou nous apportant des points est à considérer et au-delà d’un classement, c’est aussi un devoir d’être présent pour permettre une belle visibilité, pour les organisateurs, pour nos partenaires Arkéa, Samsic et tous ceux qui nous soutiennent. A partir du moment où nous nous engageons, nous voulons performer !
Après tant d’années sur le circuit, gardez-vous à titre personnel une motivation intacte ?
A partir du moment où mon poste fait que je porte et représente une structure, c’est que je suis à 100 %. Les années avancent, oui, mais le plaisir et l’envie sont toujours là. Je ne suis pas du genre à insister quand je n’ai plus la motivation, mais c’est loin d’être mon cas. Je suis environ 220 jours par an loin de chez moi, et le reste de mon temps, on me parle encore de vélo ! Pas une journée sans aborder ce thème. On ne peut pas vivre cela sans rester impliqué et motivé à fond, même s’il est important également de garder un bon équilibre entre vie pro et vie privée. Après, quand les résultats, comme en ce début de saison, sont là, c’est tout de suite plus facile. Cela donne la direction et j’aime l’idée de penser qu’il faut toujours oser pour aller plus haut.
Cette année, l’équipe participera à deux des trois grands tours, la Vuelta et le Tour de France. Quelles y seront les ambitions ?
Nous avons renoncé au Giro mais nous irons sur ce Grand Tour quand il sera l’heure, c’est une certitude. Pour le moment, nous ne sommes pas encore préparés pour faire les trois grands Tours, il faut avancer marche par marche. Cette manière de faire nous a plutôt réussi pour le moment. Sur ces courses, nous sommes dans la réflexion, sur la tactique à adopter. Nous viserons bien sûr un maximum de points, avant tout. Quand une victoire d’étape sur le Tour de Bretagne rapporte 40 points, un vainqueur sur le Tour de France en gagne 1000… Cela donne le delta entre les compétitions et leur impact sur le classement, ce sont des points très importants dans la progression sur la saison. Nous viserons des étapes, bien sûr et pourquoi pas de belles performances au général. Après, nous sommes nombreux à nourrir cette ambition, et il faut savoir que l’an passé, trois équipes se sont partagées 14 étapes. Il n’en restait que six ou sept pour les autres, ce qui situe le curseur de la performance à réaliser. On pourrait alors parler d’exploit, oui. Un peu comme au football, ce sont souvent les mêmes qui se partagent les victoires et avec les arrivées ces dernières années de garçons comme Pogacar ou Roglic sur le circuit, il y a là du très lourd, et encore moins de places à prendre sur les podiums…
Sur la Vuelta, la donne est la même ?
Soit on y va avec un bon matelas de points suite au Tour de France notamment, on pourra attaquer plein gaz, ou sinon il faudra être plus stratège et marquer un maximum de points. Il s’agira d’exploiter au mieux nos possibilités avec les coureurs et nos compétences techniques et tactiques autour du staff. Les résultats sur les deux grands Tours vont conditionner les ambitions, forcément.
L’identité bretonne d’Arkea-Samsic est-elle toujours au cœur de vos prérogatives ?
Bien sûr. Nous essayons de créer une osmose, une âme autour de notre attachement au territoire. Aujourd’hui, Arkea Samsic, c’est près de 100 salariés, une très grande équipe toujours portée vers la performance et la solidarité. Nous sommes en pleine progression mais il est impératif de se rappeler d’où l’on vient pour savoir où l’on va. Nous mettons tous les ingrédients pour grandir et aujourd’hui, nous sommes un « petit » chez les grands mais cela ne nous empêche pas de performer, comme en témoigne la deuxième place que nous occupons au classement mondial, la 5e sur Paris-Nice, la 4e au Tour de Catalogne obtenus par Nairo Quintana. Les victoires de Amaury Capiot, Warren Barguil et Nacer Bouhanni. La preuve que l’on peut réussir sans avoir le plus gros budget. Il ne faut pas être plus royaliste que le roi et garder cette identité bretonne en repère. C’est aussi une force pour avancer. Un phare ! En tant que dirigeant, je suis très fier de ce que nous avons créé mais aussi de l’apport de tous mes salariés, de leur travail et leur investissement. Ces belles performances, c’est aussi la récompense de leurs efforts, de leurs compétences. Je suis aussi très optimiste par rapport ce que l’on compte réussir à l’avenir.
Au niveau des leaders, qu’en est-il de l’avenir de Warren Barguil, Nairo Quintana et Nacer Bouhanni ?
Warren va de mieux en mieux comme le montre ses dernières performances (ndlr : il a remporté le 11 mars la 5e étape du Tierreno-Adriatic), il faut se rappeler qu’une chute lui a fait très mal l’an passé. Ne l’oublions pas, dans ce métier, la première carrosserie, c’est la peau ! L’envie de continuer ensemble est réciproque et nous discutons pour prolonger l’aventure, avec des ambitions communes. Pour Nairo, les discussions n’ont pas encore commencé, car lui préfére pour le moment être focus sur ses performances, très intéressantes en ce début de saison. Rien n’est impossible pour la suite. Nacer, lui, a encore un an de contrat.
Un mot sur l’équipe féminine, en plein développement ?
Nous essayons de transposer ce que nous avons fait avec les garçons, en structurant l’équipe étage par étage. Matériel, encadrement, structure du groupe puis le calendrier de courses. Il faut établir toute une stabilité, mettre les fondations pour ensuite performer. Le projet progresse et monte en régime et je suis persuadé que celles qui sont parties ont eu tort. Nous visons la performance sur la durée.
L’avenir passe aussi par les partenariats et la formation…
Sur la partie partenariats, nous continuons de travailler et de développer notre structure, en essayant de proposer une expérience la plus intéressante. Le fait d’avoir deux grosses entités bretonnes au rayonnement mondial pour Samsic et national pour Arkea, est un atout très important, qui permet de marquer notre identité territoriale tout en permettant d’offrir une vraie pérennité au projet. UCI WorldTour ou non, nous sommes la première équipe bretonne et cela est déjà une très belle performance, que nous voulons améliorer d’année en année. Pour la partie formation, nous travaillons sur un rayon d’action très large, en repérant et faisant passer des tests partout dans le monde. Nous avons fait le choix de ne pas créer de club réserve mais plutôt de laisser grandir les meilleurs jeunes dans les clubs locaux. Si notre «image » peut bénéficier au cyclisme local, c’est un juste retour des choses et c’est notre apport à l’échelle bretonne. On n’est pas qu’une vitrine du vélo breton mais aussi une locomotive, qui doit entraîner les autres avec elle et aider à progresser, des coureurs aux techniciens. Notre identité locale, c’est aussi cela et j’y tiens !