Sur la route d’un après-midi plongée sous-marine à Saint-Briac, Pierre Algans nous a offert de son temps, répondant avec franchise : l’avenir, les doutes, les blessures mais aussi l’ambition et la Bretagne, pas de tabous ! Avant d’enfiler le maillot et de piquer une tête, heureux comme un poisson dans les eaux bretonnes !
Le REC, avec les phases finales, entre dans le money-time. Comment te sens-tu avant ces rencontres couperet ?
Très bien. Nous avons bossé dur pour vivre cela, arriver en force sur ce mois d’avril avec notre objectif toujours en tête de livrer tous les combats à fond pour essayer d’atteindre la finale et donc, la Nationale Une. L’objectif Nationale 2 est validé, c’est déjà une très bonne chose pour le club qu’il faudra savourer en temps et en heure, le club n’ayant jamais évolué aussi haut. Mais pour le moment, nous restons focus sur la compétition et les matchs à venir, avec cette envie d’encore plus.
Tout ne fut pas rose cette saison, avec quelques ratés. Est-ce une chance au moment d’aborder ces Play-offs ?
Peut-être. Cela évitera de se relâcher, de se voir trop beaux. Cette saison, nous avons eu de vrais loupés, comme face à Limoges ou à Langon par exemple, où nous avions été punis à partir du moment où nous ne mettions pas les ingrédients. A Saint-Denis également, ce ne fut pas brillant, même si nous avons gagné. Tout cela a permis de montrer et de mettre en évidence certaines faiblesses. A nous d’être vigilants sur les phases finales.
Tu arrives en fin de contrat à Rennes, ton avenir est-il bouclé ou encore incertain ?
Je peux vous annoncer que je serai rennais pour les deux saisons à venir. J’ai prolongé l’aventure ici car je crois au projet du club, je sais qu’il est ambitieux sur le terrain mais aussi sur la partie développement du club. J’ai vu les documents, les projets et j’ai envie de continuer l’aventure ici, même si j’ai reçu plusieurs sollicitations dont celle de Périgueux. Il y a encore à faire ici et je n’oublierai jamais, non plus, la main qui m’a été tendue quand je suis arrivé. Il faut savoir se souvenir, être reconnaissant. Quand ça n’allait pas, le club a cru en moi. Je voulais arrêter le rugby avant d’arriver à Rennes…
Arrêter ? A ce point-là ?
Oui. La seconde saison que j’ai vécue à Aurillac m’avait atteinte moralement, j’étais dégouté. Nous évoluions en Pro D2 et j’ai été blacklisté. La première saison, en arrivant de Narbonne où j’avais quelques feuilles de Pro D2, je joue directement avec les pros, participe à beaucoup de matchs. En fin de saison, après une rencontre face à Nevers, peut-être la meilleure disputée de ma carrière, je rentre avec de grosses douleurs dans le dos. Je laisse filer un jour, deux jours puis finis par aller à l’hôpital. Là-bas, on m’explique que mes reins ne fonctionnent plus et que j’ai de l’eau dans les poumons. J’ai passé une semaine en réa, j’ai été guéri mais aujourd’hui encore, personne ne sait ce qui m’est arrivé… Je suis sorti en toute petite forme, physiquement comme mentalement. J’ai perdu près de dix kilos et l’envie de jouer au rugby. Il a fallu lutter pour revenir… Une fois de retour et opérationnel, sans explication, le staff, le même qui m’avait permis de m’éclater, m’a totalement mis de côté. Je n’étais plus dans les plans. A la fin de saison, je voulais tout arrêter. Ensuite, par le biais notamment de Romuald François, que j’avais bien connu à Narbonne, comme Téo Gazin, les contacts se sont noués avec Rennes et Kévin Courties a su trouver les mots pour me convaincre. J’ai retrouvé l’envie, l’ambition rugby et j’ai choisi de rejoindre la Bretagne.
L’aventure a démarré difficilement, en année « Covid » mais pas que…
En octobre, au bout de quatre matchs, et quatre victoires, la saison s’est arrêtée à cause de la pandémie mais elle s’arrêtait quoi qu’il arrive pour moi, puisque les ligaments croisés de mon genou gauche ont lâché sur un mauvais appui, à Marcq en Bareuil. Tout s’est alors écroulé, alors que j’avais réalisé une bonne préparation, et que j’avais vécu une adaptation idéale dans ce groupe. Heureusement, tout le monde a été au top avec moi, du kiné Romain Le Flem à Mathieu Machefert, avec qui j’ai fait ma rééducation chez Vivalto Sport. Yoann m’a ensuite remis en route pour la compétition et j’étais prêt. Vous en connaissez beaucoup des joueurs qui se sont fait les croisés et n’ont pas raté un seul match de championnat ? (rires).
L’idée d’arrêter tout est-elle revenue ?
Non, pas cette fois-ci. J’ai repris l’été dernier, libéré et de nouveau mais… toujours en octobre, le genou, le droit cette fois-ci, lâche, avec les mêmes sensations, cette fois-ci contre Chartres, au même moment du match après 5 minutes… Je me suis allongé et là, clairement, je me suis dit cette fois, c’est terminé, stop ! Je connaissais le chemin, les efforts à faire et quelle claque, « ouahou ». Patrice, notre médecin, m’a immédiatement dit que ce n’était pas les ligaments antérieurs mais postérieurs. Celui-ci ne « pète » que très rarement mais nécessite aussi moins de temps de réparation et de rééducation. Au début, je ne l’ai pas cru puis les radios ont confirmé le diagnostic. J’avais mal mais j’étais rassuré. Trois mois plus tard, je suis revenu fin janvier contre Marcq. Depuis, je suis enfin tranquille, je n’ai plus d’appréhension et j’ai retrouvé mes sensations. Contre Beauvais, j’ai enfin cessé de me straper et j’ai réalisé que tout allait bien, pour de bon. J’espère avoir laissé tout ça derrière pour de bon… J’ai par contre prévenu le staff que je ne jouerai pas en octobre prochain (rires) ! Si il y a une autre grosse blessure, peut-être retournerai-je dans le sud, à la maison, retaper des maisons et aller à la pêche avec mon père et faire les boutiques avec ma mère. Mes proches me manquent souvent mais je sais aussi pourquoi je suis venu ici et je compte bien aller le plus haut possible avec le REC.
Quel type de coéquipier es-tu ?
Je suis une grande gueule, je râle souvent, beaucoup trop même. Je le sais bien, je peux vite m’énerver mais ce n’est pas contre les mecs, je suis comme ça. Après, je suis aussi toujours le premier pour aider ou donner un coup de main, être positif. Sur le terrain, je suis concentré, même si je ne me prive jamais d’allumer un peu verbalement quand c’est nécessaire !
En dehors du rugby, quels sont tes petits plaisirs bretons ?
La gastronomie est top, j’ai découvert et adopté le Kouign-Amann, les galettes saucisses et tout ce qui est en rapport avec la mer. J’adore manger, surtout ce que la nature a de meilleur à nous offrir. Une fois que j’ai mangé, j’adore les balades, partir en chasse sous-marine, faire de la plongée et les autres sports. Quand je le peux, je vais voir Cesson, au handball, ou le volley par exemple. Bon, j’avoue, le basket, je n’aime pas car j’y suis archi nul ! Le foot ? A petite dose. Et en top 14, mon club reste Castres.
La coupe du monde dans un an, est-elle promise au XV de France ?
C’est une compétition difficile, impossible d’être affirmatif mais il y a vraiment une énorme génération. J’en ai connu pas mal au Stade Toulousain, en équipe jeunes, et franchement, leur parcours est admirable mais ce n’est pas une surprise. Antoine Dupont ? Alors lui… Je l’ai affronté en UNSS alors qu’il était à Auch et déjà, on se disait “mais c’est quoi ce joueur…” Il était incroyable… et l’est encore plus aujourd’hui. J’espère sincèrement que ces mecs seront champions du monde, ils en ont l’étoffe !