Birger Meling, arrivé cet été, a rapidement mis tout le monde d’accord. Rapport qualité/prix, florian maurice a peut-être réussi son plus beau coup de l’été. Adoré des supporters, la réussite de «biggy» n’a pour autant pas été faite d’évidences, loin de là. Entre désillusion et revanche sur la vie, le parcours du norvégien détonne.
« Arrêtez ce p… de nain ! » Voilà ce que pouvait entendre l’adolescent comme consignes adverses sur les pelouses norvégiennes de son enfance, comme nous le confie son père, néanmoins gentiment tenu au silence par un fiston préférant laisser la famille tranquille à l’abri de nos questions. Alors en U16, Birger Meling dénote par sa petite taille. Comme dans beaucoup de centres de formation, les standards physiques sont élevés et les 40 kilos pour 1 mètre 36 du néo-Rennais ne font ni le poids, ni l’unanimité. Vu les qualités actuelles du Scandinave, voilà qui donne à réfléchir sur la notion de bio-banding ! Késako ? Ils’agit de la création de groupes d’entraînements chez les jeunes en fonction de leur âge biologique et non chronologique. Beaucoup de jeunes sportifs n’ont pas eu la carrière qu’ils auraient pu (dû ?) avoir à cause d’un développement physique tardif. Biggy aurait pu faire partie de ceux-là. Passé de milieu de terrain à latéral gauche bien que techniquement au-dessus du lot, son club formateur de Stavanger ne le conserve pas. Une grande déception pour celui qui veut devenir footballeur professionnel, mais qui continue malgré tout à s’entraîner avec l’aide de son père.
Il faut attendre un voyage scolaire en Angleterre et un match de foot contre les U18 des Wolves pour voir renaître l’espoir. Remarqué par le club de Middlesbrough, Birger Meling quitte le sud-est de sa Norvège natale et rejoint Boro. Pas pour la Premier League mais pour le centre de formation. Une première étape qui n’en amènera pas de seconde au sein du club anglais. Après un an, le Norvégien rentre au bercail, non conservé dans un club fleurant bon le jeu léché et la poésie à l’anglaise. A 18 ans, le latéral gauche a déjà vu son mental être mis à rude épreuve mais sa combativité et sa détermination s’affirment et vont l’élever. En contactant directement le directeur sportif de Stabæk, il force son destin et transforme l’essai devant les yeux du coach de l’équipe première, un certain Bob Bradley, passé par la sélection américaine mais aussi par Le Havre. S’il joue peu la première année en professionnel, Birger Meling glane sa place de titulaire en 2015 et connait sa première sélection chez les Espoirs. Sa troisième saison sous les couleurs de Stabæk se conclut par 4 buts et 3 passes décisives qui attirent le plus grand club du pays, Rosenborg.
S’ensuit un titre de champion de Norvège, une dizaine de passes décisives, des participations à Ligue des Champions et à l’Europa League et enfin le graal, les premières sélections en équipe A de Norvège. A tous ceux qui n’ont pas cru en lui, Birger Meling a répondu et pris sa revanche. Après plus d’une centaine de matchs sous le maillot de Rosenborg, nouvel exil au programme après avoir tapé dans l’œil du directeur sportif nîmois, Reda Hammache et de l’entraîneur de l’époque Jérôme Arpinon : « Je recherchais un arrière gauche. Reda m’avait fait visionner plusieurs vidéos de joueurs, j’en avais sélectionné deux, dont Biggy. J’avais dit, « si on peut l’avoir lui, on le prend ! » Priorité du coach gardois avec le milieu Andrés Cubas, Birger Meling est convaincu et signe pour une première expérience en professionnel à l’étranger, au Nîmes Olympique, le 10 juin Une première très remarquée par les observateurs de la Ligue 1 avec un but et une passe décisive en 90 minutes face à Brest ! Sur ce premier match de la saison, remporté par Nîmes (4-0), son volume de jeu comme la variété de ses déplacements avaient complétement anéanti la défense brestoise. « Les déplacements intérieurs, il le faisait déjà un peu à Rosenborg mais on l’avait aussi travaillé à l’entraînement. Son profil était très complémentaire de Romain Philippoteaux qui lui est droitier et donc, capable aussi de rentrer sur son bon pied. En plus, Biggy peut jouer le long de la ligne et amener de la profondeur », rembobine Jérôme Arpinon. Autant de raisons pour les supporters nîmois de l’adopter fissa. Si les performances comptent, l’homme marque aussi les esprits. Sa bouille enfantine transpire la gentillesse quand son français est déjà bien rôdé après seulement un mois dans l’Hexagone. Blessé fin octobre, il rate pratiquement trois mois de compétition et reste impuissant devant la descente aux enfers des Crocos, qui ne gagnent qu’un match pendant cette période.
Jérôme Arpinon est limogé début février mais le latéral n’oubliera pas pour autant son premier coach en France : « Biggy m’a envoyé un message pour me remercier. C’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup et je suis toujours ses matchs. » Nîmes est relégué en fin de saison et le latéral gauche décide de poursuivre sa carrière le long de la Vilaine, proposé qu’il fut à Florian Maurice, vite séduit par son profil. Son coach puis les supporters rennais emboitent le pas grâce à des prestations impeccables sur le terrain ! Dans un français impeccable, sa présentation en conférence de presse charme le microcosme local, la réciproque prévalant tout autant : « Tout le monde est tellement gentil ici ». Apprécié sur et en dehors du terrain, Birger Meling met tout le monde d’accord : « C’est un garçon qui est très professionnel et qui amène de l’exemplarité dans tout ce qu’il fait. Il est très à l’écoute et son intelligence fait qu’il est dans une progression constante. Il se fixe des objectifs et il arrive à les atteindre petit à petit. Aujourd’hui, au SRFC, il est dans une équipe qui performe et dans un bon club de Ligue 1. Qu’il continue de progresser, je ne demande que ça ! », se réjouit Jérôme Arpinon. Avec le départ de Faitout Maouassa, Birger Meling, devant Adrien Truffert à ce jour dans la hiérarchie, performe.
Capable de répéter les efforts, son apport offensif mêlé à une belle qualité de passes et de centres en font un atout indéniable au sein de l’équipe rennaise alors qu’il comptabilise deux passes décisives pour le moment. A dépeindre toutes ses qualités, quelles sont donc ses failles ? Le domaine aérien est concerné même si sa bonne lecture du jeu lui permet malgré tout d’être généralement bien placé contre son vis-à-vis direct. Cependant, l’axe principal de sa progression n’est peut-être pas individuel.
Jérôme Arpinon précise : « Il fait tout pour améliorer ses coéquipiers présents dans sa zone, l’ailier et le défenseur central, pour que les performances de tous soient au-dessus. Dans son jeu offensif, il est très important mais il faut réussir à trouver une complémentarité avec lui. » Celle-ci, pour le moment, ne saute pas aux yeux avec Kamaldeen Sulemana. Explosif, déroutant et excellent dribbleur, le Ghanéen oublie encore trop souvent son partenaire lors des mouvements en triangle. Il n’est pas rare de voir un « une-deux » se transformer en « une-tout court » avec le numéro 10 rennais, préférant la jouer solo, laissant son comparse norvégien multiplier les propositions de dédoublement, sans suite… L’association est à parfaire pour Bruno Genesio qui hérite néanmoins d’un « bon problème », entre le talent offensif de son attaquant ghanéen et la volonté offensive de son latéral. Très porté vers l’avant, Birger Meling est une arme supplémentaire capable de faire des différences, non pas par le dribble mais bien par la passe et le placement. Ajoutez-y son abnégation, vantée par Jérôme Arpinon : « Il ne renonce jamais, c’est un gagnant ! Il ne supporte pas la défaite. On ne dirait pas comme ça, mais c’est un râleur dans le vestiaire, avec du caractère ! Il est bien sur respectueux de ses coéquipiers mais quand il faut dire quelque chose, il le dit. Pour autant, il est adorable, très attachant. C’est très agréable de discuter avec lui et c’est un plaisir d’entrainer un tel joueur. »
Un plaisir aussi de voir le jouer, dans la tradition bretonne des joueurs scandinaves ayant toujours #toutdonner sous les couleurs rennaises, avec, comme pour Kim Källstrom, un incontestable petit plus qui, loin des railleries de l’enfance sur une taille, a déjà fait du « petit Biggy » un joueur ayant tout d’un grand !