De son Morbihan tant aimé, bien qu’il soit en réalité normand, il n’a rien oublié. Il lui aurait impossible d’imaginer au loin un destin vers l’Amérique depuis la pointe de Quiberon mais c’est pourtant bien depuis Miami, en Floride, que Benjamin Briffe, 34 ans, nous a donné de ses nouvelles. Entre basket improvisé, Mondial de Hand et travail sous haute intensité à l’hôpital, sans oublier de jeter un œil aux performances du CRMHB, les Breaking News n’ont pas manqué !
Evoquer les frères Briffe, à Cesson, ce fut longtemps Romain et Benjamin, les premières années D1. Aujourd’hui Mathéo pointe le bout de son nez, à 20 ans. Voilà qui file un bon coup de vieux ?
Au-delà du hand, quand les jumeaux ont fêté leurs 20 ans l’année dernière, oui, ça m’a un peu secoué ! ça passe si vite, surtout quand on est éloignés. Je le vois arriver sur le banc, faire des feuilles en Lidl Starligue, c’est dingue. Il ressemble beaucoup à Romain dans le caractère, la détermination et ce côté bosseur, obstiné. Je lui dis quand même de se ménager, de ne pas y aller trop fort sur le physique, à cet âge-là, il faut faire très attention et ne pas tout miser sur la force physique.
Donnes-tu aussi des conseils à Romain, revenu à Cesson cet été ?
Je pense qu’il se débrouille très bien tout seul. Je suis content de le voir revenir près de la famille et de constater combien il a évolué. C’est devenu un patron, pas de ceux qui gueulent mais plutôt dans l’analyse, le souhait de bien faire jouer les autres. Il a l’air de moins râler aussi (rires) !
Romain serait-il râleur ou doté d’un gros caractère ?
Et bien comment dire… (rires), oui ! Il a toujours eu la gagne en lui, c’est un compétiteur né, qui donne tout pour progresser, avec une très grande exigence envers lui-même. Petit, nous jouions pas mal au tennis et je peux vous dire qu’il coutait cher en raquettes ! Quand il perdait trois points d’affilée, il balançait sa raquette dans le filet. Il a un sacré caractère mais s’est assagi avec l’âge. Après, j’avoue que quand nous étions petits, j’aimais bien le faire monter en régime !
Quels souvenirs gardes-tu de ton passage au CRMHB, de 2011 à 2014 ? Pourquoi à l’époque avoir rejoint les Irréductibles ?
La raison est toute simple, nous nous étions promis, avec Romain, si nous en avions un jour l’occasion, de jouer ensemble chez les pros ! Ce fut chose faite pendant trois saisons et j’en garde un souvenir exceptionnel ! Quand cela a pu se faire à Cesson, je n’ai pas hésité une seconde à quitter Toulouse. J’avais déjà croisé David Christmann, coach à l’époque, quand j’étais à Rennes pour mes études de kiné. Je m’entraînais parfois avec les pros. J’ai vécu de supers moments sur et en dehors du terrain à Cesson. Il y avait une vraie belle ambiance dans ce groupe. Je suis toujours de près leurs résultats, encore plus depuis que Romain est revenu. Je trouve que ce qu’ils font cette année est intéressant, ils peuvent poser pas mal de soucis à beaucoup d’équipes mais n’ont pas non plus, avec autant de jeunesse, la marge pour ne pas être à 100 %. Je suis convaincu qu’ils vont se maintenir.
Avais-tu projeté, plus jeune, de faire carrière dans le hand, que tu as finalement quitté relativement tôt (en 2015) et nourris-tu quelques regrets ?
Sincèrement, non aux deux questions ! Gamin, j’ai joué au hand assez tard, je n’avais pas un profil aussi programmé que celui de Romain pour devenir pro. Moi, j’ai surtout eu la chance d’être gaucher (rires) ! Sans cela, pas sûr que j’aurais vécu tout cela. J’abordais cela à la cool, petit, j’avais aussi fait de l’athlétisme, du judo ou de l’aïkido. Une fois au hand, j’ai du pas mal travailler, les coachs m’ont poussé, faire progresser et j’ai démarré à Toulouse, où après avoir fait mes gammes avec la N2, j’ai évolué avec l’équipe Une avant de rejoindre la Bretagne. Ensuite, à Aix, déjà, je sentais que j’avais bientôt bouclé la boucle. D’autres projets étaient déjà dans ma tête…
Dont les Etats-Unis ? Pourquoi ce pays ?
Tout simplement parce que celle qui est devenue ma femme est américaine. Je l’ai rencontré à Toulouse, alors qu’elle faisait ses études et aussi, du handball. Nous étions tous les deux en médecine et au hand et ça a bien accroché ! Au point que nous sommes aujourd’hui mariés avec deux enfants.
Le projet a tout de suite été de partir vivre là-bas ?
Pas immédiatement. Nous avons pris le temps de nous connaître, d’évoluer ici, tranquillement. Et puis, au sortir de mes saisons à Cesson, j’avais envie de tenter l’aventure, de partir aux USA, déjà trois mois, vivre le truc. Elle, était rentrée en 2014, pour poursuivre ses études. Nous nous sommes rejoints, j’ai bien aimé. Au bout des trois mois du visa de tourisme, j’ai dû rentrer et j’ai eu l’opportunité de rebondir à Aix. C’était un bon contrat mais je me suis rapidement blessé à l’épaule. C’était sans doute un signe et je suis reparti en 2015, à New York d’abord, puis ensuite, à partir de 2016, en Floride. J’ai dû passer des équivalences pour travailler là-bas et j’ai démarré mon activité de kiné à partir de 2017.
Parle-t-on français ou anglais chez les Briffe ?
Au départ, c’est elle qui parlait en français, qui apprenait. Elle était d’ailleurs bien meilleure que mois pour parler notre langue que moi en Anglais ! Ensuite, ce fut mon tour de me perfectionner. Aujourd’hui, je suis bilingue et nous parlons en anglais à la maison. Il y a encore un peu de français, pour les enfants et c’est elle qui doit se remettre un peu à niveau dans notre langue ! J’ai même désormais la double nationalité.
Au point d’avoir été retenu pour jouer le mondial de handball en Egypte le mois dernier avant, hélas, de voir la sélection déclarer forfait pour un trop grand nombre de cas de Covid…
Cela restera une très grosse déception. Je me suis toujours entretenu ici, j’ai joué avec l’équipe de New York, participé à quelques tournois. Alors, bien sûr, nous sommes très loin du niveau pratiqué en Europe mais de nombreux joueurs sont expatriés, étaient prêts. C’était une opportunité dingue, qui arrivait là, comme ça… Malheureusement, nous avons eu 18 membres de la délégation d’abord négatifs puis ensuite, au deuxième résultat, positifs. J’en faisais partie, avec quelques symptômes mais rien de bien méchant. Notre participation a été annulée la veille du départ. J’aurais pu retrouver quelques joueurs que j’avais affronté il y a quelques années, ça aurait été génial… Cela restera un vrai regret.
Tu étais prêt à chanter l’hymne américain à tue-tête ? Tu connais les paroles ?
Je connais le début, oui, après j’aurais bougé les lèvres (rires) ! Plus sérieusement, mes enfants sont nés ici, j’ai malgré tout une histoire avec ce pays que je continue de découvrir jours après jours depuis plus de six ans désormais.
Tu vis à Miami Beach, en Floride. Cela nous laisse imaginer une carte postale avec la plage, les surfeurs, des terrains de basket à 3 contre 3. Sommes-nous loin du compte ?
C’est plutôt une très belle ville, c’est clair, le cadre est chouette. En hiver, c’est le top, il fait 25° toute la journée et 20 ° la nuit, c’est très agréable. C’est plus compliqué en été en revanche avec un très fort taux d’humidité. Pour ce qui est de la plage, elles sont immenses, à perte de vue, longue et large, avec beaucoup de monde. J’avoue que côté mer, mon Morbihan me manque, la côte sauvage, Quiberon, Bréhat…
Attention, pas d’entourloupes ! Tu n’es pas breton mais normand, si j’en crois Wikipédia…
Nous sommes nés en Normandie, c’est vrai mais attention, je me considère breton tout de même ! Un américain du Morbihan et puis notre grand-père est de Quimper. Donc non, pas d’entourloupes (rires) !
Validé. Dans notre carte postale, donc, nous évoquions aussi les parties de baskets « sauvages ». Fantasme ou réalité ?
Il est vrai que je me suis pas mal mis au basket ici et non, c’est une réalité. J’ai d’ailleurs été choqué quand je suis arrivé ici. Dans la rue, les gens t’accostent, te parlent de la pluie du beau temps, discutent. C’est à la cool, assez surprenant. Pour le basket, le samedi après-midi ou le dimanche matin, par exemple, il y a des gars qui jouent ici ou là et on arrive, comme ça, en se mettant dans une équipe et c’est parti, même si on ne connait personne. C’est un côté assez sympa de la vie ici. D’autres le sont moins, comme le problème de racisme palpable et beaucoup plus affiché qu’en France entre les différentes ethnies. C’est très marqué ici, parfois décomplexé. Sous Obama, il y avait pourtant du mieux là-dessus.
Il y a aussi le problème du port d’armes. Cela te fait-il parfois peur ?
Sincèrement, je n’ai pas été confronté à des faits divers mais cela existe, bien sûr. Les armes, je n’en ai pas vu tant que ça mais évidemment, ici, tu ne t’énerves pas au volant comme en France, à klaxonner ou insulter rapidement. Tu restes calme, c’est mieux, tu ne sais jamais qui peut sortir de la voiture et avec quoi…
Tu as beaucoup évoqué la famille au cours de notre échange. La distance, à la longue, n’est-elle pas trop dure à supporter ?
Avec la crise sanitaire, c’est sûr que cela complique les choses. Habituellement, la famille vient en hiver et nous revenons deux fois par an. Là, mes parents et mes frères n’ont pas encore vu mon petit dernier, né en novembre, c’est compliqué mais j’espère que la situation va s’améliorer, tout doucement, au fil des mois. Nous nous appelons régulièrement mais j’ai hâte de voir tout le monde.