Au soir de la terrible défaite concédée contre Ivry, Jordan Camarero ne se défile pas. Il honore le rendez-vous pris quelques jours plus tôt. Intègre, souriant malgré les stigmates d’une soirée difficile, l’ailier droit des Irréductibles se livre avec une sincérité totale et rare.
Au soir de cette reprise, ponctuée d’une cinglante défaite contre Ivry, on imagine que le moral a pris un coup ?
Clairement. On a été nuls, archi-mauvais. Nous avons fait de la merde, passez-moi le terme. Nous devrons en tirer les leçons. Contre Paris et Nantes, le résultat et le contenu n’étaient pas admissibles non plus mais il y avait du très lourd en face. Là, Ivry est venu à 13 joueurs, avec un esprit commando. Peut-être avons-nous pensé, inconsciemment, que ça passerait mais c’était une grossière erreur. Après, je ne doute pas que tout le monde aura à cœur d’effacer ce match très vite.
Paradoxalement, tu as eu beaucoup de temps de jeu…
Nous avons perdu et ça va m’empêcher de trouver le sommeil ce soir. Après une victoire, je m’endors rarement avant 2 ou 3 heures du matin. Là, je sais que je ne vais pas dormir beaucoup… Le seul point positif, c’est que je vais pouvoir travailler encore plus dur dès le prochain entraînement. Je vais me focaliser sur ce que je n’ai pas bien fait.
« Aujourd’hui, je ne peux pas être satisfait »
Tu es arrivé à Cesson l’été dernier. Quel bilan tires-tu, près de six mois plus tard ?
J’étais venu avec beaucoup d’ambition, l’envie de montrer beaucoup de choses. Et pour être franc, je ne peux pas être satisfait aujourd’hui. Je n’ai pas réussi à montrer tout ce que je voulais montrer sur le temps de jeu qui m’est accordé. En attaque, Youenn (Cardinal) réussit une très grosse saison. Il mérite son temps de jeu. Il marque beaucoup, il est ultra-efficace. Je m’en veux de ne pas réussir à donner plus en défense car j’ai vraiment envie de tout casser, de m’imposer au poste 2. J’aime cravacher, me défoncer comme un malade en défense et je n’ai pas encore offert le meilleur de moi-même dans ce domaine. J’aime me fixer des challenges, des défis. Pour cette seconde partie de saison, le défi n°1 sera de montrer beaucoup plus.
Comment expliques-tu que tu n’aies pas réussi à le faire pour le moment ?
Il y a beaucoup de concurrence dans notre effectif avec Youenn devant ainsi que Florian (Delecroix) et Mathieu (Salou) sur le poste 2 en défense. À moi de travailler encore plus pour gagner ces minutes de jeu et être efficace quand je suis utilisé. Ceux qui jouent le méritent, incontestablement. Sébastien Leriche est un coach intègre, qui n’a pas d’états d’âme et qui sait nous expliquer ses choix. Les règles du jeu sont claires, c’est à moi de m’imposer. Je vais me « mettre la gueule par terre », être encore plus agressif en défense, prouver qu’on peut compter sur moi.
Ton adaptation à la Bretagne se passe-t-elle bien ?
Je connaissais Nantes, qui m’a plu. Ici, c’est très bien aussi. J’ai été hyper bien accueilli. Que ce soit avec les dirigeants, les salariés ou les bénévoles, j’ai la sensation d’être ici depuis des années ! Tout le monde est très gentil et disponible, ça aide. Dans le vestiaire, c’est la même chose, il y a beaucoup de bons gars, ça se passe très bien, avec du travail et de la bonne humeur. Le « team spirit » est très important et je pense qu’à ce niveau, ce groupe est très soudé. Malheureusement, avec la crise sanitaire, nous ne pouvons pas développer notre vie d’équipe en dehors de la Glaz Arena et des déplacements. On se bastonne pas mal en jouant en réseau, notamment sur « Call Of Duty ». Mathieu (Salou), Corentin (Lorvellec) et Hugo (Kamtchop) sont plutôt pas mal dans ce registre mais la console ne remplace pas les moments passés ensemble, en ville ou les uns chez les autres. Forcément, ça manque…
« Le meilleur moment de la journée, c’est quand j’arrive à la Glaz »
Tu attaches beaucoup d’importance à ces moments de convivialité ?
Un groupe, c’est une tactique, des talents, des compétences ajoutées, bien sûr, mais c’est aussi les soirées passées ensemble, les moments partagés après une victoire ou même une défaite, des restos, les souvenirs que l’on construit tous ensemble en dehors du handball. Aujourd’hui, pour échapper au virus, nous menons une vraie vie de moine. Je n’ai évidemment jamais connu cela. C’est dur mais c’est ce que nous devons faire pour pouvoir continuer à jouer. Nous avons quand même la chance de nous retrouver tous les jours, de jouer ensemble. Beaucoup de gens vivent une situation bien plus pénible que la nôtre, vraiment. Le meilleur moment de la journée, c’est quand j’arrive à la Glaz et que je retrouve les collègues. Pour autant, être privé de cette vie collective et de la présence de notre public, c’est dur à supporter.
Tu es venu à Cesson seul, sans ta compagne…
C’est vrai et c’est difficile… Nous n’imaginions pas que ça le serait autant. La situation sanitaire n’arrange rien mais nous avions fait ce choix en connaissance de cause. On voulait développer nos carrières, chacun de son côté. Ma compagne monte son entreprise, ça marche plutôt bien et il n’était pas question de la priver de cet épanouissement professionnel. Après, quand je rentre chez moi, dans mon appartement, c’est parfois compliqué. C’est vide, sans elle et sans mes deux chiens. Mais nous savons pourquoi nous faisons ces sacrifices. Et malgré la distance, son aide est très précieuse.
Tu peux développer ?
Nous avons deux tempéraments qui se complètent bien. Cindy est derrière moi pour me pousser, me rentrer dedans quand c’est nécessaire et me faire avancer. Elle s’assure que je ne lâche rien, jamais. C’est vraiment très important pour moi de l’avoir, de recevoir et de sentir sa force, ce caractère, même à distance. Pour la réussite de nos projets, je n’ai pas le droit de baisser les bras. C’est aussi pour cela que je veux être hyper performant, ici à Cesson.
Quelles ambitions Cesson va-t-il avoir sur cette année 2021 ?
Nous sommes un groupe encore jeune, en plein développement, et, ne l’oublions pas, promu en Lidl Starligue. Mais il y a beaucoup de qualités et de possibilités. Nous l’avons vu sur plusieurs matches où nous avons été vraiment tout près de mettre plus de points. Je pense à Saint-Raphaël, Aix et Montpellier, qui sont de grosses écuries. Parfois, nous avons été en dedans. On a loupé des rencontres. Cela fait partie de l’apprentissage. Le plus important, c’est de continuer d’adhérer à ce que nous propose Sébastien Leriche et d’en donner toujours plus. Être à 100 % ne suffit pas toujours, il faut vraiment se rentrer dans la tête que nous devons tout donner, tous en même temps, pour assurer un bon maintien.