Certes, le Stade Rennais est loin de vivre les turpitudes de son voisin nantais, en très danger pour son maintien, ou pire, celles de clubs historiques en lambeaux comme Marseille, Saint-Etienne ou à un degré moindre, en coulisses, Bordeaux. Pourtant, le nul concédé ce mercredi face à Lorient interroge et inquiète forcément, plus par son contenu que par son issue, hautement prévisible au fil des minutes.
On connaissait le Stade Rennais capable de finir fort, au point de parler de « Stephan Time ». Voilà déjà un bon moment n’a plus forcé le destin d’un match dans les ultimes minutes (la dernière fois face à Monaco, le 19 septembre dernier), la cause, positive ou négative, étant entendue plus tôt offrant au final peu de spectacle. Hier face aux Lorientais, un but plein d’opportunisme de Martin Terrier permet à Rennes d’être longuement devant. Eduardo Camavinga gratte et récupère les ballons, Jérémy Doku propose à droite sans parvenir à être décisif mais déjà, en défense, plusieurs cadeaux sont offerts à des lorientais maladroits. Offensivement, plusieurs frappes trop peu dangereuses donnent l’illusion d’une maîtrise dans un match joué à un petit rythme, qui aurait été tout autre avec un public…
L’impression se prolonge après le repos, avec un jeu encore plus lent côté rennais. Des passes latérales, beaucoup de déchet technique et pas de verticalité. Le constat fut déjà fait cette saison à plusieurs reprises, malgré d’autres hommes ou d’autres systèmes. Jérémy Doku, de nouveau lui, a son premier but à l’heure de jeu. Pourtant, avec un crochet superflu, celui-ci se met tout seul en difficulté et frappe sur le défenseur lorientais revenu aider son gardien. Le KO était là, et les trois points, probablement, aussi. La dernière demi-heure, lorientaise, sanctionne logiquement le SRFC sur un beau mouvement conclu par Quentin Boisgard. Quelques minutes plus tard, Armand Lauriente, tonitruant à son entrée en jeu, passe d’un rien à côté du but vainqueur pour se rappeler au bon souvenir de son club formateur. Finalement, un point, ce n’était pas si mal à l’issue d’un match terne, sans saveur.
Au classement en revanche, ce surplace et ces points perdus dans des matchs clairement à portée (Lorient, Nantes …) risquent de peser en vue d’une quatrième place chèrement défendue par Monaco, vainqueur aux forceps contre Nice. Derrière, les ambitieux Lens et Metz ne sont pas des adversaires à prendre de haut et ne cessent de surprendre. Marseille, pour sa part, peinera à revenir mais demeure imprévisible.
Cette cinquième place, finalement, est un juste reflet d’une équipe pour qui la possession semble être désormais un acquis mais aussi un dangereux trompe l’œil. Devenue un peu trop prévisible pour ses adversaires, avec des menaces offensives identifiées et souvent maîtrisées par les adversaires, l’équipe doit trouver de nouvelles solutions et combinaisons pour faire mal, de nouveau, avec réalisme et efficacité dans les deux surfaces. Avec un effectif désormais au complet, Julien Stéphan a toutes les cartes en main pour réussir un printemps canon, spécialité maison depuis son arrivée soit par le championnat, soit grâce à la coupe de France. Le tout en insistant sur un 4-2-3-1 pouvant être très convaincant avec Serhou Guirassy de retour en pointe et Clément Grenier ou Martin Terrier en soutien ou en tentant d’autres systèmes, comme un 4-4-2 avec deux vrais excentrés et une présence plus importante dans la surface, qui ne pourra être efficace qu’avec des ballons amenés rapidement dans les 18 mètres adverses. Le tout, évidemment, en restant solides défensivement.
Si le football est aujourd’hui jugé principalement, hélas, au travers d’algorithmes, de chiffres, de stats comme les « expected Goals » et autres sprints à haute intensité et kilomètres parcourus, est-on devenus scientifiques ou experts en athlétisme ? Non, non et non. La recherche principale de tout supporter, journaliste et même joueur ou technicien, reste l’émotion, cet instant où tout peut basculer, où l’adrénaline est au-dessus de toute considération numérique. Cet instant que nous ne nous pouvons plus cette saison partager tous ensemble dans ce Roazhon Park vide, qui a trop souvent manqué à ce Stade Rennais, pourtant fournisseur d’émotions XXL depuis plus de deux ans. S’il n’est pas recommandé d’être dépendant, force est de constater que la communauté « Rouge et Noir » s’est accoutumée au bonheur de vibrer, qui plus est dans de grands moments, parfois aussi dans les mauvais. Un caprice de « riche », peut-être, à l’égard d’une équipe confortablement installé dans le Top 5 mais qui montre que l’ambition ne s’arrête pas à un capital points mais plutôt à l’envie de vibrer, de kiffer et d’aimer encore plus cette équipe réaliste et efficace dans l’ensemble, pour laquelle nous espérons nous enflammer de nouveau. Il suffira, d’une étincelle. A Bollaert, pour la « re-Lens » ?