Selon les différents interlocuteurs, les avis différaient : tantôt carrière terminée, tantôt retour possible. Le plus simple restait d’interroger le principal intéressé, peu épargné par le sort ces dernières semaines et confiné chez lui après une possible infection au Covid-19. A 32 ans, Romain Charrier va bel et bien tourner la page CPB Hand. Oui, mais…
Dans nos colonnes, le mois dernier, Franck Roussel, le président, évoquait la probable fin de ta carrière. D’autres sources parlaient d’un dernier retour. Qu’en est-il aujourd’hui ?
J’ai subi un gros choc lors de notre déplacement à Boulogne, en novembre dernier. C’était un match très accroché, dur physiquement. Sur une dernière remontée en fin de partie, je suis au contact avec un adversaire et son genou vient s’encastrer dans mon tibia, causant un choc du bas vers le haut. Cela a répercuté sur la cheville et plus précisément la malléole. Après plusieurs consultations, les médecins sont arrivés à un diagnostic assez complexe, révélé par l’arthroscopie : un bout de cartilage se balade, l’autre est impacté et fissuré tandis qu’un des trois ligaments est mort. Voilà ce qu’il en est…
Le diagnostic semble sévère en effet. Quelle a été ta réaction ?
Quand tu es privé du jeu qui constitue l’essentiel de ta vie, de tes fréquentations depuis plus de 24 ans, forcément, c’est compliqué. Après j’ai dû d’abord observer une période de repos et j’ai ensuite remarché normalement, puis repris l’entraînement en février avec les gars, sans avoir été opéré pour le moment. J’essaie de travailler mais sincèrement, arrivé à 70 % de mes possibilités, cela bloque, notamment sur les impulsions ou les appuis en changement de direction et en rotation. La fin parait inéluctable car en Nationale Une et encore plus cette saison, il faut être au minimum à 100 % pour être utile à l’équipe. J’ai 32 ans, je pense qu’il va falloir être raisonnable. Une opération reste possible mais dans la période actuelle, il y a très logiquement beaucoup d’autres priorités. Une chirurgie permettrait surtout de pouvoir marcher normalement et de continuer à exercer mon métier de professeur d’EPS.
« Ce qui restera, ce sont les amis, bien plus que les victoires »
Cela signifie la fin du hand de haut niveau en juin prochain ?
Je vais vers cela oui, même si j’aimerais refouler les parquets encore un peu avant de raccrocher. Je suis de toute manière muté à Paris pour la rentrée prochaine et je boucle une histoire de neuf années ici au CPB. Je veux dire au-revoir depuis le terrain, même si c’est pendant quelques minutes. J’ai connu une belle carrière, j’ai eu la chance aussi de jouer avec des copains comme JB Laz avec qui nous avons connu le pôle à Cesson, je ne peux pas me plaindre.
Que retiendras-tu en priorité de ces 9 années passées au Cercle ?
Des amis pour la vie, avant tout. Au-delà de toute victoire, défaite ou montée, ce qui reste, ce sont les moments vécus ensemble, les déplacements, les copains. Si je ne continue pas le hand l’an prochain, c’est aussi parce que je ne me vois plus jouer ailleurs qu’ici. Je retiendrais évidemment nos montées, des moments inoubliables, j’ai la chance d’en avoir vécu deux. Ce qui restera, je le répète, ce sont les amis, pas les victoires.
Comment vis-tu cette fin de carrière ?
J’ai la chance d’avoir commencé à m’intéresser depuis plusieurs semaines à d’autres choses. Récemment, j’ai commencé la sculpture sur bois et j’ai aussi eu mes premiers cours de forge à Brocéliande. Si j’étais resté chez moi à ne rien faire, j’aurais sérieusement « badé » et ce n’est pas le but, il y a plein de choses à vivre en dehors du hand. Comme je l’ai dit, les copains vont rester. L’an prochain, j’aimerais me lancer dans le foot gaélique, si tout va bien. Ce sport me plait et m’intéresse depuis longtemps et à Paris, il y a un très bon club. Concernant le hand, j’espère juste pouvoir vivre encore quelques instants sur le parquet, peu importera le résultat ou le temps de jeu, pouvoir kiffer encore un peu.
« On s’attache à ses élèves, ils me manquent »
Au-delà de ta blessure, la période d’urgence sanitaire actuelle n’incite pas à avoir le sourire…
C’est certain, d’autant plus qu’il est fort probable que j’ai contracté récemment le Covid-19. Rien ne me l’a confirmé mais j’ai choisis de me confiner moi-même pour éviter tout problème, surtout pour les gens m’entourant ou mes élèves. C’était en classe de neige, je me suis senti faible, très fatigué, j’ai essayé de serrer les dents mais au troisième jour, ce n’était plus possible. Je me suis isolé et aujourd’hui encore, je reste à l’écart de mes colocataires à la maison tant que les 15 jours de confinement ne sont pas passés. Je sors un peu dans le jardin faire un peu d’exercice mais guère plus. Aujourd’hui, ça va beaucoup mieux mais attention, ce virus, si c’est bien lui que je viens de « croiser », ce n’est vraiment pas de la rigolade. Chacun doit comprendre et s’adapter face à la gravité de cette infection.
Quel a été ton discours avec tes élèves ? Comment la situation fut-elle vécue ces dernières semaines ?
Je sors d’un voyage scolaire au ski qui fut génial, c’était juste avant la fermeture des écoles. On a créé des liens dans ces moments-là, forts, on découvre les gamins sous un autre jour, on se jette des boules de neige. C’était chouette et j’avoue qu’ils me manquent ces petits ! On s’attache à ses élèves, c’est très dur de ne pas aller travailler. Sur le message transmis auprès d’eux, on ne fait que relayer les instructions données par les autorités. La continuité des cours ? Les plateformes sont surchargées et la priorité est souvent donnée au français, aux maths mais je leur prépare malgré tout des programmes pour rester en forme, à faire à la maison.
Et avec tes collègues ?
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