Yann Moison : « Le travail finit toujours par payer ! »

La première partie de saison achevée après maintes contrariétés, place à 2020 et au renouveau pour le REC Rugby, auteur d’une première partie de saison loin des espérances. Tout n’est pour autant pas à jeter, loin de là, et Yann Moison, son coach, a toute confiance en son groupe pour continuer d’avancer.

Non, il ne faut pas s’y tromper ! Bien que beaucoup se soient déjà imaginés luttant pour le podium chez les supporters ou partenaires, le REC Rugby, monté l’an passé en Fédérale Une, est encore en phase d’apprentissage. Dès cet été, Yann Moison, le coach ainsi que l’état-major du club, avaient prévenu : « Nous le savions, la seconde année après une accession est toujours la plus compliquée. C’est la saison de la confirmation, il n’y a plus d’effet de surprise ». Pas de surprise non plus quant au niveau d’une poule sans promu, avec pas moins de neuf équipes ayant disputé l’an passé les phases finales : « Nous étions prévenus, la poule serait dense et relevée. Nous ne sommes pas déçus, avec beaucoup de choses à en retirer. Les résultats s’expliquent aussi par le niveau de cette concurrence très élevée ».

« Nous sommes dans le vrai »

Les chiffres, parlons-en un peu. Imprenable sur ses terres en Fédérale 2, le REC avait fait du Vélodrome un antre impénétrable où chaque visiteur repartait avec des bleus et un gros mal de tête, sans gagner. Cette saison, la donne n’est plus vraiment la même avec déjà quatre défaites en six matchs à la maison, dont deux d’un petit point d’écart en début de saison : « C’est vrai, nous avons perdu certains matchs d’un petit point ou deux, et les contenus auraient pu être ceux de victoires, confirme le coach réciste. Cependant, si la pièce est tombée du mauvais côté, c’est aussi parce qu’il nous manque encore de la maîtrise. Cette lacune se manifeste notamment sur les ballons décisifs en money-time, sur des actions où nous devrions marquer, concrétiser nos dominations. C’est un axe de travail majeur pour la seconde partie de saison, au-delà du fond de jeu ». Celui a d’ailleurs plutôt donné satisfaction, tant aux supporters qu’au technicien rennais : « Nous avons opté pour une philosophie basée sur le mouvement, le dynamisme, du jeu en mains. Il n’est pas question de renier notre philosophie, qui a offert de vraies satisfactions. Nous sommes dans le vrai. Simplement, il va falloir être plus tueur et concrétiser les temps forts. Notre progression au classement mais aussi à ce niveau-là passe par là. » Avant la trêve, le magnifique combat livré lors du derby face au voisin nantais a de quoi réconforter des bretons souvent peu payés de leurs efforts. Ce jour-là, ce ne fut sans doute pas la meilleure partition réciste de l’année mais pourtant, la récompense fut au bout : « Ce jour-là, on aurait pu nous enlever un, deux ou trois joueurs, les gars auraient pu mourir sur le terrain pour empêcher nos adversaires de passer l’en-but sur la dernière possession. L’état d’esprit affiché ce jour-là, ce refus de la défaite, cette dévotion pour le coéquipier et la cause commune fut admirable. C’est évidemment une base de travail ultra intéressante pour la suite, même si nous n’avions aucun doute, même avant cette victoire, sur l’état d’esprit des garçons. » Pour la phase retour, ceux-ci devront faire preuve donc d’initiative, de jeu et de réalisme, avec cinq matchs à la maison face à des adversaires à portée au classement dans un championnat dense et serré, en haut comme en bas de tableau. Si les « Noir et Blanc » ont leur avenir entre les mains, tout ne dépend pas pour autant uniquement d’eux…

La Bretagne face au Sud Ouest

Au-delà des matchs, deux autres paramètres sont importants à considérer à l’heure du bilan à mi-parcours. D’abord, les forces en présence. On l’a dit, tous ont l’expérience de la Fédérale Une et des phases finales, mais sont également issus d’une terre de rugby incontournable, le sud-ouest. Tyrosse, par exemple, malgré son statut de petit village de 6000 âmes vit pour son club et possède une histoire riche d’un siècle de rugby, avec un passé en Pro D2 tout récent, au début des années 2000. Saint-Jean-de Luz est aussi un bastion de l’ovalie, sans même parler des Dax, Cognac et autres. Cette culture rugby vient s’opposer à celle naissante en rugby et se retrouve également au niveau de la formation : « Là-bas, vous avez de nombreux joueurs qui auraient le niveau pour aller jouer en Top 14 ou Pro D2 mais qui n’y accèdent pas, la faute à une concurrence terrible. La plupart du temps, ils se tournent alors vers un métier et un double projet, venant renforcer au passage les formations de F1 qui n’en demandent pas tant. Le réservoir de talent dans cette région est incroyable. Regardez Vannes, ils ont près de dix ans à dompter ce niveau. ». Désormais installé en PRO D2, le club morbihannais, modèle breton par excellence, a cependant bénéficié d’un plus indéniable, le stade de la Rabine…

Faire évoluer les installations pour rester attractif

Et c’est bien là que le bât blesse pour les Rennais, non par l’absence d’une enceinte d’envergure, le Vélodrome remplissant au mieux son rôle mais par un déficit criant d’infrastructures adaptées au niveau actuel du club. Sans tirer sur l’ambulance, Yann Moison détaille : « Aujourd’hui, nos installations ne sont pas en adéquation avec la Fédérale UNE. Nous sommes conscients que les collectivités font le maximum pour nous accompagner mais c’est très compliqué au quotidien. Nous partageons les murs actuellement avec le Stade Rennais Rugby, qui joue aussi au plus haut niveau et mérite aussi une structure adaptée. ». Les anecdotes relatives à ces conditions parfois très compliquées sont légions même si le staff rennais fait avec et se concentre sur ce qu’il peut faire : «  Cet hiver, la salle de musculation était glaciale, les garçons ont travaillé à 2°. Nous n’avons pas non plus de salle pour les séances vidéo, qui se font parfois dans les vestiaires, à même le carrelage au sol… Les garçons ont le grand mérite de ne jamais se plaindre et s’ils le font, ils tombent sur moi pour leur rappeler que d’autres font les trois huit et travaillent dans des conditions bien plus difficiles. Néanmoins, aujourd’hui, si l’on veut aspirer au professionnalisme à terme et pourquoi pas à la PRO D2, il faut pouvoir accueillir des pros et pour cela, leur offrir des installations de niveau professionnel. Un projet est en cours et son aboutissement sera indispensable pour continuer à progresser. En cas contraire, il sera très compliqué d’aller plus haut et de rester attractif. ». Un signal fort, envoyé avec à-propos au moment de repartir au combat et de s’offrir une belle poule retour : « Sportivement, nous ne fixons pas d’objectif impossible au garçon, simplement celui de continuer à produire du jeu et surtout, à refaire de notre stade un terrain imprenable ou très difficile à jouer. Etre intraitable chez soi est indispensable pour espérer à terme d’aller plus haut. Les phases finales sont loin aujourd’hui, nous sommes déçus et espérions mieux mais il y a encore de nombreux matchs à jouer dans un championnat où il faudra rapidement assurer notre maintien puis travailler en vue de l’an prochain. Ce groupe n’a jamais triché et je sais qu’il ne lâchera rien en 2020. ». Janvier, avec des déplacements à Cognac et Marmande et la réception d’Arcachon, devrait déjà donner de probants éléments de réponse.

Recueilli par Julien Bouguerra