La sauteuse en hauteur espère bien valider son ticket pour les jeux. Licenciée au Stade Rennais Athlétisme et fille de l’octuple champion de France de la discipline, Jean-Charles Gicquel, elle raconte sa préparation en vue des JO.
Tu as participé récemment à tes premiers championnats du monde en Hongrie. Qu’en retires-tu ?
Je retiens avant tout l’expérience acquise car c’était une première pour moi. En arrivant à ce niveau de compétition, l’objectif était déjà atteint. Nous sommes habituellement douze en finale mais nous étions exceptionnellement quinze sur celle-ci. L’ambiance était impressionnante malgré le fait d’y être préparée. Avec l’envie de bien faire, je me suis sans doute mis un peu trop la pression. Parfois, quand tu veux trop bien faire, tu oublies de te relâcher et tu as tendance à robotiser tes mouvements. Tu penses à tous les petits points techniques que tu dois mettre en place au même moment et c’est trop à la fois. Finalement, ce n’est pas forcément sur la compétition qu’il faut penser à la technique et c’est peut-être l’erreur de ma finale. Il faut que je travaille là-dessus en vue des Jeux Olympiques, mais j’ai tout de même énormément appris.
Quelles sont les conditions pour accéder aux Jeux Olympiques ?
Il y a deux façons. La première c’est de réaliser les minimas qui se situent à 1,97m. Pour ma part, j’ai un record à 1,92m. C’est une barre relativement haute et il n’y aura pas 32 filles à le faire. En second, c’est le classement qui est pris en compte, avec une moyenne des cinq meilleures performances sur l’année. C’est un système de points et chaque performance en apporte un certains nombre. Les points sont comptabilisés en fonction de la performance mais aussi en fonction de l’importance des différentes compétitions. Ce classement est réalisé sur un an, du 1er juillet 2023 au 1er juillet 2024, et il faut être dans les 32 meilleures au niveau international. Pour l’instant, je dirais que j’ai fait un premier pas vers cette qualification, mais il faut que je réitère d’autres bonnes performances. Ça été hyper important de participer à ces premiers championnats du monde. Je pense qu’il va me falloir encore deux gros résultats pour m’assurer d’aller aux Jeux. Bien sûr, l’objectif est aussi d’y aller pour performer. Les Jeux olympiques, c’est l’objectif ultime.
Quel est ton programme d’entraînement ?
Je fais huit à neuf séances de deux heures par semaine, avec plusieurs types d’entrainements : les séances techniques, d’autres où je travaille les élans longs et les élans réduits, il y a la musculation, la course, les séances de bondissements et enfin la préparation physique. Je fais parfois des mixtes pour ne pas rendre les séances trop monotones. Tu apprends aussi à être à l’écoute de ton corps et à t’adapter. Je suis accompagnée d’un entraineur et d’un kiné. J’ai aussi un préparateur physique quand je prépare une nouvelle saison. Je me suis un peu créé mon propre pôle. L’hiver, je m’entraine au Stade Robert Poirier et l’été à Courtemanche.
Du fait de la carrière de ton père dans la discipline, es-tu allée directement vers le saut en hauteur ?
En fait, je n’ai même pas commencé par l’athlétisme. Je savais que mon père était dans le milieu mais j’ai d’abord suivi mon frère avec qui j’avais un an d’écart. J’ai débuté par le judo puis la gymnastique pendant dix ans. J’ai adoré ce sport mais je n’aimais pas trop les compétitions. Ça m’a permis de bien connaître mon corps. J’ai démarré l’athlétisme en classe de 5e et ça se chevauchait avec la gymnastique. Au début, j’ai essayé de nombreux sports, mais je me suis très vite rendu compte que j’avais des compétences dans le saut et finalement je me suis orientée vers la hauteur. Même si nous savions que l’athlétisme avait une saveur particulière dans la famille, mon père ne m’a jamais poussée vers ça et nos parents nous ont toujours soutenus, peu importe la voie que nous choisissions.
Quelles sont les qualités nécessaires pour le saut en hauteur ?
Certains athlètes sont davantage dans la vitesse, c’est-à-dire transformer la vitesse horizontale en force verticale, et d’autres, qui ont un profil plus grand, utilisent davantage leur taille. La difficulté, c’est que plus nous sommes grands, moins nous sommes rapides. Il faut trouver le juste milieu et ça n’est pas toujours évident. Il faut aussi être solide physiquement, notamment au niveau des chevilles, et avoir des « qualités de pied ». On doit utiliser notre course pour accrocher le sol pour transmettre toute cette énergie vers le haut.
As-tu un travail à côté du saut en hauteur ?
Je ne vis pas du tout de mon sport et je travaille à côté en tant que surveillante : un contrat à 70% qui me permet de me libérer du temps pour ma pratique. Il y a peu de sponsors et je suis donc en recherche. J’essaie de me renseigner, mais il faut faire les démarches soi-même. J’ai tout de même deux agents qui gèrent les compétitions et qui me permettent de rentrer sur les gros meetings. Ils ont aussi des contacts d’équipementiers, ce qui aide forcément. Ils gèrent également mes déplacements lointains. Quand c’est en France, je m’en occupe, mais dans ce cas-là, je dois avancer les frais et c’est parfois un peu ric-rac. À une certaine hauteur, les organisateurs remboursent le déplacement et il y a des primes en fonction de ta place sur les meilleurs meetings de France. Au niveau de mon emploi du temps, c’est surtout au moment des compétitions qu’il faut s’organiser et je m’arrange avec des collègues. Je suis dans un lycée sportif donc l’établissement est très à l’écoute.