Déjà tourné vers la saison 2023-2024, Jean-Marc Trihan, président du REC Rugby, ne compte pas cultiver les regrets bien longtemps et vise déjà le rebond avec comme objectif une qualification pour les phases finales. Entre analyse d’une saison éprouvante et perspective de la continuité du développement du club, le discours est bien crampé sur les appuis et le club déjà prêt à repartir au combat !
Un mois après le verdict d’une saison compliquée pour le REC, quel est votre ressenti global ?
Cela a été une saison très difficile à vivre, surtout que nous restions sur plusieurs saisons très positives. Ça l’est toujours quand on ne gagne pas beaucoup de matchs. Le fossé entre la Fédérale Une et le National est colossal. La concurrence était très forte et nous n’étions pas vraiment attendus. Quand on évolue en Fédérale, on n’est pas réellement préparés à cela. Hyères, même s’il s’est sauvé, a aussi beaucoup souffert, comme nous, d’une préparation écourtée et compliquée. Il ne faut pas oublier notre titre – et quel titre -, le premier titre du club ! Il ne faut pas banaliser cela, ni oublier ce qui a été accompli. Cette saison s’annonçait quoi qu’il arrive très compliquée. Il nous faut continuer à construire et grandir. Cette saison nous a permis d’avancer encore, incontestablement, même s’il reste bien sûr encore beaucoup à faire.
Considérez-vous que le maintien était accessible ?
Le verdict sportif est ce qu’il est mais je constate que nous n’avons jamais été très en dessous. Il y a eu des faits de matchs qui ont ensuite fait basculer des rencontres et donné de l’ampleur à certains scores mais nous sommes rarement passés complètement à travers. Nous avons toujours existé, même si ce n’était pas sur 80 minutes. Peut-être aurions-nous pu gagner quelques matchs supplémentaires en jouant plus libérés, en se lâchant, comme les garçons l’ont fait en fin de saison. Nous avons aussi, comme tout le monde, dû faire avec beaucoup de blessés. Il est certain que l’indisponibilité des terrains, l’été dernier, n’a pas aidé a une bonne préparation. Ce premier match à Bruz n’était évidemment pas l’idéal non plus. Cependant, regardons devant, on peut juste dire que sur l’ensemble de la saison, au vu de notre production, l’issue est assez logique.
Etait-ce une question de niveau ?
Non, je n’en suis pas certain car plusieurs matchs peuvent basculer de l’autre côté sur des moments clés, c’est le constat que nous faisons, mais c’est assez facile a posteriori de dire cela aujourd’hui. Je ne peux rien reprocher au staff et aux joueurs, qui d’un côté ont toujours gardé le cap et cherché des solutions et de l’autre, tout donné sans calculer, au maximum de leurs capacités dans l’intensité, le combat et la volonté. Nous avons aussi fait face, et il faut le reconnaître, à des effectifs sans doute plus denses et expérimentés, plus techniques avec une plus grande ingénierie rugby. C’était une année d’apprentissage dont nous retirons beaucoup de positif. Nous sommes tous responsables de cette descente.
Bien que relégués, vous partez à l’assaut d’une compétition que vous n’avez encore jamais fréquentée, la Nationale 2. Comment l’appréhendez-vous ?
Nous allons découvrir un nouveau championnat auquel nous devrons rapidement nous adapter. Cette division a été créée pour permettre aux clubs accédant de Fédérale Une de construire et renforcer leur projet avant de pouvoir prétendre s’installer en Nationale. J’attends du staff et de l’équipe que nous puissions jouer les premiers rôles et nous qualifier pour les phases finales même si je sais que rien ne sera simple, ni ne nous sera donné. Bien qu’en reconstruction, nous serons ambitieux. L’important pour nous est de continuer à faire grandir le club, le structurer et le développer, tout en étant attrayant sur le terrain.
Sur ce plan-là, l’effectif va être fortement renouvelé. Cela est-il dû à un constat d’échec sur les profils choisis l’été dernier ou tout simplement, à la fin d’un groupe ?
La vie du rugby de haut niveau veut cela, il y a un mélange de pas mal de paramètres. Certains joueurs arrivaient au maximum de ce qu’ils pouvaient faire, notamment pour des pluriactifs qui nous quittent. Certains n’ont pas été au niveau attendu et ne sont pas conservés tandis que d’autres joueurs font le choix de partir pour continuer à évoluer en Nationale, avec des offres ayant pu satisfaire leurs attentes. Nous allons repartir avec un noyau solide de joueurs ayant connu le titre et cette année de Nationale auquel se grefferont, cette fois-ci avec une vraie préparation, de nouveaux éléments sur lesquels nous travaillons depuis plusieurs mois.
Y aura-t-il du changement au sein du staff et des salariés du club ?
Quelques ajustements ont été décidés. Mikaele Tuugahala et Inaki Basauri ne seront plus au club, où ils étaient en charge de la mêlée et de la touche. Ils seront remplacés par Carlos Muzzio qui arrête sa carrière et apportera son expertise et son immense expérience. Nous conservons nos salariés hors joueurs et essayons de pérenniser nos alternants. Nous pourrons aussi nous appuyer toute la saison sur Jorge Gonzales, notre manager général, sa formation étant terminée. Autant d’arguments pour continuer de grandir et travailler.
Sur la partie infrastructures, où en est le REC Rugby ?
Nous avons pu cette année bénéficier d’un espace VIP dans la salle omnisport du Commandant-Bougoin, mise à disposition par la Ville de Rennes. C’est un vrai plus, qui a permis d’accueillir nos partenaires dans de meilleures conditions. Pour le Pole Ovalie, les choses avancent. En novembre prochain, nous disposerons si tout va bien de cinq terrains d’entraînement, de bureaux en dur, d’un espace commun de vie. La Ville de Rennes nous accompagne, écoute nos problématiques et besoins. Maintenant, je pense qu’elle doit changer son approche du sport de haut niveau et considérer que c’est avant tout un atout pour le rayonnement de la ville : en un mot nous aider plus financièrement. Nos subventions, toutes collectivités confondues représentent 15% de notre CA, c’est très insuffisant pour exister et même survivre, nous sommes trop fragiles. C’est surtout très en dessous des aides que reçoivent la majorité des clubs que nous fréquentons. La prochaine étape sera le Stade du Commandant-Bougouin, qu’il va falloir moderniser pour prétendre à aller plus haut.
Celui-ci a connu de belles affluences cette saison, avec un public au rendez-vous !
Clairement, oui. Nous avons tourné à une moyenne de 1.100 spectateurs par match, ce qui démontre que le potentiel rugby est là. Si pour certains, la Bretagne n’est pas une terre de rugby, cela prouve le contraire. D’ailleurs, lors de plusieurs de nos déplacements dans le Sud-Ouest, il y avait beaucoup, beaucoup moins de monde dans des stades qui sonnaient creux… Au Vélodrome, l’ambiance y était et Clément, notre stadium manager, a initié des actions très intéressantes. L’école de commerce de Rennes est venue mettre l’ambiance en 2023 dans les tribunes. Cela a apporté un vrai plus, bravo a ceux qui ont eu cette initiative et qui s’investissent pour le club. C’était une expérience à peaufiner mais extrêmement positive. Je pense aussi à nos bénévoles, en augmentation cette saison, qui n’ont pas ménagé leurs efforts et investissements.
Le REC Rugby, c’est un projet professionnel, une équipe fanion écrivant ses plus belles pages ces dernières années mais aussi la formation…
Bien sûr et nous travaillons aussi beaucoup sur cela. L’avenir de notre rugby, au REC mais aussi en Bretagne, se prépare dès aujourd’hui sur les catégories jeunes où nous devons encadrer, staffer et attirer un maximum de jeunes. La formation est l’un des murs porteurs de notre projet mais cela demande des moyens financiers très forts. Nos équipes ont encore eu de bons résultats cette année et c’est une grande satisfaction malgré des moyens limités. Nous alignons des équipes dans chaque catégorie, l’identité club a du sens. Quand je pense à l’équipe espoir qui a connu une année très difficile dans des conditions compliquées, je ne peux que féliciter nos joueurs d’avoir toujours tout donné, de s’être battus jusqu’au dernier match. Et je félicite leurs accompagnants bénévoles et dirigeants de s’être investis autant, tout au long de la saison.
Plusieurs médias rapportent les soucis financiers du club de Tarbes, tandis que d’autres rumeurs évoquent des difficultés possibles pour monter en N1 pour les finalistes de N2. Peut-on imaginer le REC repéché ?
Aujourd’hui, nous construisons notre projet et notre équipe pour la Nationale 2. Nous avons accepté le verdict sportif, qui nous envoie à l’étage du dessous. Maintenant, si un club – peu importe lequel – ne veut pas monter ou est jugé défaillant par les instances, nous serons les premiers interrogés pour un éventuel maintien. Si on nous demande de rester en National, nous verrons bien en temps et en heure et avec la collectivité ce qu’il faut faire mais à ce jour, notre unique plan, c’est la Nationale 2 et la construction de notre équipe pour y performer.