REC Rugby – Nationale : Pierre Algans : « Le mot d’ordre ? S’installer à ce niveau dans la durée »

Entretien avec Pierre Algans.
Pierre Algans lors de la réception de Niort. @Crédit photo : JRS

Arrivé au REC il y a six ans, Pierre Algans est désormais dans le groupe des « anciens », à seulement 28 ans. Son expérience et son vécu sont désormais des atouts primordiaux au cœur d’un groupe rajeuni. Début de saison, ambitions, conditions d’entraînement, le 2e ligne et responsable de la touche s’y colle, comme sur le terrain, sans se dérober ! (Article extrait du JRS de novembre, sorti avant le match à Marcq-en-Baroeul, ndlr)

Avec déjà trois victoires, un nul et un match perdu sur le fil face à Rouen, le REC réussit son début de saison. Est-ce aussi ton avis ?

Je constate que nous répondons présent face au défi de ce retour en Nationale. Nous sommes au niveau et on donne la réplique, avec déjà des points de pris. Attention, cependant, nous n’allons pas pour autant nous prendre pour d’autres. Le début de saison est positif mais celle-ci sera longue et compliquée, et notre objectif est de nous maintenir avant tout.

Si on peut aller chercher une neuvième ou dixième place, on ne se privera pas mais on signe tout de suite pour terminer douzième. Il faut du travail, beaucoup de résilience et de l’humilité, tout en ayant l’envie d’affronter tout le monde sans complexe, droit dans les yeux. Le mot d’ordre est de s’installer à ce niveau, et de ne pas faire le yo-yo.

« Dans le bus, c’est tarot au lieu de faire le fou au fond… »

Qu’est ce qui a changé par rapport à votre premier passage en Nationale, il y a trois ans ?

Ceux qui ont vécu ce premier passage ont payé pour apprendre, nous avons compris certaines choses et on essaye  aujourd’hui de les partager aux nouveaux, aux jeunes. Il n’était pas question de se présenter en victimes et de mordre dedans. Nous avons le bonheur de démarrer par deux victoires à la maison puis d’aller chercher la victoire à Suresnes après un revers rageant contre Rouen à la maison.

Cette victoire n’était pas belle sur le plan du jeu mais fondatrice pour le groupe. Nous sommes allés la chercher à 23, en donnant tout et en nous prouvant que nous sommes capables de gagner loin du Vélodrome. Les résultats positifs libèrent le groupe, les jeunes poussent et personne ne se pose de questions sur notre niveau mais joue, à fond. On perdra des matchs cette saison mais on vendra chèrement notre peau !

Sur un plan plus personnel, comment juges-tu ton début de saison et comment définis-tu ton rôle au sein du groupe ?

Je suis très heureux du temps de jeu que le staff me donne et je m’emploie à performer au maximum à chaque sortie. L’an passé, j’ai participé à une très grosse majorité des matchs et cette saison également. On me fait confiance et cela signifie beaucoup pour moi. Les soucis et pépins physiques, je l’espère, sont derrière moi et je joue libéré, sans calculer. Les tests GPS sont bons, les stats sont au vert, je me sens en pleine forme. J’ai aussi la responsabilité de la touche et je m’attache à être efficace là-dessus.

En tant qu’ancien du club, je dois aussi être un relais sur le terrain, au même titre que d’autres gars, notamment avec des jeunes à l’écoute. Dans la vie de tous les jours, je dois être plus posé. Dans le bus, c’est tarot au lieu de faire le fou au fond… Nous sommes garants du projet et devons aussi mettre de notre personne pour faire grandir le club.

Tu as aussi pris du galon hors-terrain et hors Rennes cette saison…

Je m’occupe de coach à la touche à Saint-Malo, où je donne un coup de main à Jordy, avec qui je m’entends très bien. Cela amène une autre vision des choses, une transmission précieuse et un regard encore plus large sur tout ce que je dois apporter. Et pour ne rien gâcher, cela m’a aussi offert une double montée la saison passée !

« Nous ne demandons pas un stade flambant neuf, juste un vestiaire et des douches…  »

Question infrastructures, le sujet est toujours sensible autour du REC. Du point de vue des joueurs, comment vis-tu l’avancée des travaux ?

Nous avons désormais des terrains, dont le synthétique et ça, c’est top. Le VIP et le réceptif ont fortement évolué eux aussi, il y a désormais un lieu convivial, avec écran géant, animation qui continue de s’améliorer, au fil du temps. Côté entrainement, en revanche, désolé mais c’est aberrant. Nous n’avons pas de vestiaires décents, pas de douches ! Nous arrivons, on pose notre sac dans un couloir du bâtiment sur des casiers que nous avons apportés nous mêmes. Tout le monde peut passer par là… On met nos crampons et c’est parti, en se changeant dehors ou presque…

Ce n’est pas possible pour des joueurs professionnels, pour qui s’entraîner est un métier, avec tout ce que cela comporte d’exigences, d’être dans de telles conditions. Pas d’eau chaude, une salle de muscu où l’on ne peut pas rentrer à plus de vingt… Alors oui, les infrastructures évoluent, le club travaille dur et on ne lui reproche rien, évidemment car il subit, comme nous, l’absence d’avancée. Mon avis, et je l’assume, est que le rugby n’est clairement pas une priorité à Rennes pour ceux qui pourraient décider et agir. On a été champions de France deux fois et cela n’a rien changé…

On ne demande pas un stade flambant neuf, juste un vestiaire avec des douches chaudes et éventuellement, un lieu de vie, type foyer, pour se retrouver. A court et long terme, ces installations sont et seront un frein pour le club dans son recrutement ou la capacité à garder ses joueurs. Nous ne sommes pas des enfants gâtés mais à un moment donné, pour un joueur pro mais même un joueur tout court, un minimum de conditions doivent être réunies pour performer.

En parlant de performer, il est un garçon par le REC qui touche les étoiles, à savoir ton ancien coéquipier Gaël Dréan appelé en Bleu. Es-tu surpris de son ascension fulgurante ?

Surpris, non mais très heureux pour lui. Gaël, ca a toujours été une très bonne personne, un mec simple, à l’écoute et très travailleur. Et comme il est en plus bourré de talent, ça ne pouvait qu’exploser le jour où il aurait sa chance. Encadré comme il doit l’être à Toulon, son ascension est logique et méritée. Je lui disais tout le temps, quand il était chez nous, « t’es le meilleur », à chaque avant-match et il l’a souvent démontré. Dès les premiers entraînements, on a compris qu’on avait affaire à un phénomène aux qualités physiques incroyables. Il repasse souvent nous voir, n’a pas changé d’un iota.

Pour preuve, récemment, après son KO reçu en top 14, je lui ai envoyé un texto pour lui témoigner mon soutien, sans attendre de réponse tant il doit être sollicité désormais et il m’a répondu directement, très simplement. C’est ça Gaël, un mec qui, j’en suis certain, est resté le même alors qu’il est désormais en Bleu où il arrive juste derrière des cadors comme Penaud ou Bielle-Biarrey. C’est énorme et pourtant il reste simple et c’est pour ça qu’on l’adore. Je lui souhaite désormais de ramasser un maximum de sélections en Bleu, il le mérite !

Dernière question mais capitale : es-tu devenu un vrai breton ?

Ah, je pense que oui ! Quand je descends dans le Sud, mes parents disent que j’ai pris l’accent d’ici mais je retrouve le mien au bout de deux jours à force de les entendre. Après, j’ai ajouté à mes tatouages deux hermines, une par titre de champion, ça compte, non ? Et puis désormais, je dis « galette » et non plus « crêpe » et je bois le cidre dans une bolée. Je crois que j’ai bien avancé sur le sujet, non ? Le beurre demi-sel ? Là, je triche, j’en mange depuis toujours et j’étais déjà addict avant d’arriver ici (rires) !

Retrouvez le questionnaire de Proust de Pierre Algans dans la rubrique « Décalé » ou en cliquant ici.

Signature de l'auteur, Julien Bouguerra.