Consultant sur RMC Sport dans l’incontournable After Foot, Florent Gautreau, qui a élu domicile à Cesson-Sévigné depuis plusieurs années, nous donne un avis tranché, fidèle à ses habitudes, sur la situation du Stade Rennais, de son coach et de ses joueurs, sans oublier d’évoquer sa relation nouvelle aux « Rouge et Noir ».
A l’heure où la colère gronde dans les tribunes du Roazhon Park, que vous fréquentez depuis près de deux ans, quel regard portez-vous sur le premier trimestre rennais ?
Ce qui est clair, c’est que les gens ne se reconnaissent plus dans l’équipe, ni sur les résultats, ni sur le contenu. Rennes se nourrissait du beau jeu depuis plusieurs saisons, il a un ADN ici où il faut bien jouer ET gagner, où les trois points ne suffisent pas. C’était le cas avec Sabri Lamouchi et dans la première version de Julien Stéphan. Ce fut aussi souvent très bon sous Bruno Genesio. Aujourd’hui, c’est de plus en plus compliqué et il y a une vraie déception.
Ensuite, les gens ne se reconnaissent plus non plus sur le côté identitaire. Quand vous perdez des garçons comme Benjamin Bourigeaud et Martin Terrier, c’est un peu comme une page qui se tourne, un chapitre qui se ferme. On peut ne jamais vouloir que cela arrive mais c’est un choix de dirigeant que je veux bien accepter et comprendre. Mais dans ce cas-là, quitte à repartir sur un nouveau cycle, pourquoi ne pas l’avoir fait totalement ?
C’est-à-dire ?
Je pense que les dirigeants ont pris cette option de tourner la page, de vendre ces garçons qui étaient encore bankables et de démarrer un nouveau cycle. C’est une vraie prise de risque, quitte à connaître une année de transition mais dans ce cas-là, pourquoi avoir prolongé l’entraîneur en mars alors qu’il était venu pour une mission de six mois ? J’avoue ne pas comprendre, d’autant que Florian Maurice est parti trois mois plus tard avant que le président Cloarec ne suive aussi.
Tous ces départs étagés et le maintien du coach posent la question de l’organisation de cette nouvelle page voulue, qui aurait selon moi dû impliquer un nouveau message avec un coach choisi par le directeur sportif, lui-même choisi par le président et l’actionnaire. Il fallait sans doute tout changer afin de perdre le moins de temps possible, d’autant plus avec le nombre de transferts réalisés…
« Rennes a tout pour être aimé de tous »
Vous militez pour un départ de Julien Stéphan ?
Non, ce n’est pas mon propos et je n’ai strictement rien contre Julien Stéphan. J’observe simplement qu’aujourd’hui, il me parait encore chercher la bonne tactique, alors que nous arrivons en novembre, sans y parvenir, passant d’un schéma à l’autre. Il me paraît aussi isolé, avec des joueurs semblant parfois perdus. Il reste un jeune entraîneur qui montre peut-être aussi certaines limites. Les recrues sont peu utilisées, les rotations sont multiples et permanentes.
Dans cette situation, cela n’aide pas à gagner en confiance et en régularité et je crains que son message, déjà éprouvé en fin de saison dernière, ne soit plus compris. Il me semble isolé et pour moi, cela ne peut avoir qu’une seule issue, même si ce n’est pas quelque chose que j’aime. Rennes ne peut pas perdre plus de terrain ni de temps s’il veut assumer ses ambitions.
Au niveau des joueurs, quelles sont vos satisfactions et déceptions de ce début de saison ?
Je suis convaincu qu’Albert Gronbeak a beaucoup de qualité, son toucher de balle, ses courses ne trompent pas mais il perd confiance et on ignore encore son meilleur positionnement. J’apprécie aussi les centraux Faye et Seidu, dont la qualité pour l’un et la hargne pour le second me plaisent.
Je suis enfin évidemment très curieux de revoir Jota avec plus de matchs dans les jambes et peut-être mieux utilisé. En revanche, je trouve des limites à Arnaud Kalimuendo ou Amine Gouiri, des « anciens » de l’effectif désormais, qui progressent trop peu à mon goût. Pourtant, je trouve que l’effectif possède beaucoup de qualité.
La situation actuelle est-elle un simple accident de croissance et le développement du club ou un vrai risque de rentrer dans le rang ?
Je le répète, changer beaucoup de choses, des dirigeants aux joueurs est un acte courageux et nécessite un peu de temps mais Rennes n’en a plus à perdre. Il y a absolument tout ici pour réussir : un public au top, une ambiance, une expérience stade réussie et très agréable. Pour moi, le Stade Rennais fait désormais partie des clubs qui comptent en France, qui doivent être en haut et prétendre à l’Europe.
Il a prouvé qu’il en a la dimension, les moyens et l’ambition. Il doit aussi avoir l’exigence, ne pas se contenter de victoires en trompe l’œil comme face au Havre mais envoyer du jeu, comme il a su le faire, donner du plaisir à son formidable public. Rennes a tout pour être aimé de tous, pour performer et doit rebondir, peu importe les prochains résultats contre Auxerre ou Toulouse.
Avez-vous accroché avec Rennes au point d’en devenir supporter lors de vos soirées au Roazhon Park ?
Non, mon club, tout le monde le sait et c’est assumé, c’est Tours ! Et aujourd’hui, c’est compliqué là-bas, bien plus qu’à Rennes ! En revanche, j’ai énormément de plaisir à venir, comme je le disais, il y a tout ici pour que la belle histoire des années 2020 reprenne et sincèrement, c’est tout le mal que je souhaite au club, qui a tout ce qu’il faut pour réussir même s’il traverse un moment compliqué.