Volley – Jenia Grebennikov : « Contre l’Allemagne, sans le public, nous ne revenons pas ! »

Entretien avec Jenia Grebennikov.
Le Rennais Jenia Grebennikov pose avec sa médaille d'or. @Crédit photo : Jenia Grebennikov

Passé par le CPB Volley puis par le REC Volley, Jenia Grebennikov est un pur produit rennais. Cet été, avec les Bleus, il était de l’exploit retentissant français en décrochant une deuxième médaille d’or olympique consécutive. Élu meilleur libéro du tournoi, il revient sur le parcours des Bleus mais aussi sur les liens qu’il garde avec la capitale bretonne, très attaché à ses racines.

Avec un peu de recul, réalises-tu ce que tu viens d’accomplir avec ce titre de champion olympique conservé par les Bleus ?

Je réalise petit à petit. Être champion olympique une première fois, c’était déjà incroyable, mais le fait de réaliser un doublé, quelque part, nous rentrons dans l’histoire. Seuls l’URSS et les Etats-Unis l’avaient fait jusqu’ici. Vladimir Alekno, mon coach actuel au Zenith, légende du volley, m’a dit : « Tu as fait mieux que moi ». Le fait que lui me le dise, ça m’a marqué. J’ai deux médailles, mais surtout deux médailles d’or, c’est ça qui est dingue, et en plus d’affilée. Ça me rend fier. Je sens que ça a marqué les gens et ça a eu encore plus d’impact du fait que ça soit à Paris.

Vous arriviez en tant que champion olympique en titre. Comment avez-vous abordé la compétition ?

Quand nous sommes arrivés à Paris, nous nous sommes dit qu’il fallait au moins faire une médaille à la maison et ne pas repartir les mains vides. Certes, nous serions repartis avec des souvenirs, mais nous voulions une médaille. Il y avait moins de matchs qu’à Tokyo, mais à part l’Egypte, les 11 équipes pouvaient prétendre au titre. Le niveau est tellement homogène. Je pense que nous n’étions pas favoris pour les JO, plutôt un bon prétendant. Les favoris, c’étaient la Pologne et l’Italie. Nos résultats étaient davantage en dents de scie sur nos deux dernières années, mais ça s’est effacé au fil des matchs.

Mais contrairement à Tokyo, il y avait la présence du public, qui plus est derrière vous. Comment était l’ambiance pendant le tournoi ?

Nous avons tous été impressionnés pendant la poule et en quart de finale, quand nous sommes menés 2-0 contre l’Allemagne. Sans le public, nous ne revenons pas ! Quand tu sais que ta famille et que tes amis sont là, d’autant plus en France, tu te dis que tu ne peux pas lâcher. Le match contre l’Allemagne, c’est clairement un tournant. Le soir-même, nous nous sommes dit que nous ne voulions pas refaire ça et le prochain match, on y va direct.

Le quart de finale, c’est vraiment le match piège. Les Allemands ont très bien joué et ils n’avaient rien à perdre, contrairement à nous. Ce match-là nous a aidés et la communion qui a suivi avec le public était incroyable. Avant, tu savoures surtout au moment de l’échauffement et à l’entrée des joueurs. C’est vraiment cool et ça donne des frissons.

« Tu fais en sorte d’être prêt techniquement et physiquement, mais ça se prépare toute l’année »

Derrière, vous déroulez contre les deux favoris, l’Italie en demi-finale puis contre la Pologne en finale…

Contre l’Italie, nous avons rendu une copie parfaite et c’est notre meilleur match depuis deux ans. Nous avons été impeccables partout et nous sommes restés très agressifs. L’Allemagne a été une leçon sur le fait de ne pas lâcher un point et de rester unis. Nous savions que nous ne pouvions pas les laisser développer leur jeu sinon nous étions morts. Nous avons réussi à le reproduire un petit peu contre la Pologne, même si c’est compliqué de tenir ce rythme-là, aussi parce que c’est une finale.

C’est aussi la récompense du travail avec Andrea Giani depuis 2022. Comment se passe la collaboration ?

Ça se passe très bien et ça s’est fait assez naturellement. Pour ma part, je l’ai eu à Modène pendant un an et il a aussi entraîné Earvin Ngapeth. Il a respecté notre style de vie, mais cela ne l’empêche pas d’être très exigeant dans le volley. Il a aussi beaucoup entraîné en Italie.

C’est ce que la fédération voulait. Un entraineur plutôt jeune, qui adhère à notre cohésion de groupe, et lui a apporté son grain de folie et sa vision du jeu clinique. Et puis c’est un ancien joueur, il sait ce que nous vivons et les émotions par lesquelles nous passons. Nous avons vraiment bien bossé pour préparer ces Jeux Olympiques.

À titre personnel, tu sembles ne pas vieillir et tu as été élu meilleur libéro du tournoi…

J’ai quand-même des cheveux blancs (rires). Mais quand tu te prépares pour les JO, tu es tellement au taquet. Tu fais en sorte d’être prêt techniquement et physiquement, mais ça se prépare toute l’année. Il y a déjà beaucoup de compétitions avec l’équipe de France et bien sûr pendant la saison en club, donc tu es obligé d’être tout le temps prêt.

« Quand je suis revenu pour porter la flamme olympique, j’ai plein de souvenirs qui sont remontés et c’est un moment dont je me souviendrai toute ma vie. Quand je reviens à Rennes, c’est chez moi, c’est ma ville. »

Où en es-tu en club ?

Je suis au Zenith Saint-Pétersbourg et j’y débute ma quatrième saison. Je viens de resigner un an. Je n’ai pas encore gagné de trophée là-bas et l’objectif est d’en gagner un. Nous avons eu beaucoup de blessures ces trois dernières années et je ne partirai pas tant que je n’ai pas gagné. J’aimerais bien revenir en France ou en Italie ensuite. Je me posais déjà la question l’année dernière. Il y avait des projets, mais nous verrons par la suite.

Gardes-tu un œil sur tes premiers clubs rennais ?

Tout à fait. J’ai été formé au Cercle Paul Bert car mon père était là-bas quand il est arrivé de Russie. Le REC aussi bien sûr. Je regarde les résultats et j’ai pas mal suivi notamment sous Quentin Marion, car c’était mon passeur quand j’évoluais à Rennes. Nous sommes toujours en contact. J’espère qu’ils pourront remonter un jour en Première division parce qu’il y avait un bel engouement quand j’y étais. Rennes est une ville sportive et quand je marche dans la rue, on me reconnaît.

J’ai tous mes souvenirs là-bas. Aujourd’hui, tu me lâches n’importe où dans Rennes, je sais où je suis. Je connais par cœur. Quand je suis revenu pour porter la flamme olympique, j’avais juste l’impression que c’était un peu plus petit, mais j’ai plein de souvenirs qui sont remontés et c’est un moment dont je me souviendrai toute ma vie. Quand je reviens à Rennes, c’est chez moi, c’est ma ville.

As-tu envisagé de revenir un jour au REC Volley ?

Avec Raphaël (Corre), nous nous sommes posé la question de savoir si nous pouvions aider et nous avons proposé notre aide. Il faut juste voir comment nous pouvons aider. Nous prenons notre temps et nous réfléchissons. Je pense que notre aide pourrait apporter quelque chose et même moi, ça me tient à cœur. J’ai envie de revoir le REC à haut niveau, mais le chemin est long. Nous avons envie de faire quelque chose pour le club, nous lui devons aussi.

Signature du journaliste.