Alors que l’équipe de France va truster le devant de la scène handball en janvier, l’heure est au premier bilan à mi-parcours en Liqui Moly Starligue pour les Irréductibles. Entre enseignements encourageants et positifs mais aussi réelles inquiétudes, le contraste domine dans une saison où tout reste néanmoins à faire.
La chose est assez rare dans le monde du hand, en comparaison au voisin football. Du côté de Saran, malgré 14 ans et trois montées à la tête de l’équipe, Fabien Courtial n’a pas résisté aux défaites à répétition concédées malgré de gros investissements. L’an passé, c’est à Nîmes que pareille aventure était arrivée… A Cesson, hors de question de penser à l’identique, tant dans le recrutement onéreux que dans la solution de virer un coach, fusible facile en cas de mauvaise série. Dans l’histoire du club, seul Christian Gaudin avait été prié de plier bagage en cours de saison. En dehors de cas particulier, à Cesson, en principe, on gagne ensemble, on perd ensemble. Stéphane Clémenceau le sait, avec le trio Leriche-Lemaire-Minel, il tient des garçons de grande qualité, complémentaires, qui tirent le plus souvent la quintessence d’un groupe au fait de ses possibilités, dans le bon comme dans le moins bon. Des garçons d’avenir aussi, que ce soit sur le plan personnel ou dans le projet cessonnais. Et ce ne sont pas des résultats moins bons cette année qui vont remettre en cause l’excellent travail réalisé depuis trois ans et demi. Du moins espérons-le.
« Ne pas se satisfaire de ce classement, même s’il reflète notre première partie de saison »
13ème du championnat sur le plan économique, la faute notamment à une location de salle coûteuse mais indispensable au développement du club, le CRMHB occupe aussi ce rang sportivement à mi-saison : « On ne doit évidemment pas s’en satisfaire mais aussi admettre qu’il reflète notre première partie de saison, où nous avons manqué de maîtrise pour prétendre à mieux », estime Sébastien Leriche. En Liqui Moly, aujourd’hui, plus de place pour les « petits » ou les faibles, la bataille fait rage et tout le monde, à l’exception du PSG, peut tomber ou repartir avec un paquet de bleus partout. Quoi qu’on en dise, même en refaisant, favorablement si possible, tous les matchs, Cesson est à sa place du moment M, fin 2023. L’anomalie, contrairement aux idées reçues, concerne plus les deux saisons précédentes bouclées aux portes du top 8 que cette saison où la lutte semble promise aux Cessonnais pour éviter l’une des deux dernières places. A cela, strictement rien d’infamant, surtout en contextualisant la ligne de départ de la saison : « En début de saison, de très nombreuses équipes ont annoncé des ambitions européennes, se sont renforcées, témoigne Sébastien Leriche. On savait qu’il n’y aurait pas de place pour tout le monde et nous nous sommes bien gardés d’annoncer quoi que ce soit de notre côté. Ce championnat est de plus en plus relevé et dense, alors ce combat, nous y étions préparés. Quand nous disions que les performances des années précédentes étaient de vraies performances, on le vérifie d’autant plus aujourd’hui. »
« Les équipes qui marquent le plus sont celles qui gagnent, c’est ça, le handball de 2023. »
Cette saison, Cesson n’a jamais été très loin, ni devant, ni derrière. Les coéquipiers de Sylvain Hochet sont ainsi parvenus à battre trois adversaires directs, Saran, Dijon et Ivry, et se sont offert un bel exploit loin de la Glaz Arena à Nîmes. Quatre victoires, huit points et pour le reste, onze revers… La balance est largement déficitaire, incontestablement, quand à pareille époque, la saison passée, le CRMHB comptait 15 points (7 victoires, 1 nul et 7 défaites) soit près du double de points. Parmi ces défaites, différentes saveurs et analyses, forcément. Il y a celles qui ne souffrent aucune contestation, à Paris et Nantes, face à des adversaires plus forts, ou contre Montpellier à la maison. Il y a celles qui agacent, tant tous les ingrédients n’y étaient pas, comme face à Toulouse et Dunkerque à domicile, ou à Créteil puis évidemment, celles laissant de vrais regrets à l’image des revers à la maison contre Chartres et Chambéry, ou encore à Saint-Raphaël, Limoges ou Aix.
De tous ces matchs ressortent tout de même plusieurs facteurs communs. D’abord, ce groupe-là doit être au complet pour avoir sa place à table. Les blessures successives cette saison de Daniel Mosindi, Hakon Ekren, Romain et Mathéo Briffe, récemment Milos Mocevic ou le traumatisme crânien d’Arnaud Tabarand ont eu, tour à tour, du poids dans les performances et rotations de l’équipe : « C’est indéniable, bien sûr, toutes ces absences ont pesé mais ont surtout fait que ce groupe n’a que trop peu d’expérience collective pour s’y réfugier quand cela est indispensable. Daniel, par exemple, était fondamental dans notre plan de jeu et n’a démarré avec nous que mi-novembre. La grosse blessure d’Arnaud l’a évidemment pénalisé, et je ne compte pas le nombre de fois où nous avons été diminués avec des joueurs présents mais inaptes sur le banc. »
Avec un groupe jamais au complet, difficile de rivaliser sur 60 minutes et d’affiner le nouveau système de jeu décidé l’été dernier, avec un jeu volontairement plus tourné vers l’attaque : « Les équipes qui marquent le plus sont celles qui gagnent, c’est ça, le handball de 2023, martèle Sébastien Leriche. On le constate, ça va de plus en plus vite, les possessions sont de moins en moins longues et un gardien peut parfaitement être à 30% d’arrêts en encaissant 35 buts, c’est mathématique. Il faut ainsi s’adapter car désormais, les 25-24 deviennent rare. Par exemple, Saint-Raphaël est la dernière défense du championnat aujourd’hui et tient pourtant son meilleur classement… »
Démonstration brillante pour illustrer un championnat de dingue où chaque temps faible doit être compensé par un temps fort. Là, peut-être, où le bât blesse. Cesson s’expose plus et résiste forcément moins, faute de solutions mais aussi de pouvoir enchaîner à haute intensité match après match : « Dans notre plan de jeu, le but est aussi de freiner ces attaques rapides, casser les premiers temps mais cela demande beaucoup d’énergie, et on l’a souvent payé. Cette année, nos temps morts sont moins longs, moins importants mais on ne parvient pas encore à se détacher ou à poser de gros temps forts. Il faudra progresser là-dessus. En point positif, à Aix, par exemple, on a marqué plus de 30 buts. »
« On a des joueurs d’expérience mais nous manquons de ce vécu collectif qui doit nous aider. Janvier sera capital pour bosser et être d’attaque, dès la reprise en février. »
Changer de style, peut-être d’identité comme l’ont fait dans un passé récent Dunkerque et Saint-Raphaël, jadis modèles de défenses rugueuses et aujourd’hui dans un tout autre style, prend du temps et la seconde partie de saison dira si Cesson parvient à poursuivre sa difficile mue. Avec un calendrier compliqué et désormais, le combat pour le maintien en fil rouge, le CRMHB sait à quoi s’attendre : « Il va falloir passer en mode commando. Je l’ai dit au staff : quand une saison s’engage comme la nôtre a démarré, avec les blessures et autres coups durs, on sait que ce sera compliqué jusqu’au bout, confirme Sébastien Leriche. Alors nous allons nous retrousser les manches, continuer de bosser dur et continuer de garder confiance en nos capacités. Je reste confiant et optimiste car jamais, cette saison, nous n’avons été largués ou à la rue, à une ou deux exceptions près. Nous ne sommes pas loin, les joueurs ont l’état d’esprit et l’envie de gagner, ensemble. Ça s’est parfois joué à rien mais c’est à nous de faire tomber la pièce du bon côté. Pour cela, il va falloir cesser de banaliser l’erreur, refuser cela. Nous avons des joueurs d’expérience mais nous manquons de ce vécu collectif qui doit nous aider. Janvier sera capital pour bosser collectivement et être d’attaque, dès la reprise face à Nîmes en février. »
Ni largués, à seulement deux points du dixième, Chartres, ni à l’abri, avec un petit point d’avance sur la zone rouge, Cesson, plutôt tranquille sur les deux dernières phases retour en 2022 et 2023, va devoir réapprendre à souffrir, devenir clinique dans les moments qui comptent et aussi, ne pas regarder les autres : « Ce que feront les uns et les autres, ce n’est pas mon problème. Nous avons déjà à faire avec notre équipe, qui doit garder confiance en ses qualités. Ce groupe n’en manque pas et je suis convaincu qu’il peut faire beaucoup mieux, même si personne ne triche et tout le monde donne tout. Aujourd’hui, je pense qu’il nous manque bien quatre points par rapport à ce que nous avons produit jusqu’ici. Gagnons en exigence, refusons de banaliser les erreurs et allons-y ! Le maintien sera accroché, personne ne lâchera, nous y compris ! »
Ce sera probablement avec un nouveau gardien, quête actuelle pour les dirigeants du CRMHB, en remplacement de Milos Mocevic, out pour la saison. Une obligation quand on sait la blessure et la récupération difficile d’Arnaud Tabarand, qui de plus, partira en juin prochain, et la jeunesse du prometteur Yann Pichon, à qui doit être laissé le temps de grandir. Une perspective valant également pour un collectif encore en mutation, qui devra lui aussi muer en 2024 pour retrouver sérénité et efficacité et continuer de (se) régaler dans une Liqui Moly Starligue qui n’en finit plus de s’enflammer et de progresser. Aux Cessonnais de rester de « Glaz » et d’y maintenir leur place.