Pour sa première saison au sein du Word Tour UCI, la team Arkea-Samsic compte bien assurer son maintien avec humilité, panache et détermination. Le staff de l’unique formation bretonne du circuit travaille dur en ce sens à l’image d’Yvon Caër, l’un de ses directeurs sportifs. Entretien sur un premier trimestre enrichissant dans la cour des grands !
A l’issue du premier trimestre de la saison, comment jugez-vous le début de saison de l’équipe, promue à ce niveau ?
Nous travaillons dur, chaque jour, avec les adaptations et ajustement nécessaires à tous les niveaux du fait de notre montée en World Tour. Si nous participions déjà à de nombreuses courses de la catégorie l’an passé, la différence réside désormais dans le fait que nous ne pouvons plus choisir telle ou telle épreuve mais avons l’obligation de participer à toutes, avec nos meilleurs éléments. Cette nouvelle configuration nous contraint à faire l’impasse sur des courses « secondaires » où nous performions auparavant. Il a fallu être en Australie en janvier, nous prenons part au Tour du Pays Basque, à toutes les Classiques belges, au Tirreno Adriatico. Tout cela entraîne une gestion très différente de nos coureurs.
Comment celle-ci s’orchestre-t-elle ?
Il y a une plus grosse rotation au sein de l’effectif, forcément, avec des coureurs régulièrement amenés à enchaîner les courses tous les trois jours. Avant, des plages de repos ou de préparation pouvaient être mises en place mais désormais, le fonctionnement est différent. Il est encore plus exigeant, il nous oblige à faire des choix et des arbitrages. L’an dernier, par exemple, Warren Barguil avait remporté le Prix Indurain mais cette année il n’a pu remettre son titre en jeu car il était en stage en altitude en vue d’objectifs fixés pour les mois d’avril et de mai. C’est un choix sportif. L’objectif néanmoins reste cependant le même, gagner avant tout des courses car c’est l’essence même du sport, puis prendre un maximum de points avec notre objectif à long terme sur trois ans de nous maintenir au sein du World Tour UCI.
Kévin Vauquelin a frappé fort en remportant le Tour du Haut-Var. Vous attendiez-vous à cette victoire et le début de saison répond-il aux attentes ?
Pour ce qui est de Kévin, c’est un jeune coureur sur lequel nous misons, bien sûr, et que nous devons continuer d’amener à maturité. Avec lui, mais aussi l’ensemble de notre groupe, nous avons misé sur la jeunesse pour construire sur la durée. La plupart étaient déjà là avec nous l’an passé et sont aujourd’hui prêts à relever le défi World Tour UCI. Le départ de Nairo Quintana n’a pas été comblé par une arrivée de même notoriété mais cela laisse aussi la place aux ambitieux. Si nous n’avons pas le temps d’attendre et qu’il nous faudra d’emblée des points et la victoire de Kévin est une excellente surprise, non pas au regard de ses capacités mais sur son adaptation à un parcours accidenté sans chrono, alors qu’il excelle en la matière. Il a aussi su assumer son rôle de leader le lendemain de sa victoire et aller au bout. C’est une performance très intéressante, qui donne de vraies perspectives pour la suite.
D’autant plus qu’il termine 2e sur la route Adélie à Vitré, devant son coéquipier Louis Barré…
Nous sommes heureux d’avoir placé deux de nos garçons sur le podium mais sincèrement, Kévin était déçu de terminer deuxième. Il a fait un choix stratégique non payant et il le sait, d’où son amertume de ne pas avoir gagné. Pour autant, le fait d’avoir osé prendre une décision, un risque, démontre aussi une vraie force de caractère, une personnalité qui lui serviront sans le moindre doute pour la suite. Je tiens aussi à souligner la course exemplaire de Louis Barré, qui n’a que 22 ans et progresse lui aussi à grande vitesse.
Début mai, l’équipe prendra part pour la première fois au Giro. Comment préparez-vous ce premier rendez-vous avec la Grande Botte ?
Forcément, cette première a une saveur particulière. C’est un grand tour où nous aurons des ambitions et où, à la différence du Tour de France, la course est plus ouverte aux surprises et aux victoires inattendues. Nous viserons une victoire d’étape avec un parcours où nous aurons des opportunités. Découvrir ce monument du cyclisme sera un grand moment .
L’occasion aussi pour Warren Barguil de briller ?
Si nous n’avons pas encore officiellement annoncé les coureurs retenus, il est quasiment acquis que Warren devrait en faire partie. Il se prépare pour cela actuellement et sera notre atout numéro 1. Il n’a jamais couru le Giro et ambitionne de faire partie du cercle très restreint des coureurs ayant gagné sur les trois grands tours. Ce serait une immense performance et nous allons tout mettre en œuvre pour qu’elle puisse se réaliser et rejaillir positivement sur toute l’équipe.
Viendra ensuite le Tour de France, où faire aussi bien que la saison passée serait déjà une grande performance ! L’objectif sera-t-il, comme l’an passé, de remporter une première étape ?
C’est le sens de l’histoire, nous nous approchons, année après année, nous sommes de plus en plus proches. Gagner une étape sur un grand tour, et plus encore sur le Tour de France, serait une formidable récompense pour tout le travail accompli, mais pas une fin en soi.
Un mot sur Nacer Bouhanni, revenu sur les routes après de graves chutes. Où en est-il aujourd’hui ?
Avec tout ce qu’il a subi, des chutes graves, la reconstruction n’est pas évidente et il travaille dur et bien pour retrouver son meilleur niveau. Il faut se reconstruire, retrouver la confiance et sa logique de sniper. Il va avoir l’occasion de briller sur le Pays de la Loire Région Tour à venir avec le Tour de France, sans doute, en objectif à terme. Nous avons choisi de continuer de miser sur lui, de l’accompagner et nous sommes convaincus que la victoire appelle la victoire et qu’il la retrouvera bientôt.
Pour performer sur l’ensemble de la saison, l’équipe a été construite sur la base d’un équilibre expérience-jeunesse, avec des garçons que vous connaissez bien. Etait-ce un choix délibéré ?
C’est le cas. Aujourd’hui, il est indispensable d’avoir une osmose et une vraie belle ambiance entre les jeunes éléments les plus prometteurs et des garçons plus expérimentés, avec un gros vécu, capable d’encadrer et d’accompagner notre jeunesse. Des garçons comme Maxime Bouet, Laurent Pichon ou Anthony Delaplace sont essentiels en ce sens et transmettent les valeurs de l’équipe de par leur maturité ou leur nombre d’années de présence dans nos rangs. Nos jeunes ont beaucoup de chance de pouvoir s’appuyer sur eux. Cet attelage jeunesse-expérience lié à l’identité bretonne de l’équipe, où nous avons tenu à conserver une certaine convivialité et un bien vivre ensemble, seront évidemment des atouts sur la durée.