Si la carrière d’un sportif est faite de sacrifices, elle s’accompagne aussi de choix. Entre déplacements réguliers pour les matches, changements de club et donc, changements de vie, le quotidien est chargé. Rarement mise en lumière, la parole des compagnes de joueurs et joueuses est pourtant déterminante dans la prise de décisions des sportif(ve)s. Pour cette série, nous partons à la rencontre de la compagne de « Pippo », alias Philippe Tuitoga, capitaine du REC Volley.
Peux-tu te présenter et nous dire comment as-tu rencontré Pippo ?
Je suis originaire de Nouvelle-Aquitaine, aujourd’hui cadre dans la fonction publique, et je suis issue d’une famille de sportifs, mais plutôt orientée vers le tennis. À l’âge de 15 ans, j’ai eu envie de faire un sport collectif et je me suis tournée vers le volley. Depuis ce moment, je n’ai plus pratiqué que ce sport et je joue maintenant au CPB. C’est d’ailleurs grâce au volley que j’ai fait mes plus belles rencontres. Antoine Brizard est l’un de mes meilleurs amis et c’est en partie grâce à lui que j’ai rencontré Pippo. Je suis allée voir jouer Antoine et il était à cette période avec Pippo au Paris Volley et c’est ainsi que nous nous sommes connus, avec Pippo !
Comment vit-on l’exposition médiatique de son conjoint ?
Nous avons la chance d’être dans un sport où celle-ci n’est pas encore très élevée, donc c’est relatif. Il y a parfois des critiques, bien sûr, mais elles sont moindres. Là où c’est plus compliqué, c’est sur les réseaux sociaux où tout est exacerbé ou amplifié. Je trouve parfois que la presse prend aussi trop parti. Il faut réussir à prendre du recul sur tout ça. Cependant, je trouve que la critique n’est pas dérangeante quand elle est justifiée et c’est plus difficile à digérer quand il n’y a pas de fondements à ces critiques.
Est-ce facile d’en faire abstraction ?
Globalement oui, car tu apprends à vite basculer sur autre chose. Encore une fois, dans le volley, il n’y en a pas beaucoup donc ça permet de vivre cela tranquillement. J’imagine les autres sports où il y a des enjeux beaucoup plus forts, notamment financiers et là, ça doit être difficile. Sincèrement, j’arrêterais d’aller sur certains réseaux sociaux s’il y avait plus de médiatisation dans le volley. Heureusement, nous sommes plutôt épargnés dans ce sport.
Philippe est un joueur reconnu, qui a été international français et les fantasmes existent sur ce statut, où l’on imagine vite les excès des soirées privées, de la vie grand train. Qu’en-est-il vraiment ?
Dans le volley, nous en sommes loin et il n’y a pas du tout ce côté paillettes. Certes, il y a des moments sympas, entre les rencontres avec les partenaires ou celles avec les bénévoles, mais c’est surtout un rythme de vie avec beaucoup de contraintes. Ça demande beaucoup d’organisation. Il y a très peu de place pour les moments en famille ou les week-ends de libre. Surtout pour le sportif d’ailleurs. Le physique est l’outil de travail principal d’un athlète et mis à part les moments consacrés à la récupération, il y a assez peu de temps libre à côté et bien s’organiser devient primordial.
Comment avez-vous géré la transition avec la Ligue B ?
Honnêtement, pour nous ça n’a pas changé grand-chose. Pippo, avec son expérience, a une place importante au REC Volley et est un joueur majeur de l’effectif. Nous n’avons pas trop ressenti cette baisse d’exposition, mais c’est aussi dû au fait que nous soyons moins exposés tout court dans ce sport. Au-delà du volley, car je pense que c’est transposable sur tous les autres sports de haut niveau, je pense que le plus difficile, c’est la gestion et le passage à l’après-carrière de sportif. Pour l’athlète lui-même évidemment, mais aussi pour la vie à deux. Les repères changent et l’organisation n’est plus la même.
Comment gères-tu la période des transferts ?
C’est toujours un moment très stressant. Tu ne sais jamais où tu vas te trouver d’une année sur l’autre et dans quelle ville tu seras. Nous échangeons beaucoup ensemble des propositions, et nous nous sommes toujours dit que nous ne ferions pas de sacrifices. Des concessions oui, mais pas de sacrifices. J’ai toujours privilégié la carrière de Pippo, mais en pensant aussi à la mienne et nous en discutons régulièrement. Au début, nous étions à distance, le temps que je finisse mes études, et lors de notre venue à Rennes, c’était une mutation choisie dans mon domaine professionnel, en plus de l’opportunité du REC. Dans mon travail, il y a des cycles de trois ans et là, j’arrive au bout de ces trois ans. Ça ne veut pas dire que je vais partir mais s’il y a une opportunité, c’est possible d’y réfléchir. C’est aussi ma manière de le soutenir et de lui montrer que je suis mobile.
Existe-t-il une évolution des envies ou des besoins, au fur et à mesure de vos carrières respectives ?
Le sportif peut avoir envie de connaître d’autres clubs, mais ça dépend surtout des propositions. Ça peut dépendre du projet ou de l’entraîneur par exemple. Pour ma part, du moment que le choix du club est cohérent avec son envie et que de mon côté je m’y retrouve, il n’y a pas de frein particulier. Nous avons un besoin de stabilité, mais pas forcément géographique. Je parlerais plutôt d’un endroit repère, comme l’achat d’un bien immobilier, où nous pouvons nous retrouver. C’est plus facile pour s’engager et pour passer du temps tous les deux.
Tu es souvent aux matches du REC Volley. Est-ce important pour toi d’y être présente ?
Oui, complétement. Déjà parce que c’est un sport que j’adore et, aussi, parce que c’est un plaisir d’assister aux matches. De plus, je revois aussi plein de copains que nous avons connus avec Pippo quand il était dans d’autres clubs. C’est aussi ma manière de partager cette passion avec lui et sincèrement, je ne me vois pas faire autrement.
Concernant l’après-carrière de Pippo, comment préparez-vous un possible changement de quotidien ?
Nous en parlons déjà pas mal car ça arrive et j’ai toujours dit que c’était un moment qui se préparait. C’est se dire que nous passons à autre chose, mais je sens que Pippo est encore bien ancré dans le volley. C’est vraiment un passage important et je pense que les clubs devraient accompagner les sportifs pour l’après-carrière. Permettre aux athlètes de se projeter et de leur faire comprendre que toutes les qualités acquises pendant leur carrière peuvent leur être utiles pour la suite ailleurs que sur le terrain.