Battu à deux reprises en huitièmes de finale par Arsenal (2019) puis Leicester (2022), le Stade Rennais revient une troisième fois en cinq saisons consécutives s’inviter au printemps européen, avec appétit et détermination. Celle, notamment, de s’offrir cette épopée tant attendue, si proche. Et si cette année était la bonne ? Début de réponse dès ce mois-ci, face au Shaktar.
Si les compétitions domestiques sont bien souvent l’écrin de l’histoire d’un club, les plus belles émotions et souvenirs vivaces, qui restent 20, 30 ou 50 ans plus tard, émanent souvent de la scène continentale. Bastia eu son épopée en 1978, Bordeaux se remémore encore le Milan AC, en quarts de finale de coupe de l’UEFA comme Lens sa victoire face à Arsenal. Même Strasbourg, qui parvint à battre Liverpool ou Auxerre face à Dortmund, ont eu leur « Prime européen », de ceux qui marquent au fer rouge. Et on ne parle pas là de Marseille, Paris, Saint-Etienne, Monaco et même Reims, ayant atteint régulièrement atteint des demies voire des finales européennes. Certes Rennes peut mentionner à ce jour Arsenal, le Bétis Séville ou encore Leicester dans les moments d’histoire écrits pour l’éternité mais deux des trois cités se sont soldés par des éliminations chargées en regrets et en amertume. Ayant récemment obtenu son rond de serviette à la table de festivités européennes, avec cinq participations à la grande messe du foot continental, série en cours, le SRFC doit passer la seconde et réussir à s’arracher, au-delà de la déception ou du sentiment d’avoir été tout proche, d’avoir fait le max. Fini l’invité sympathique, attisant la curiosité mais trop poli pour bousculer les habitués du lieu. Qui peut le moins peut le mieux et cette saison, Bruno Genesio et ses hommes n’ont aucune raison de ne pas s’autoriser la folie, l’aventure et cette folle histoire dont rêve tant le peuple rennais.
Si qualification, retrouvailles en vue en huitièmes de finale !
Pour ce faire, il faudra d’abord se défaire du Shaktar Donetsk dans des barrages qui envoient du lourd en vue des huitièmes de finale. Une fois le sujet évacué de savoir si le club ukrainien devrait, ou non, être « mobilisé » pour une compétition sportive, il suffit de regarder le palmarès et le nombre d’internationaux ukrainiens présents dans les rangs des « Tangos » pour comprendre que l’affaire n’est pas si simple que certains aimeraient le laisser croire. Si aucune star internationale n’évolue à ce jour au Shaktar, sa culture européenne, son habitude du haut niveau et un supplément d’âme évident pour jouer au foot dans un tel contexte en font un adversaire forcément redoutable. Jouant hors de chez lui, à Varsovie, en pleine trêve hivernale, avec en plus le départ au mercato d’hiver de son meilleur joueur Mudryk à Chelsea, l’ancien club de Brandao n’est pas bien fringant sur le papier, ce qui le rend encore plus dangereux. Le Stade Rennais, cependant, a prouvé contre Fenerbahçe, malgré les issues décevantes, qu’il peut aujourd’hui rivaliser les yeux dans les yeux avec ce type de club et reste en capacité de passer ce tour. Du moins, les attentes suscitées par le jeu proposé depuis un an et demi et l’avenir international potentiel prêtés à certains joueurs font du club breton un légitime candidat à la qualification, avec les exigences que cela incombe. Celle-ci devra se faire sans Martin Terrier et Xeka, mais aussi sans Lorenz Assignon et, probablement, Arnaud Kalimuendo, qui se remettra de sa blessure musculaire contractée contre le PSG mais avec Karl Toko-Ekambi, habitué de joutes européennes (21 matchs, 9 buts). Résister à Varsovie, vaincre au Roazhon Park pour rejoindre les huitièmes où du bon monde et de sacrées affiches en perspectives attendent les coéquipiers d’ Hamari Traoré. Abonné aux anglais chaque fois qu’il atteint ce stade de la compétition, le SRFC pourrait alors retrouver Arsenal, actuel leader impressionnant de Premier League ou Manchester United, si celui-ci se débarrasse de…Barcelone, où deux anciens rennais, Ousmane Dembelé et Raphina, seraient sans doute heureux de faire un voyage en Bretagne. D’autres retrouvailles sont possibles, avec le Bétis Séville, Fenerbahçe déjà qualifiés ou avec la Juventus, si celle-ci se défait du redoutable FC Nantes, ou Séville, également engagé en barrage face au PSV. Du prestige, des émotions mais aussi des sueurs froides en perspectives. L’Union Saint-Gilloise aussi potentiellement au programme, Fribourg ou Ferencvaros, pour s’imaginer découvrir le top 8 final.
« Rennes doit écrire son Europe »
Pour grandir, inscrire des moments uniques dans son histoire encore vierge d’un parcours européen s’approchant des cimes d’une finale, Bruno Genesio le sait, le moment est peut-être là… Désormais mature et vrai postulant au podium sur le territoire national, Rennes doit aller plus loin et plus haut en Europe pour passer un cap, tant dans le récit de son histoire que dans son attractivité, au moment où la Ligue 1 a rarement proposé un top 5 si séduisant et performant. Les exploits restent et se comptent, parfois, en déformant la réalité selon l’assistance mais pour cela, encore doivent-ils exister, faire vibrer ceux qui ont la chance de les vivre et le devoir de les transmettre, demain, après-demain ou bien plus tard. Si certaines défaites ou éliminations restent aussi, avec leur dose trop corsée d’amertume, les victoires transportent bien plus loin et bien plus haut. Rennes doit écrire son « Europe » à lui, devenir le premier club breton à intégrer des quarts de finale, et plus si affinités, ne plus être réduit au sobriquet de très bon club de Ligue 1. Les efforts de ces dernières années sont proches d’offrir ce grand frisson, cette folie que réclame tout un Roazhon Park conscient de sa chance mais désireux de « kiffer » encore plus à son tour, comme tant d’autres publics français par le passé. Après Donetsk, messieurs, plus de limites ni de complexe quelconque, quelle que soit l’opposition, place à la folie. Celle qui fait du foot une culture à part, un héritage à partager sans modération !