A la tête de la deuxième défense du championnat derrière Dunkerque, malgré les 45 buts encaissés à Paris, Jozé Baznik vit sa « meilleure vie » en terres cessonnaise. Tout sauf une surprise pour cet acharné de son travail, généreux et excellent coéquipier, récompensé de ses énormes prestations au CRMHB par ses premiers appels en sélection de Slovénie.
« Un gardien étranger, il signe en France, il est forcément super fort (simple), Les gardiens super forts sont ceux qui arrêtent des balles de tennis (Baznik). » Si le rappeur tendance Orelsan veut remixer son tube, nous pouvons lui fournir les textes, inspirés du patronyme mais surtout du talent du gardien Slovène du CRMHB ! La simplicité résume aussi parfaitement l’homme, accessible, imperméable à la flatterie excessive et bien plus intéressé par le jeu et l’idée de progresser, encore et encore. Un mental de fer, forgé à force de travail et de passion, deux gènes inscrits dans l’ADN du dernier rempart breton.
Toujours enclin à embraser la Glaz Arena avec de grands mouvements de bras et des cris impressionnants, parfaits pour haranguer une foule qui aime ces hommes-là, Jozé Baznik se défend au prime abord d’être un showman ou un comédien. Non, c’est tout sauf ça…Lui vit son match : « Je joue d’abord pour moi, pour ce plaisir que ce sport me procure depuis petit, ensuite pour mes coéquipiers, que je dois aider à 200 %, porter, rassurer et mettre dans les meilleures conditions, et enfin, pour le public, qui joue un rôle précieux. On le voit encore plus après une année dans les salles vides…»
Car c’est dans ce contexte si particulier que le gardien arrivé d’Aix, après un prêt à Nîmes, a conquis staff, dirigeants et supporters, par écran interposés, du CRMHB, prenant magnifiquement le relais de l’éphémère Rok Zaponsek. Avant de réussir la saison actuelle qu’est la sienne, le natif de Dobova, petite commune de 3.000 âmes de la région de Styrie, située près de la frontière croate, s’est entiché très tôt de la petite balle pégueuse au sein d’une famille passionnée de hand : « J’ai eu le coup de cœur, ou le déclic, au choix, quand Celje a remporté la Ligue des Champions, en 2004. Inoubliable ! »
Cesson peut s’en remettre au « Baznik Instinct »
Du papa, président d’un club local qu’il a mené en Première division, à deux petits frères ayant emboité le pas du hand, le chemin s’est tracé de lui-même. Si ses frangins ne jouaient pas « plus que cela au hand avec lui », Jozé n’a pas attendu bien longtemps pour trouver des camarades de jeu ! En effet, il débute à 15 ans dans le club local, avec les grands ! Papa président, était-ce là un petit cadeau ? « Pas vraiment ! Je jouais car le club s’appuyait sur ses jeunes et avait peu de moyens. Ce n’était pas simple d’avoir mon père président et comme j’étais ado, je ne l’écoutais pas ou j’étais souvent en opposition avec lui. J’ai heureusement depuis appris à l’écouter, et pas qu’un peu. Je comprends aujourd’hui combien tout ce qu’il me disait et me dit encore est précieux. » Rapidement, les qualités du jeune portier ne passent pas inaperçues et Jozé rejoint le PAUC pour palier la blessure de Wesley Pardin. C’est parti pour un pari de six mois.
Là-bas, il devient « Pépé », devenu son prénom Starligue. Sur le terrain, la première saison se passe plutôt bien et l’aventure se prolonge la saison suivante. Par la suite, les choses se compliquent et la concurrence envoie un « Yogué » – la bonne prononciation – sur la touche puis en prêt à Nîmes. Deux épreuves constructives : « Au début, à Aix, ce fut top mais par la suite, plus compliqué. J’ai découvert ensuite Nîmes, un club de très haut niveau, où nous nous partagions le temps de jeu avec Rémy Desbonnet. Franck Maurice voulait me garder, il y avait une alternance match après match mais je voulais m’imposer, gagner ma place de n°1… »
Cesson toque alors à la porte pour proposer au joueur un vrai et beau challenge, s’imposer comme titulaire, en concurrence avec son compatriote Zaponsek : « Pour beaucoup, le fait que l’on soit tous les deux slovènes incluait forcément que l’on devienne ami, que l’on soit proche. C’est un peu simpliste…» Le flop de son compatriote précipite néanmoins son destin sur le devant de la scène, avec un déclencheur : « Sébastien Leriche et les dirigeants m’ont dit qu’ils ne recruteraient pas de gardien à mi-saison, qu’ils avaient confiance en moi. Cela a décuplé ma motivation, j’ai voulu leur montrer qu’ils avaient raison de me faire confiance. » Et les Cessonnais ne vont pas être déçus…
Jozé Baznik, c’est au-delà d’une discipline et d’un style bien à lui, ultra efficace en Liqui Moly Starligue, un bourreau de travail : « Je ne sais pas combien de balles de tennis je lui ai envoyées aux entraînements, je finissais presque plus crevé que lui ! », témoigne Thibault Minel : « C’est un monstre sur le plan de la discipline, de l’investissement personnel. Il s’entraîne comme s’il était en plein match, s’arrache sur tous les ballons, est attentif à chaque aspect de son poste. »
Son coéquipier arrivé cet été au club, Robin Molinié, confirme : « Pépé atteint un niveau énorme, semaine après semaine. Nous ne sommes peut-être qu’au début. C’est un super mec, généreux, toujours disponible qui ne lâche rien. » Preuve supplémentaire s’il en était de la rigueur du portier slovène, celui-ci, en plus des séances vidéos du club, s’est adjugé l’aide en visio-vidéo de Marko Markic, basé en Allemagne, qui collabore également avec Nicola Portner ou Vincent Gérard.
Un approfondissement qui illustre la passion le liant à son métier même si la notion de labeur n’est jamais bien éloignée : « Tout ce que l’on a, quand on sort de Slovénie, qui est petit pays, on l’obtient à la sueur de notre front. J’ai toujours besoin d’approfondir, d’améliorer ce qui ne va pas… J’ai encore des progrès à faire même si je suis bien sûr très heureux de notre début de saison, collectivement et individuellement. »
Avec 94 arrêts, soit 8,55 par match à 30,92 %, ce qui en fait le cinquième gardien au classement du genre, on peut parler d’un « Baznik Instinct » qui a déjà fait gagner comme face à Toulouse avec un arrêt sur le buzzer ou en écœurant les attaquants adverses comme face Montpellier ou Limoges (16 et 13 arrêts).
Après avoir conquis le cœur du peuple cessonnais, dont il est l’un des chouchous, avec des banderoles à son nom, bien méritées, « Yogué » en veut encore et devrait encore épater le microcosme LNH. Récemment devenu international, «Pépé », 28 ans, vit son meilleur handball et ne compte pas s’arrêter là, pour faire durer le plus longtemps la belle série à domicile et la saison des Irréductibles. Sans exigence dans le travail, le plaisir n’est rien. Simple, Baznik.