Mikaele Tuugahala et Vincent Bréhonnet sont les deux les coachs adjoints de Kevin Courties, manager général, au Rennes Etudiants Club de Rugby. De leur rôle sur et en dehors du terrain en passant par l’évolution de leur sport au fil des années et leur passé de joueur, les deux récistes se livrent sur leur quotidien.
Pouvez-vous nous expliquer quel est votre rôle au sein du staff du REC ?
VINCENT : Kevin m’a confié la partie offensive. Je suis en charge de l’animation et des trois quarts. Je m’en occupe lors des entraînements mais aussi pendant les matchs, par exemple lorsque que nous faisons des retours à la mi-temps. Nous pouvons avoir parfois une vision différente, même si cela reste proche, de ce qui se passe sur le terrain donc nous échangeons beaucoup. Nous avons aussi un oeil dans la tribune avec Jordy qui analyse le match avec plus de hauteur. Il nous apporte également sa vision et nous adaptons le coaching pour la seconde période. Le plus gros du management se fait à ce moment-là.
MIKAELE : Je suis entraîneur des avants, plus spécialement sur la mêlée et les mauls. J’interviens sur le collectif en étant responsable de la défense. Après, on travaille tous en même temps sur la partie technique, comme le jeu au sol. On se partage les tâches entre les différents coachs. Nous nous entraidons et sommes complémentaires.
Comment se passe la communication entre vous trois ainsi qu’avec vos joueurs ? Par exemple, vous êtes à chaque fin de rencontre sur le terrain en cercle. Que vous vous dîtes dans ce moment-là ?
VINCENT : C’est une petite discussion à chaud pour débriefer mais le plus gros du travail se fait la semaine. Nous travaillons sur des retours avec la vidéo. Ça commence dès le lundi soir avec Kevin et l’équipe. Le lendemain il y a des retours spécifiques par ligne avec pour ma part, un retour sur le jeu des trois quarts. Le dernier visionnage se fait le vendredi, c’est généralement basé sur l’adversaire à venir. Kevin arrive à récupérer régulièrement des images des autres équipes. Nous travaillons tous dessus, joueurs y compris, pour mettre en place une stratégie spécifique pour le match suivant.
MIKAELE : C’est un debrief’ qui n’est pas définitif, on parle de ce qui est positif et négatif mais l’important, c’est en début de semaine, à froid et avec le recul. Les images nous aident à être plus précis. Pendant les matchs, chacun va être plus attentif à la partie qu’il travaille à l’entraînement. Personnellement, je vais avoir un regard plus avisé sur le collectif par rapport à la défense, la mêlée et les mauls. A la mi-temps, il y a un retour par thème puis collectivement. Nous élaborons ensuite une nouvelle stratégie si besoin. Ça nous arrive aussi de croiser nos avis, ce n’est pas fermé. Si quelque chose m’a échappé en défense, les autres coachs peuvent me le dire.
Votre passé de joueurs pros vous sert-il aujourd’hui dans votre quotidien de coach ?
MIKAELE : Oui, je pense que ça m’aide beaucoup mais ça ne remplace pas le diplôme d’entraîneur. Avoir été pro ne suffit pas pour devenir coach ! Rien ne remplace la formation. D’avoir fait les deux, la formation et ancien pro, ça m’aide beaucoup car j’ai cette connaissance du monde professionnel. Ça apporte un plus sur les entraînements.
VINCENT : J’ai évolué en Pro D2 mais à cette époque, certains joueurs de mon équipe n’avaient pas le statut qu’ont aujourd’hui les joueurs du REC. Je n’ai pas eu une grande carrière. J’ai eu la chance de faire quelques matchs mais il y avait des joueurs qui étaient meilleurs que moi, avec plus d’expérience. Je n’ai pas eu la carrière de Mika ! Je ne communique pas vraiment avec les joueurs du REC sur mon passé parce que je les trouve bien meilleurs que ce qu’on a pu être ! Ils apprennent certes de nous mais nous apprenons aussi d’eux. Certains, même jeunes, ont des carrières bien fournies. Le rugby évolue énormément, les joueurs sont aujourd’hui plus rapides, plus forts, plus techniques. J’essaye d’amener d’autres compétences et d’échanger beaucoup avec eux.Kévin le dit très bien, on apprend de tout le monde et tout le temps.
Avez-vous des missions spécifiques auprès des joueurs hors terrain ?
VINCENT : Elles sont plutôt dévolues à certains joueurs de l’équipe. Nous avons défini plusieurs types de leaders dans le collectif. Il y a les leaders de jeu bien sûr mais aussi des leaders « motivationnels ». Ce sont ceux qui ont plus de facilités à prendre la parole dans le vestiaire. Enfin, il y a les leaders en charge de la vie du groupe. Ils sont vigilants au fait que tout le monde s’intègre bien. C’est la force du groupe qui fonctionne en dehors du terrain.
MIKAELE : Sur les recrues, c’est effectivement plus collectivement que chacun donne de sa force. J’essaye d’intervenir chez les Espoirs mais ça reste sur le terrain. J’essaye de donner quelques conseils surtout autour de la mêlée. Je le fais aussi avec les filles, au Stade Rennais Rugby, depuis 3 ans. En tout cas, je reste à disposition pour le REC si besoin. Avec les Espoirs, c’est à la demande et en fonction de mes disponibilités. Bien sûr, sans prendre la place de quelqu’un, c’est de l’entraide.
Vous êtes tous les deux dans le staff Réciste depuis quatre ans. Est-ce que votre rôle a évolué au fur et à mesure de la montée en puissance du club ?
VINCENT : J’ai été intégré au fur et à mesure. Yann Moisan a commencé à me faire confiance il y a quatre ans. Il y a déjà une énorme évolution quand je compare au moment où je jouais. Nous avions seulement un entraîneur des avants et un des trois quarts. C’est une perpétuelle évolution. Kevin a besoin de tenter des choses en permanence donc nos missions dans le staff et la manière de travailler évoluent assez régulièrement. Au j o u rd’ h u i , Kevin s’occupe de la conduite du jeu et de manager le projet. Nous avons aussi l’apport de Jordy avec une vision plus axée sur le joueur, il amène des outils supplémentaires au service du jeu. Yoann lui est en charge de la performance physique et des données GPS. Les staffs sont plus complets.
MIKAELE : Ça évolue tous les ans. Il y a toujours de nouveaux outils qui arrivent pour être plus précis dans notre travail. Ça nous permet d’aller plus loin comme la vidéo et les données GPS. Même si ça existe depuis un moment, les fournisseurs améliorent toujours ces outils. Avec nos nouvelles données, nous avons accès par exemple aux nombres d’accélérations, aux nombres d’impacts comme le nombre de course ou encore la vitesse ! Sur la vidéo, il y a maintenant différents logiciels de découpage. Nous avons également une application, Rugbycentric, qui permet de suivre chaque joueur. Nous pouvons mieux évaluer la fatigue des joueurs, répertorier tous les statuts et toutes les blessures. C’est très intéressant et très précis. Nous pouvons mieux planifier nos entraînements. Qui peut s’entraîner à 100%, qui est en reprise, sur qui on peut compter etc.
Quel est votre regard sur les ambitions du REC cette saison ?
MIKAELE : Sans prétention, nous visons cette montée et je pense que c’est possible. Nous avons une équipe jeune et dynamique. C’est à nous d’être vigilants, de rester attentifs et de ne pas trop se précipiter. Il faut prendre du recul et prendre les meilleures décisions avant chaque match.
VINCENT : L’ambition de monter en Nationale 1 est légitime. Nous sommes en Fédérale 1 depuis quatre saisons. Il y a eu une restructuration des niveaux au sein de la fédération de rugby. Aujourd’hui, nous sommes dans la quatrième division. C’était la troisième il y a encore deux saisons et l’année prochaine, il y aura la création de la Nationale 2. Il faut à minima accéder à cette Nationale 2 et si le groupe se donne les moyens, pourquoi ne pas nourrir l’ambition d’aller chercher cette Nationale 1. Il n’y aura que deux élus, il faudra cravacher. Nous avons vu face à Périgueux qu’on avait un concurrent très sérieux dans la poule ! On s’y attendait, il va falloir compter avec eux. Il faut attendre quelques journées de championnat pour savoir où nous pouvons clairement se positionner mais notre groupe est ambitieux !