C’est un patronyme bien connu du rugby brétillien qui a reposé ses valises au Rheu, en provenance de Grasse. Jean Forgue, 26 ans, est de retour chez les « Jaune et Noir » et compte bien apporter son enthousiasme et son expérience, tout en générosité.
« Pouvez-vous me rappeler dans dix minutes le temps de finir mon ménage ? Et oui, nous ne sommes pas que des brutes, nous faisons aussi attention à notre intérieur ! ». Aussi précis et méticuleux avec un ballon donc, qu’à la maison. Voici Jean Forgue, aîné d’une fratrie de trois garçons. Ses deux frangins, le rugbyman de la bande en parle avec plaisir : « Dans la famille, je suis celui qui a vraiment récupéré le côté sportif. Mes deux petits frères, eux, sont plus « intellos » : l’un prépare son entrée à Interpol à Lyon l’an prochain et le second est encore étudiant en Sciences Politiques, à Dallas. ». L’admiration au regard du parcours de ses petits frères n’est pas feinte, elle est authentique. Comme l’est Jean Forgue, de retour au Rheu six ans après avoir quitté la petite commune de l’ouest rennais.
« La Bretagne, ma terre de cœur »
Gamin, le numéro 15 rheusois est branché sport individuel : natation, tennis et judo. Le foot est aussi au programme mais c’est le rugby qui l’emporte, grâce à ses valeurs et à sa camaraderie définitivement à part. A Plaisir, Jean Forgue fait ses gammes, lui qui aime également regarder les matchs avec son papa le week-end : « Il y avait du rugby à la maison et petit à petit, j’ai accroché puis adoré ce sport. C’est venu naturellement. Je suis numéro 9 de formation mais en arrivant au Rheu, je suis passé en troisième rideau sur les postes d’ailiers ou d’ouvreur. ». Son arrivée en Bretagne, via les études en STAPS effectuée à Rennes, l’amène d’abord à évoluer au Rheu, en Fédérale 3, sous les ordres d’un certain Yann Moison. Avec celui qui deviendra son coach au REC Rugby, il obtient la montée et suit le technicien lors de son départ vers le club voisin. S’en suivront trois années riches d’émotions et de points inscrits : « J’ai démarré avec l’équipe à 7 universitaire de Rennes, c’était énorme, nous nous sommes éclatés, avons été champions de France puis d’Europe. Dans cette équipe, il y avait Arnaud Le Berre, Mathieu Brignonen, Gaëtan Béraud, Sébastien Fasquel, Martin Bertrand ou Romain Laboudigue. Ça fait une belle petite équipe non ? Au REC, c’était pareil, j’ai retrouvé ces gars-là, nous nous sommes régalés. Mon premier match en F2, ce fut un derby, contre Le Rheu, c’était fort ! Certes il y avait la rivalité forte entre les deux équipes, notamment chez les anciens dirigeants et supporters mais entre joueurs, c’était top de s’envoyer pendant 80 minutes et de boire une bonne mousse tous ensemble ensuite ! ». Avec la formation rennaise, l’arrière enquille les points et participe très activement à la montée en Fédérale Une, avec une équipe bulldozer qui écrase tout sur son passage : « Ce match de la montée, contre Orsay, c’est mon plus beau souvenir. Tant d’émotions, de bonheur, c’était immense ! ». La suite, en revanche, est plus contrastée. En Fédérale Une, l’ancien rheusois joue moins, avec onze titularisations tout de même et des stats toujours au rendez-vous. Peu à peu cependant, il perd en temps de jeu et en importance dans un club qui accélère inexorablement vers le professionnalisme, avec les renforts de joueurs ayant joué plus haut laissant moins de place aux artisans de la montée : « C’est l’évolution normale des choses. Bien sûr, j’aurais aimé finir autrement, avoir une sortie peut-être moins sur la pointe des pieds, sans parler d’un tapis rouge non plus. Mais c’est ainsi et je n’en veux à personne ! Je n’ai que des amis au REC ! ».
Après ses années bretonnes, le numéro 15 est appelé par Damien Vacher, coach à Grasse. Dans un rugby beaucoup plus rugueux et agressif, à l’entraînement comme en match, laissant beaucoup moins de place à la tactique et à la technique, Jean Forgue se régale malgré tout : « C’était un rugby différent mais j’avais sans doute besoin de cela, sportivement comme humainement. Je me suis régalé et j’ai trouvé là-bas de nombreux copains. Les amis, c’est l’essence même de ce sport. C’est aussi ma seconde famille ». Comme la Bretagne est aussi sa terre de cœur : « Je fais tout pour devenir un vrai breton ! Vivement la fin des restrictions sanitaires afin de retrouver ma galette saucisse aux Lices le samedi matin. Le beurre ? S’il n’est pas demi-sel, ce n’est pas du beurre ! ».
Depuis près de sept ans, grâce à sa seconde famille, celle du rugby, Jean vit plus sereinement l’éloignement de ses proches, partis aux Etats-Unis en 2014 pour suivre un papa dirigeant au sein du groupe Le Duff à Dallas et rentré depuis au Rheu. Un retour combiné, donc, à celui de l’aîné qui ne fait que bonheur et plaisir à tout le monde : « Sincèrement, ce fut parfois dur d’être éloigné de mes proches depuis tant d’années. On se voyait une ou deux fois par an, j’ai pu découvrir les Etats-Unis, c’est immense et dingue. Aller voir un match de NBA à Dallas ou de foot américain, c’était géant ! D’ailleurs, pourquoi pas jouer au foot US mais dans ce cas-là, je suis simplement le mec qui rentre et qui botte, le kicker, je ressors direct après. Résultat, je suis au match, au milieu du show, je ne prends pas de coups et je ne paie pas ma place ! ». Avant le foot US dans quelques années peut-être, il y a Le Rheu, où il a retrouvé de nombreux copains dont les coachs, dont il salue le travail : « Martin et Maxime font un boulot impressionnant. Ils ont pris la mesure du poste, échangent beaucoup avec nous, c’est très intéressant ! ». D’autant plus que la saison est « plaisante à jouer, avec un groupe qui montait en puissance avant la coupure, qui peut envisager de finir dans le Top 6 ». Côté pro, un autre projet ambitieux est au programme, bien que freiné par la crise sanitaire : « Je travaille sur la réalisation d’un projet à Pacé. Je m’investis beaucoup dessus, j’espère que nous pourrons bientôt reprendre et avancer sur celui-ci. Si ça marche, je compte bien m’éclater et je n’aurais pas de raison de partir. Si jamais en revanche ça ne fonctionnait pas, les USA pourraient être un sacré délire. Je foncerai sans hésiter ». Non sans avoir fait un brin de ménage avant de partir, évidemment !