Hier joueur au CPB Handball après une belle carrière pro, notamment du côté de Cesson, Pierre Le Meur est passé de l’autre côté de la ligne de touche pour prendre cette saison la succession de Franck Prouf, après plusieurs saisons à la tête de l’équipe réserve. Dans une Nationale Une révisée et bien plus excitante, il sera la guide cette saison d’une équipe bien décidée à s’éclater, à l’image de son succès initial face à Angers.
Les sourires et la victoire sont au rendez-vous pour votre première sortie en tant que numéro 1. Quel sentiment vous habite dans l’instant ?
Avant tout de la fierté. Non pas celle d’avoir gagné un match en tant que coach mais celle d’avoir reçu l’approbation et la confiance de mes joueurs sur le projet de jeu que nous partageons. Sincèrement, après un très gros mois de travail, je ne voulais surtout pas qu’ils soient en difficultés ou perdent ce premier match chez nous, devant notre public. C’est la récompense des efforts et du travail qu’ils ont fourni. J’ai une grande admiration pour mes joueurs !
Pourquoi une admiration ? Leurs talents, leurs attitudes ?
N’oublions pas une chose, primordiale : mes garçons ont un travail à côté et sont tous bénévoles quand on parle handball ! Il faut du courage, un état d’esprit exceptionnel et beaucoup de valeurs pour venir se « mettre sur la tronche » le soir après une journée de boulot et jouer un match aussi intense et plein après 35 heures de boulot toute la semaine. Je suis et resterai toujours admiratif de cela. Les gars sont là pour le plaisir, de gagner oui, mais aussi de jouer, de tenter des trucs. C’est l’âme du CPB.
La configuration « double-activité » modifie-t-elle la donne vis-à-vis du modèle pro ? Vous êtes aussi passé par là…
C’est évident, oui. Quand il n’y a pas d’argent, les choses sont rendues plus simples. Nous, joueurs ou entraîneurs, sommes moins dans la parano, il est plus facile, même si ça ne l’est jamais vraiment, de se dire les choses, de se remettre en cause. Il n’y a plus tous les à-côtés, les impératifs, les enjeux économiques. L’argent existe ici mais dans un rayon plus vaste, celui du développement du club, de la formation. Cette équipe du CPB, qui performe depuis si longtemps, c’est une bande de potes, des copains heureux de se retrouver ensemble, qui donnent tout sans compter. J’admire cela. Quand on revient chez les amateurs, on retrouve l’essence même de ce pourquoi nous avons choisi d’aimer ce sport un jour.
Vous parliez de projet de jeu. Comment s’articule-t-il vous concernant ?
La priorité pour moi, c’est le plaisir. Par rapport à tout ce que nous venons d’évoquer, je sais que les garçons donneront tout…quand ils en auront les capacités physiques et mentales. Contrairement à d’autres équipes, ex-pro ou aspirant à le devenir, mes gars n’ont pas que le handball a penser alors que la performance et la régularité exigent un grand investissement sur tous les plans. Il y aura fatalement des moments difficiles mais cela fera partie de la saison. Tactiquement parlant, j’ai beaucoup échangé durant la préparation, nous avons débattu ensemble et tous adhèrent à l’idée directrice. C’est un honneur, un plaisir et une base idéale pour travailler.
« Je fonctionne à l’humain, au sentiment »
Cette Nationale Une nouveau format vous offre quelles perspectives ?
Sincèrement, j’ai de la chance d’arriver en même temps qu’elle ! Nous aurons le plaisir de jouer de grosses équipes comme Caen, Vernon ou Grenoble, qui ont l’ambition de retrouver la Proligue. Depuis trois ans, ce groupe était privé de play-offs pour quelques buts ou un point manquant… Là, c’est la récompense avec une grosse adversité et la fierté d’être dans la poule « haute ». Il n’y a pas d’objectif chiffré et fixé, juste cette envie de prendre les matchs avec beaucoup d’envie et de tout donner chaque semaine même si parfois, nous serons amenés à souffrir ! Sur la durée, ce sera compliqué de rivaliser mais nous allons faire quelques coups, c’est certain !
Vous voici définitivement coach. Plus aucune envie de rentrer sur le terrain et « d’envoyer » ?
Sincèrement, non, c’est bon. Désormais, je les regarde, ça comporte sa part d’impuissance mais le plaisir est là également. Je retrouve l’adrénaline du terrain, différente. Je fonctionne beaucoup à l’humain et je souffre quand je dois mettre des garçons de côté. Faire des « choix », c’est la partie très dure du métier, je déteste. Le jour où ça ne me fera plus « ch… », je serais devenu un vieux con et là, j’arrêterais !
Un dernier mot sur Jean-Marc Larhant, décédé il y a quelques jours, à qui un superbe hommage festif et souriant, à son image, a été rendu en début de match ?
C’était chouette, et à son image. Nous ne voulions pas de minute de silence, ou d’un moment pesant, solennel. Ça n’aurait pas été lui ! Cela faisait quatre ans qu’il m’accompagnait avec la réserve. Je voulais cette victoire pour lui, lui faire ce cadeau. Il aurait été heureux de l’hommage que nous avons essayé de lui rendre. Il était l’humour et la gentillesse incarnés. Il est entré dans ma vie comme un ovni, quelqu’un dont on ne sait pas comme il arrive là et qui prend une vraie place dans les coeurs. C’était un ami et il sera là avec nous toute la saison, je n’en doute pas !
Julien Bouguerra