Extrait JRS 60 – Voile – Luke Berry : « En quatre ans, le niveau de la course s’est encore élevé ! »

Arrivé sixième en 2018 pour sa première Route du Rhum, Luke Berry était proche de faire mieux lorgnant longtemps la cinquième place mais terminant d’un souffle à la septième place. Sans regret, tant cette nouvelle traversée fut une riche expérience pour le skippeur du Class 40 Lamotte Module Création. Entretien.

Avec un petit recul d’un mois, êtes-vous satisfait de cette septième place en catégorie Class 40 ?

Le positif l’emporte, forcément, tant le plateau était relevé, avec beaucoup de paramètres à considérer pour apprécier le résultat à sa juste valeur. D’abord, c’était la première grande course pour ce nouveau bateau, qui s’il a encore quelques points que nous pouvons améliorer, a offert beaucoup de satisfactions, de vitesse et de possibilités. Ensuite, je crois que près de 33 % de la flotte n’est pas arrivée en Guadeloupe, cela donne un aperçu de la difficulté de mener cette Route du Rhum à son terme. Enfin, il a fallu gérer des aléas sur la fin de course, bien qu’ayant tout étudié de près pour arriver le plus vite et le mieux de l’autre côté, naviguer sans les deux aériens, tombés dès le quatrième jour de course et donc, sans information sur le vent. Cela aurait pu tourner tout autrement. Le bateau arrive en bon état, moi aussi et nous jouons le top 5 jusqu’au bout. Le sourire est donc bel et bien là.

Votre manière de naviguer, au-delà du bateau en lui-même, a-t-elle évolué entre vos deux Route du Rhum ?

En vieillissant, on prend forcément de l’expérience et la lecture des événements et projets de course changent également. Il y a une certaine sagesse ou un pragmatisme qui fait que là où j’aurais peut-être foncé il y a quatre ans, au risque de tout casser, j’ai préféré cette fois-ci freiner pour ne pas risquer de tout mettre à l’eau, inconsidérément. Je me suis senti en revanche encore plus exigeant techniquement, j’étais en pleine forme physiquement et je suis heureux d’avoir su répondre au défi imposé par le niveau impressionnant imposé par les collègues de jeu. C’était vraiment une course très enrichissante, dont nous allons, avec le Team, ressortir encore plus expérimentés. Le travail effectué également en amont avec mon préparateur physique, Gérard Vaillant, porte ses fruits, dans la maîtrise des événements, des choix à faire et de la capacité mentale à gérer ce qui se passe face à soi.

Pas de quoi froisser votre équipe ou vos partenaires ?

J’ai la chance d’évoluer dans un Team et avec des partenaires financiers qui comprennent la navigation, les choix que doit opérer un marin. Ils comprennent et savent aussi ce qu’est une casse mécanique, un aléa et ne vont pas mettre la pression là où il n’y aurait pas forcément lieu de la mettre. C’est une chance. J’avais toujours en mémoire mes deux démâtages de 2019, qui furent traumatisants. Il y en a eu trois autour de moi, lors de gros fronts au large et cela fait forcément réfléchir. Lever un peu le pied, c’est aussi respecter l’aventure collective construire en amont, hors de l’océan.

Avec vous pu fêter un peu votre arrivée avec vos partenaires en Guadeloupe et pu récupérer d’une telle course ?

Le corps humain est étonnant, vous savez (rires) ! Sur le final, pour rattraper le temps perdu suite à mon choix de passer par le sud à l’approche de la Guadeloupe (neuvième, Luke est remonté ensuite jusqu’à la 5ème place, ndlr), j’ai tout donné. Je n’ai presque pas dormi pendant trois jours et pourtant, j’ai trouvé les ressources pour faire la fête avec tout le monde, bien comme il faut ! Je me demande où le corps va chercher cela mais c’est ainsi. La suite fut un peu plus dur puisque j’ai attrapé le COVID une fois la ligne franchie ou presque, et la grippe pour les fêtes de fin d’année. De quoi gâcher un peu les deux semaines de vacances qui s’offraient à moi. Le corps humain, je vous dis.

Place désormais à un peu de repos avant de repartir ?

Du repos, il en faut un peu mais nous allons rapidement nous retrouver afin d’évoquer les ambitions et stratégies à élaborer. Nous avons un très bon bateau pour le large, très polyvalent. On va se voir bientôt et nous communiquerons rapidement sur tout cela.